Asphalt jungle
(Quand la ville dort) J.Huston (1950)
Le titre francophone n'est pas souvent judicieux mais dans ce cas, s'il prend d'autre termes s'attache à cette ambiance de vie nocturne, interlope de la ville. La scène d'ouverture commence d'ailleurs sur la fin d'une nuit banale en apparence, mais dont on esquisse peu à peu les événements mouvementés et qui plante le décor de cette jungle, terrain d'affrontement où se joue inlassablement une lutte entre le bien et le mal, la police et les malfaiteurs, du moins en apparence car on va découvrir que rien n'est aussi binaire.
Je pensais avoir déjà vu ce film en mais en fait je le découvrais, et il est caractéristique du film noir de gangster de l'époque, une bonne histoire, des personnages très marqués, campés par des acteurs convaincants, une tension tout au long du film, de l'action et du rythme, il n'y pas de temps mort.
Le personnage central est le maillon le plus modeste de la bande, Dix, à l'aspect solide et inquiétant d'homme de main brutal, dans son costume et avec son chapeau mou (comme tous à l'époque, même les truands savaient se tenir
)
Il est considéré comme un simple "hooligan" mais il se révèle plus profond qu'un simple gangster violent, et finit même par une sorte de naïveté tenace dans ses désirs de retourner dans son Kentucky natal pour y retrouver une vie simple, par inspirer une sorte de sympathie.
D'ailleurs on retrouve ce mélange dans tous les personnages et la limite du bien et du mal derrière ces façades de respectabilité est brouillée: l'avocat Emmerich, personnalité du barreau, est véreux et pour sauver sa ruine
s'engage dans un casse et le recel, le détective Cobby retourne sa veste ou bien le flic de quartier, lieutenant Ditrich est prêt à trahir le fournisseur, personnages versatiles prêtes à trahir leurs complices pour sauver leur peau et de fait plus noires que la bande de truands qui se revèlent plus solidaires entre eux (le chauffeur Gus et le perceur de coffre) .
Le doc, Riedenschneider, brillant criminel, tiré à quatre épingles au penchant pour les jeunes tendrons mexicains (il en parle plusieurs fois) et Dix forment au final, après le casse bancal, une paire d'associés hétéroclite, presque incongrue mais en toute confiance.
Les rôles féminins sont généralement limités à de ravissantes bombes sexuelles idiotes dans ce genre de film, mais Jean Hagen, sort du lot, et le petit rôle de la future star Marilyn lui donne l'occasion en quelques scènes
d'irradier l'écran. Et comme toute tragédie, le héros s'il y en a vraiment un dans ce film, meurt à la fin.
Un film de casse au premier abord mais dont le récit du cambriolage laisse place à une vision très noire et juste d'une société violente et implacable.
Ma note 5/6