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C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition - 2010-2021

Pour discuter de tous les sujets généraux autour de la bande dessinée, des libraires, des éditeurs et des auteurs

C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition - 2010-2021

Messagede nexus4 » 25/06/2010 11:38

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Edit : Afin de mieux comprendre de quoi il retourne, nous réunissons au début de ce sujet différents documents sur l'économie de la bande dessinée :

POUR MIEUX COMPRENDRE LE MARCHÉ DE LA BD :


SITES :

Syndicat des auteurs de BD : http://syndicatbd.org/
Syndicat des éditeurs de BD : http://www.sne.fr/sne/groupes/bande-dessinee.html
Etats généraux de la Bande dessinée : http://www.etatsgenerauxbd.org/

PETIT RAPPEL

Souvent mentionné, la répartition des gains sur la vente d'une BD. Il existe plusieurs variantes mais à quelque iotas près, ce sont les même.

Image

Xavier Guilbert a écrit:Un petit exemple chiffré, histoire d'illustrer la chose.
Selon le Ministère de la Culture et de la Communication, voici la répartition du prix de vente d'un livre (littérature générale, mais ça marche aussi pour la bande dessinée): Auteur/8% - Editeur/21% - Fabrication/15% - Distribution-Diffusion/20% - Point de vente/36%

Pour schématiser, prenons un Auteur qui reçoit 10% de droits d'auteurs, et un Editeur qui perçoit 20% du prix final de l'album vendu 10€, pour lequel il a fait une avance sur droits de 5000€.
Voici, pour différents niveaux de ventes, les gains de l'un et de l'autre:
Voici, pour différents niveaux de ventes, les gains de l'un et de l'autre:
... 0 ventes - Auteur: 5000€ / Editeur: 0€ - 5000€ d'avance à l'auteur = -5000€
... 1000 ventes - Auteur: 5000€ / Editeur: 3000€ - 5000€ d'avance à l'auteur = -2000€
... 2000 ventes - Auteur: 5000€ / Editeur: 6000€ - 5000€ d'avance à l'auteur = 1000€
... 3000 ventes - Auteur: 5000€ / Editeur: 9000€ - 5000€ d'avance à l'auteur = 4000€
... 5000 ventes - Auteur: 5000€ / Editeur: 15000€ - 5000€ d'avance à l'auteur = 10000€
(c'est le point auquel l'auteur a fini de rembourser l'avance sur droits. Chaque vente supplémentaire à partir de 5000 exemplaires va donc lui rapporter 1€, l'éditeur empochant 2€)
... 10000 vente - Auteur: 10000€ / Editeur: 25000€ - 5000€ d'avance à l'auteur = 20000€

Comme on le voit ici, on note que très rapidement, l'Editeur va rentrer dans ses frais sur l'avance accordée (le point se situe à 1667 exemplaires) et est donc positif dans son investissement bien avant que l'auteur ne commence à percevoir des droits supplémentaires. Certes, l'éditeur est également celui qui avance les frais de fabrication, et c'est là que la question du tirage initial (qui correspond à un autre type d'avance) entre en compte: un tirage trop ambitieux signifie beaucoup d'invendus, qui viennent entamer la marge de l'Editeur... (mais l'Editeur a cette chance de mutualiser les risques sur plusieurs titres, alors que l'Auteur dépend entièrement du succès d'un seul)





Nous sommes partis avec Luc Brunshwig sur un petit débat en mp sur les symptomes de la crise de la bande dessinée, ses causes et se remèdes. J'ai proposé a Luc d'en causer publiquement pour avoir les avis de tout un chacun, les auteurs, les libraires et bien évidement les consommateurs étant les bienvenus pour donner leur ressenti.

