Olaf Le Bou a écrit:Y a t-il déjà eu dans l'histoire une période où la médiocrité a été aussi fièrement revendiquée et assumée ?
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Courteline ( l'intelligence et la finesse même) écrivait il y a plus d'un siècle que
passer pour un idiot aux yeux d'un imbécile est une volupté de fin gourmet ! La confrérie des animateurs télé (dont Hanouna n'est qu'un des représentants caricatural) met en scène le zapping de tout ce qui relève de la pensée et de la réflexion. Ils sont poussés au cul par un timing d'enfer, car ils doivent en permanence accrocher le téléspectateur, et ils ne disposent que de très peu de temps par sujet abordé. Ce n'est plus du digest de la culture, c'est de l'indigeste programmé. Il faut faire concis, rapide, racoleur, réducteur, agressif (c'est pire quand l'agression, moteur souvent privilégié pour maintenir le rythme, est remplacé par le laudateur, l'encenseur, là l'indigence du propos confine au sublime, et Courteline se rappelle à mon bon souvenir
).
Je m'alarme moins que l'ami Olaf car ce constat, que je partage avec lui, me fait plutôt rigoler. Il n'y a rien de nouveau sous le soleil télévisuel et radiophonique, de tous temps des émissions racoleuses et flatte-couillons ont sévies, et je dois reconnaître que j'en ai apprécié certaines quand elles traitaient de sujets futiles et partaient en grosse déconnade de cour de récré. La tarte à la crème, le coup de pied au cul, m'ont toujours fait marrer. Et avec les émissions plus ambitieuses, depuis Polac, Desgraupes, et leurs successeurs plus ou moins cultivés ( Finkielkraut avec son "Réplique", et même Calvi dans "C dans l'air", toutes émissions d'une heure traitant d'un sujet unique) je trouve mon compte.
Là où je rejoins complètement Olaf, c'est dans ma profonde détestation des interviews expresses qui mettent en avant le seul animateur, face à des personnalités culturelles et politiques malmenées dont l'oeuvre ou l'action est réduite à quelques phrases pour répondre au bagout de l'animateur, ce batteur d'estrade arrogant.
Bourdieu refusait de passer à la télé. Et j'en veux beaucoup à Topor, qui avait jurer de montrer son cul pour prix de son passage à l'écran et s'est dégonflé au dernier moment (c'était il y a trente ans). S'il l'avait fait, j'aurai pu avoir la quintessence de ce que peut offrir l'étrange lucarne, la dérision maniée par la culture, le cul du génial dessinateur Topor sous les yeux effarés du cirque télévisuel (impensable à l'époque).
De nos jours, les culs sont partout, mais leur propriétaire ne s'appellent pas Topor.