de jolan » 01/05/2021 04:15
Bon eh bien je me lance alors
You Can't Take It With You – Frank CAPRA 1938
Je serai pour ma part plus indulgent, car je ne saurais être totalement mauvais, j'adore Capra. Mon adhésion à son cinéma date du premier jour et durera toujours. L'humanisme de ses personnages et de ses sujets, l'universalité du propos, cette ode à l'entraide et la solidarité, la générosité, la bonté qui en émanent, la poésie, le romantisme, une certaine enfance éternelle, cette quête d'un bonheur idéal, d'une famille et/ou d'un lieu refuge (le Shangri-La utopique de son film précédent) qu'on désire et recherche tous. Je le considère comme l'un des cinéastes les plus importants de son époque, et je trouve que son cinéma n'a pas pris une ride.
Alors certes, c'est traité de manière très naïve, à la façon d'un conte, comme c'est souvent le cas chez Capra, il prend un thème et le décline de manière allégorique. Il faut surtout bien se rappeler dans quel contexte Capra tourne ses films, à quelle époque, ce qu'elle a de terrible, et qu'il aborde de manière détournée, comme pour y remédier. Car même s'il s'agit de cinéma et de divertissement, je crois qu'il serait faux d'occulter totalement la profondeur et la noirceur qui sont sous-jacents.
C'est donc un bon moment, amusant, original, poétique, farfelu, malicieux, inventif, dansant, charmant, revigorant, musical, artistique, enfantin, romantique, joyeusement anarchique, une recherche du bonheur, contre les forces de l'argent, envers les hommes qui se rendent malade (l'ulcère à l'estomac de Anthony P. Kirby) à force de pouvoir et de responsabilités, hors-sol, le rêve d'une vie de famille et d'amis dans une grande maison joyeusement bordélique et accueillante (on y entre sans sonner), en marge des conventions, où chacun peut s'adonner à sa passion et vivre comme il l'entend, en tout liberté, où l'unique règle est de « s'amuser ». Même la religion/spiritualité est toute relative et le grand père a sa propre façon de dire le bénédicité.
Le film souffre néanmoins d'exemples un peu légers (les locataires ne font en fait rien de leur vie et sont de parfaits oisifs assistés en plus d'être des « demeurés » caricaturaux, la mère qui écrit parce qu'elle a vu une machine à écrire, l'imprimeur qui ne voit pas la stupidité de ses tracts, la fille qui veut danser, les inventeurs dans la cave qui se prêtent à des jeux aussi inutiles que dangereux, le professeur de danse qui ne vient que pour manger, mais bon, chacun doit vivre et s'épanouir comme il le veut...) et quelques couacs inattendus (les domestiques noirs). Mais comme on est dans la fable, ce n'est pas (trop) grave.
Puis il y a le choc de la rencontre des deux familles, qui tourne inévitablement au feu d'artifices. L'artifice, c'est l'argent, ou le mensonge ? Car l'honnête James Stewart a souhaité montrer sa belle-famille telle quelle, dans sa totale vérité sans fard, alors qu'Alice (sans doute au pays des merveilles ?) voulait masquer au maximum l'excentricité des siens, qu'elle sait décalée et dérangeante « je vous ai présenté ma famille, dans toute sa prétention, pourquoi vouloir présenter la vôtre sous un faux jour ? » Les trompeuses conventions sociales les séparent puisqu'ils ne sont pas d'un même monde. Or nous sommes tous du même monde, et c'est l'argent qui sépare les êtres, par ce qu'ils croient posséder, ou ne possèdent pas. « le chômage, c'est grave émotionnellement mais pas économiquement »
J'ai donc revu ce film avec plaisir, je ne l'avais pas revu depuis bien vingt ans. Et même si, je le répète, ce n'est pas pour moi le meilleur de Capra, il y a une jolie petite histoire, qui me semble au final assez secondaire, les scènes de prison et au tribunal qui évoquent ses autres films plus politiques, et deux jolis plans-séquence, le premier avec James Stewart et Jean Arthur, dans le parc la nuit, et le second avec son père, dans le bureau, lorsqu'il lui dit qu'il s'en va.
Il me tarde de revoir tous ses films.
3/6
AMHA of course
Jolan, le gars qui n'a le droit de ne rien dire, sinon ses posts sont supprimés illico par Nexus.