Je me permets de citer une partie du post de départ de Luc, il completera si besoin.
Juste une question comme ça qui me turlupine depuis un moment. Je sais que les ventes vont pas au mieux dans nos chères librairies... j'en vois à peu près la cause et j'avoue que ça ne m'étonne pas du tout. Mais... je constate que vos critiques BD sont de moins en moins lues (le nombre de lecteurs fait carrément peur d'autant que vous les laissez de plus en plus en ligne). Est-ce là aussi un effet pervers de la crise ? Sentez-vous un désintérêt ou un éloignement des lecteurs ?


Pour les ventes des libraires, je crois qu'on ne peut que constater les dégâts de la CRISE avec un grand K ajoutée à la crise larvée du secteur dont la surproduction ne fait que masquer un désarroi du lecteur devant des étalages trop achalandés avec peu de repères qualitatifs et un portefeuille qui s'amaigrit de jour en jours. Ce à quoi il faut ajouter les ventes en lignes dont la part ne cesse d'augmenter.

Pour les chroniques, il faut voir que les chroniques sont en ligne définitivement. Donc plus elles sont vieilles, plus elles ont de visiteurs. On n'a pas de marqueur à un mois par exemple. Autres constations, et c'est de notre fait :

- Les lecteurs BDGest sont de plus en plus éduqués, ils cible non seulement leur achats mais aussi leur prévision d'achats. Ce a quoi il faut ajouter les affinité lecteur Chroniqueurs. Ca c'est le points positif.

- Les chroniqueurs en ont leur claque de faire des chroniques d'albums mou du genou, des T.4 poussifs, des albums d'introduction ou de transition, peu importe l'excuse pour qualifier des albums qu'un bon éditeur n'aurait pas du laisser sortir en l'état. Il se rabattent donc sur ce qui sort des sentiers battus, un poilichon intello (voir carrément) comme le prouve les deux coups de coeur du moment. Conseiller du Daniel Clowes à un lecteur de Soda, c'est un peu fort de café. D'où peut être une certaine désaffection. Pourtant on leur dit aux chroniqueurs "les gô, vous avez le top 5, les meilleures ventes, faites nous au moins une ou deux chroniques sur des albums piochés dans ces deux tas". Oui mais non, bof, bof, bof. Peut être qu'ils sont blasés nos chrochros. Peut être surtout que la production est mauvaise, tout simplement. Quel album a marqué ce début d'année ? Faut qd meme chercher. Même moi, avec le recul, je ne suis pas très satisfait de ce que j'ai proposé en preview. On fait avec ce qu'on a.

- On est super à la bourre sur les chroniques, on sort rarement des chroniques dans le bon timing, ni trop tot, ni trop tard. J'ai même vu passer un manga de l'année derniere. Je suis pas sur que ca suscite un engouement de folie et que le serveur s'éfondre devant l'afflux de visiteurs. :D

Pour les chiffres, autant que BDGest puisse servir d'indicateur :
En visites on est en progression de 10% par rapport a 2009
En pages vues idem.
Le temps de visite est étonnamment stable depuis 5 ans : 10mn par visites (si on vire les visite passante a 1 page, ceux qui sont arrivé là par hasard et qui se carapaté à toute berzingue )
Pour les chroniques, on est en ligne par rapport aux années précedente, avec une baisse de 10% à la louche. C'est pas non plus l'effondrement que craignait Luc.

Sujets connexes :
http://www.bdgest.com/forum/une-vitalit ... hilit=ACBD
http://www.bdgest.com/forum/recherche-n ... hilit=ACBD
http://www.du9.org/Numerologie-edition-2009
http://www.bdgest.com/forum/evolution-d ... t2352.html
http://www.bdgest.com/forum/dommage-que ... 44901.html
et pour la liste : http://www.bdgest.com/forum/series-inac ... t2617.html

A vous les studios !
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Re: C'est la crise ?

