c'est l'inverse pour moi, j'ai nettement plus apprécié cette comédie que La vie est belle, trop cucul la praline et trop empreint de morale chrétienne (à ce propos, une des scènes de You can't take it with you préfigure It's a wonderful life, la scène du tribunal où la foule se presse pour payer l'amende du héros rappelle la scène où les habitants de Bedford Falls se cotisent pour rembourser la dette des Bailey au fisc).
Bref, un peu réticent de prime abord, j'ai été vite emballé par l'improbable galerie de portraits, la vivacité des dialogues, l'abatage des acteurs, le rythme enlevé du film... et j'ai trouvé ça vraiment drôle, et jouant sur un tas de registres humoristiques différents, du comique de situation à celui de répétition, de la satire à la farce, c'est d'une grande richesse. J'admets que le personnage de Barrymore est un peu agaçant à force de bonhommie et de bienveillance, avec ce petit côté sentencieux et condescendant. Par contre j'aime la fraicheur et la justesse de Jean Arthur, vraiment bien dans ce personnage, et si James Stewart joue ici plus un faire valoir qu'un premier rôle, il le fait très bien. Mon favori c'est Edward Arnold, je le trouve remarquable dans cette composition du magnat Anthony P. Kirby, pour moi c'est lui qui porte le film. Et puis la galerie de seconds rôles est évidemment une composante importante du film, on n'est pas loin du film choral par moment, avec la mère Kirby, snob et compassée, Poppins, l'employé de bureau devenu créateur d'automates, le pique-assiette russe, les artificiers amateurs, etc...
Là où le bât blesse, c'est quand cette joyeuse famille passe à table et que les serviteurs noirs qui jusque là semblaient traités sur un pied d'égalité et faire partie pleinement de la troupe se retrouvent cantonnés à la cuisine et ramenés à leur domesticité et, probablement, leur négritude. C'est évidemment la marque des années 30 aux US mais ça pose des limites un peu chagrines à l'anticonformisme du héros (et par extension, à l'humanisme du réalisateur). Notons que Billie Yarbo campe avec beaucoup de naturel et d'allant cette énergique cuisinière, elle illumine chacune des scènes où elle apparait.
Ceci mis à part, j'ai vraiment été emballé par cette comédie, j'ai franchement ri, j'ai vibré, j'ai été ému, un excellent moment pour moi.
4.5/6