Messagede smileybone » 25/06/2010 11:49

Pour ma part, depuis 2ans à peu près, j'achète beaucoup moins.
Pour une raison de budget d'abord, car suivant du manga, du comics et de la FB, je suis bien obligé de trier.
Mais ce n'est pas la cause principale.
De moins en moins de nouveauté m'interesse. Et pourtant, il y en a de la sortie.
Beaucoup se diront, "wahh celui il dit n'importe quoi", mais ca devient comme le manga, le dessin, pour beaucoup de nouveauté est lisse, beaucoup de choses se ressemblent. Les scénar, pareil, rien qui m'interpelle.
J'ai cette impression que peu de série savent où elles vont, et les meilleures séries sont celles où tu sais d'emblée que le gars il va faire 3 tomes, il a tout dans la tête.

Sur les chroniques, j'en lis moins qu'avant pour les memes raisons; je feuillette à la FNAC ou ailleurs, et je sais déjà si çà va me plaire. Je lis les chroniques des BDs qui m'interesse ou vont m'interesse.
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Re: C'est la crise ?

Messagede luc Brunschwig » 25/06/2010 12:41

J'ai déjà pas mal causé sur le sujet, en différentes années et sur différents forums, mais je veux bien y aller de ma petite réflexion du moment :violon: ... enfin, quand je dis du moment, disons que c'est ma réflexion des dix dernières années, parce que la crise on savait qu'elle allait arriver, dans notre secteur comme ailleurs. Mais comme pour la bourse, tant qu'on gagne, on joue... sans se poser la question de ce qui se passera quand ça va tourner mal.
Mon avis ? Contrairement à ce qui a été dit par certains, la masse de publication n'a pas élargi l'offre ou permis de découvrir de nouveaux talents. Les nouveaux talents, ils se sont noyés sous les masses d'albums que les libraires n'avaient pas la possibilité de lire et donc de conseiller.
Premier album, premier mauvais résultat, à la porte, fin de carrière. Là où les magazines dans les années 70 donnaient du temps au auteur (en leur permettant d'apprendre leur métier sur des histoires courtes, de s'installer dans le regard des lecteurs), on est passé à une logique de "on tente, le public vote, si il dit non en refusant d'acheter on vire les jeunes du loft !!!" (excuser moi l'analogie mais c'est bien à ça que ça me fait penser).
L'offre, la surproduction l'a uniformisée, de la même façon qu'elle l'avait déjà fait à la fin des années 80 avec le trop plein de sous-7 vie de l'Epervier et les mièvreries uniformes produites alors par Media Participations. On ne surproduit pas dans la créativité, on surproduit dans la contre-façon, en essayant de copier le succès du voisin ou en s'auto-copiant. Ca ne veut pas dire qu'il n'y a pas là-dedans quelques albums de qualité, mais en uniformisant tout, du dessin, à la couverture en passant par le scénario, tout se ressemble tellement, qu'il est difficile de repérer d'emblée sur les étales le talent dans le nouveau sous-Lanfeust, le nouveau sous-Largo ou le nouveau sous-Titeuf...
On fait ça parce que ça doit se vendre tout seul avec le nouveau tome du modèle dont on poursuit le succès, mais quand le lecteur s'est pris 10, 20 sous-merde, pour un truc bonnard, tout s'effondre et ce n'est pas le libraire saoûl de voir d'ébouler tous ces ersatz qui va aller s'amuser à séparer le grain de l'ivraie...
Une vente qui doit se faire toute seule nécessite qu'on offre de la qualité, sinon, on perd la confiance des lecteurs (surtout quand il n'y a jamais de tome 2) et une fois la confiance perdue, le marché s'effondre... La Bd est avant tout un art du plaisir... personne n'est assez stupide pour continuer d'acheter (très ? trop ?) chers des bouquins qui n'en fournissent aucun, ni visuel, ni intellectuel... Et c'est là où on est bien merdeux en ce temps de crise, c'est que la plupart des éditeurs, à force de piller le porte monnaie des lecteurs avec des BD à 13 euros, mal encadrées, mal finies, à la limite de l'amateurisme, à force de trahir le contrat en apportant pas de suite aux séries entamés, ont convaincu les lecteurs d'arrêter de "tenter" la loterie à 13 euros le billet trop souvent perdant.
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Re: C'est la crise ?

Messagede alycia » 25/06/2010 14:09

Tout a changé. On voit aujourd’hui exister des maisons d’édition avec des catalogues volumineux dont les chiffres des meilleures ventes, auraient été considérés, il y a vingt ans, comme des échecs commerciaux retentissants. Pourtant, ces maisons prospèrent, éditent toujours plus et souvent mieux. Ces éditeurs font leur métier.
Mais si ces maisons d’éditions peuvent vivre de ces faibles tirages, c’est parce que leurs auteurs n’ont plus de prix, Beaucoup reçoivent une avance ridicule qu’ils acceptent avec le rêve secret que la gloire les prendra un jour dans ses bras parfumés, et là, on verra ce que l’on verra ! Sans avoir, hélas, compris que l’éditeur concerné vit de son rêve, comme autrefois l’éditeur dit « à compte d’auteur », en accumulant une suite de petits bénéfices sur de petits tirages. Mais cet éditeur ne lui donnera jamais les moyens de passer à la dimension supérieure, lui préférant toujours un nouvel arrivant encore moins exigeant qui, du fond de la cuisine de chez maman ,où il vivra encore 15 ans, se prépare à montrer son œuvre à un public qui l’attend : « Bon, il ne m’a pas proposé d’argent pour le premier album, mais si cela marche… » Le jeune auteur est (je sais que la comparaison est risquée) comme un travailleur sans papier : il n’aura du travail que s’il accepte des conditions de travail encore plus basses que son frère immigré en situation légale qui, lui-même, était moins cher que….


Voilà, tout est dit là, Copyright Terpant J. sur un autre site :D Comment vouloir alors qu'avec ses minis-à valoir, et quand ils existent ou sont payés, encore, la "qualité " suive ?????
Bref, les éditeurs ont compris le truc, on surproduit, et en aditionnat tout un tas de petits bénéfs de çi de là,
ils arrivent même à bien en vivre, par contre, les auteurs eux, forcés de bosser à coté, ne peuvent plus décemment assurer une qualité potable - Vu, et entendu sur mes 3 derniers festivals BD [:bdgest] [:bdgest] [:bdgest] [:bdgest]
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Re: C'est la crise ?

Messagede nexus4 » 25/06/2010 14:12

Sinon, si l'une des réponses a la crise de fin 80 à été le second souffle donné par la nouvelle vague, ou se fait le bouillon de culture cratif aujourd'hui ? Sur les blog... Gratuits. Chui pas sur que ca aide le marché. :P
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Re: C'est la crise ?

Messagede sol » 25/06/2010 14:16

luc Brunschwig a écrit:ont convaincu les lecteurs d'arrêter de "tenter" la loterie à 13 euros le billet trop souvent perdant.

c'est vrai que vu le prix des BDs, j'hésite à commencer de nouvelles séries. Quand on lit beaucoup de BD, on se rend compte qu'il n'y a finalement pas tant de BD que ça qui sortent vraiment du lot. La plupart sont tout de meme correctes, mais bon pour un certain nombre d'entre elles, je regrette d'avoir mis 13 euros quand cela semble trop banal. Bref, à mon avis la cause de la baisse des ventes, c'est le prix excessif des BD, ce qui est encore pire dans le contexte de la crise. En plus, contrairement aux CD et DVD, quelques mois plus tard, les BD qui ne sont plus des nouveautés ne baissent pas de prix :cry: Bref, beaucoup trop cher pour ne pas etre élitiste.
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Re: C'est la crise ?

Messagede alycia » 25/06/2010 14:21

nexus4 a écrit: Chui pas sur que ca aide le marché. :P


Pour avoir accès aux panels de ventes, GFK et autres, je te garantis que pour 9 albums sur 10, issus de blog ou pas,
la moyenne des ventes se situe maintenant autour de 3000 !!! Beaucoup n'y arrive pas en plus ! D'ou les libraires saturés de carton ( Cf BD Hannibal lecteur de Salma/Libon , excellent au demeurant ) :lol: :lol:
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Re: C'est la crise ?

Messagede rollin » 25/06/2010 14:43

Bon, j'ai posté ça sur un autre sujet....mais ça recoupe beaucoup d'avis déjà expimés...comme quoi, on risque assez vite de tourner en rond, en fait ;)

Il y a eu une époque où une série avait le temps de s'installer ..Un des exemples les plus célèbre est celui de la Quête de l'oiseau du temps..voilà une série qui a "décollé" au T4.
Aujourd'hui, la Quête se serait arrêtée au T2 peut-être
Il y a eu une évolution du marché qui fait que lorsqu'on sort un premier tome d'une série, s'il ne décolle pas tout de suite, a fort peu de chance d'être sauvé par des tomes suivants..donc la série est dans la "merde" très rapidement ...et pourquoi?...ben, une des raisons essentielles réside dans cette fameuse surproduction dont les éditeurs sont responsables...c'est à celui qui occupera le plus d'espace, histoire "d'étouffer" la concurrence
Et quand un éditeur vous dit qu"au bout d'une semaine de mise en place, il sait si le tome sorti va marcher ou non, et qu'il n'y a plus qu'une marge ridicule pour espérer un "miracle", cela devient terrifiant
Evidemment, cela ne concerne pas les grandes séries populaires qui elles se vendent toujours très bien...
Il faut savoir qu'il y a eu ces derniers mois, une chute énorme des ventes pour le reste de la production..la faute à la crise, sûrement en partie, une désaffection du lectorat qui se réfugie dans les séries populaires évoquées plus haut, et le désarroi devant l'avalanche d'albums qui sortent tous les mois...Ne vous méprenez pas sur l'apparente bonne santé de la BD (heureusement, le manga est là)...Des albums qui se vendent à 3000 ou 4000 ex., il y en a des tonnes, et quand une nouveauté dépasse les 6000, c'est presque la fête
Alors, il ne faut pas s'étonner que certains éditeurs n'hésitent pas à "sabrer" rapidement des séries...
A l'heure actuelle, faire des dyptiques ou des histoires en trois tomes me paraît le plus raisonnable...on a plus de chance de pouvoir livrer aux lecteurs qui ont aimé une histoire de la voir un jour terminée...et si finalement, un vrai succés se dégage, il y a toujours moyen de rebondir sur un nouveau cycle..
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Re: C'est la crise ?

Messagede alycia » 25/06/2010 14:59

Ce sujet m'intéresse bcp, mais un 1er tome qui "cartonne" il faut encore que l'éditeur le laisse cartonner, mon copain a fait un album BD, la mise en place a été de 3200 exemplaires, les ventes exactes, payées, sur relevés droits ont été
de 3044 exemplaires :D Bref la mise en place a été épuisé, par le bouche à oreille bien sur, sans promo aucune !

Et bien crois tu que sa série va continuer ? Et non, il y a 99% de chances qu'il n'y ait pas de suite, sinon l'éditeur aurait au moins demandé la couverture de l'opus 2, pour que les représentants du diffuseur fasse leur job ... si une suite était dans l'air du temps !

CQFD - Et encore, mon copain avait QUE 140 euros pour scénar et dessin + 70 pour la couleur, total 210 par planches,
visiblement, les nouveaux venus chez cet éditeur ont les dents encore moins longues et doivent vivrent d'amour de rêve et d'eau fraiche :fant2: :fant2: :fant2:
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Re: C'est la crise ?

Messagede luc Brunschwig » 25/06/2010 15:06

Je rebondis sur les propos de Lucien. Pourquoi un tome 2 ne viendrait pas rattraper les mauvaises ventes d'un tome 1 ? La surproduction est elle aussi la cause de ce problème inconnu il y a 20 ans (ou du moins, face auquel les réactions des éditeurs et des libraires n'étaient pas les mêmes qu'aujourd'hui).
Face à la surproduction et à l'informatisation de leurs points de vente, les libraires ont eu tendance à prendre moins d'exemplaire au titre à la mise en place (pour ne pas avoir à avancer trop de trésorerie sur des albums incertains, pour garder un peu de place et de visibilité à l'ensemble de la production... enfin, il y a plein de raisons). Au final, ça donne quoi... des mises en place réduite pour des albums non lus, donc impossible à conseiller. l'album n'a alors que la place (de plus en plus réduite) qu'il occupe en librairie pour s'assurer une vie. Moins mis en place, moins visible, il sera de fait moins acheté... et de toute façon vendu en deça de sa mise en place... En général on compte entre 20 à 30% de retour sur la mise en place quand tout ne va pas trop mal... un exemple, un album placé à 10.000 ex peut espérer être vendu à 7 ou 8.000 ex si tout va bien...
Le problème avec l'informatique, c'est que la mise en place de la suite de la série, sera faite par les libraires non sur ce qu'ils avaient pris en mis en place, mais sur ce qu'ils avaient fait comme vente sur le titre précédent. La mis en place du tome suivante sera donc de 7.000 ex, donc encore moins visible, encore moins acheté, avec un retour mécanique entre 20 et plus sûrement 30 à 40%... si bien qu'on tombe très vite à une vente du second tome entre 4.500 et 5.000 ex (et comme on l'a dit plus haut, il y a déjà de quoi s'estimer heureux)... puis vient le troisième tome... [:bdgest] [:bdgest] [:bdgest] [:bdgest] [:bdgest] [:my name snake:2]
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Re: C'est la crise ?

Messagede rollin » 25/06/2010 15:11

heu..réponse à Alycia
humm..j'imagine que tu ne donneras pas le nom de l'éditeur ;) ..ceci dit, j'ai une question précise...tu parles du relevé de droits...s'il s'agit du premier, cela correspond en général à la mise en place...il faut quelques mois pour comptabiliser les retours... c'est le deuxième relevé qui permet d'approcher les ventes réelles..en gros, un an après la mise en place..
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Re: C'est la crise ?

Messagede rollin » 25/06/2010 15:16

luc Brunschwig a écrit:Je rebondis sur les propos de Lucien. Pourquoi un tome 2 ne viendrait pas rattraper les mauvaises ventes d'un tome 1 ? La surproduction est elle aussi la cause de ce problème inconnu il y a 20 ans (ou du moins, face auquel les réactions des éditeurs et des libraires n'étaient pas les mêmes qu'aujourd'hui).
Face à la surproduction et à l'informatisation de leurs points de vente, les libraires ont eu tendance à prendre moins d'exemplaire au titre à la mise en place (pour ne pas avoir à avancer trop de trésorerie sur des albums incertains, pour garder un peu de place et de visibilité à l'ensemble de la production... enfin, il y a plein de raisons). Au final, ça donne quoi... des mises en place réduite pour des albums non lus, donc impossible à conseiller. l'album n'a alors que la place (de plus en plus réduite) qu'il occupe en librairie pour s'assurer une vie. Moins mis en place, moins visible, il sera de fait moins acheté... et de toute façon vendu en deça de sa mise en place... En général on compte entre 20 à 30% de retour sur la mise en place quand tout ne va pas trop mal... un exemple, un album placé à 10.000 ex peut espérer être vendu à 7 ou 8.000 ex si tout va bien...
Le problème avec l'informatique, c'est que la mise en place de la suite de la série, sera faite par les libraires non sur ce qu'ils avaient pris en mis en place, mais sur ce qu'ils avaient fait comme vente sur le titre précédent. La mis en place du tome suivante sera donc de 7.000 ex, donc encore moins visible, encore moins acheté, avec un retour mécanique entre 20 et plus sûrement 30 à 40%... si bien qu'on tombe très vite à une vente du second tome entre 4.500 et 5.000 ex (et comme on l'a dit plus haut, il y a déjà de quoi s'estimer heureux)... puis vient le troisième tome... [:bdgest] [:bdgest] [:bdgest] [:bdgest] [:bdgest] [:my name snake:2]


no comment :D
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Re: C'est la crise ?

Messagede luc Brunschwig » 25/06/2010 15:22

Je réponds (avec un peu d'insistance) au lecteur qui disait que le problème est le prix des BD... c'est vrai et c'est faux... je pense personnellement que c'est surtout le rapport qualité/prix qui est problématique, la satisfaction qu'on a retiré de l'album acheté et lu... si tous les albums nous plaçaient sur orbite de plaisir, personne ne se plaindrait du prix...
à part pour en avoir encore une ou plusieurs doses supplémentaires :lol:
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Re: C'est la crise ?

Messagede alycia » 25/06/2010 15:23

rollin a écrit:heu..réponse à Alycia
humm..j'imagine que tu ne donneras pas le nom de l'éditeur ;) ..ceci dit, j'ai une question précise...tu parles du relevé de droits...s'il s'agit du premier, cela correspond en général à la mise en place...il faut quelques mois pour comptabiliser les retours... c'est le deuxième relevé qui permet d'approcher les ventes réelles..en gros, un an après la mise en place..


Non je le donnerai pas, ce nom :evil: :evil: :evil: pas l'envie qui m'en manque toutefois ! mais avec un tirage TOTAL de 4500 ex, dont 1ere MEP à 3200,
tu vois que c'est "mort d'avance" malgré un presqu'épuisement des ventes de cette micro mise en place de ce mini tirage
il y aura "pas de suite" ! :diable:
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Re: C'est la crise ?

Messagede Pierre-Paul » 25/06/2010 15:32

je suis invité à la discussion, j'en profite. Perso j'ai fait du scénario avec une intention d'amateur "éclairé" ( :lol: à vous de juger :D ). 6 albums plus tard, l'envie d'en faire plus m'est complétement passée après avoir reçu des réponses sur un projet du genre "auteurs inconnus et pas rassurants pour els libraires" (je cite cette expression superbe!), "on n'a pas le temps", "manque d'effectif pour suivre ton projet avec l'attention qu'il mérite", "surproduction", ou bien un délai de réponse excessivement long. Si ils me lisent, je tiens à préciser que 2 des six éditeurs contactés ont répondu plus rapidement avec une argumentation solide. Je ne dis pas que le projet en question était géniallissime, Luc brunschwig l'aurait avec raison classé dans les erzatz et il était assumé comme tel, cela a cependant suffit pour me faire arrêter de rêver. L'écriture c'est une page tournée en ce qui me concerne, les petites bulles vertes à côté de mon nom ne sont plus d'actualité (et j'ai la flemme de créer un autre pseudo), je me concentre à 100% sur le métier qui me fait vivre et sur ma famille (et la photographie pour l'envie de création)
Dernière édition par Pierre-Paul le 25/06/2010 18:36, édité 1 fois.
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Re: C'est la crise ?

Messagede moriniere » 25/06/2010 15:37

Ce qui permet aussi (et surtout) aux éditeurs de continuer à "prospérer" c'est aussi les placements qui génère une trésorerie virtuelle.
Etant donné qu'il y a un train de vie à maintenir, plutôt que de ralentir la cadence pour produire mieux il y a un emballement de la machine. on cherche la poule aux oeufs d'or et pour ce faire on place un paquet de série. ON sait d'avance qu'on va se prendre une brique dans la tronche au moment des retours mais on place, parfois de "force" en envoyant un peu plus que la quantité demandé par les libraire...
Et ce placement, qui n'est pas une vente ferme, finance le train de vie de l'éditeur. On prend des retours, mince, mais bon, pas trop grave, on a 50 séries ce mois ci qui sont placées et qui comblent la brèche. Et ainsi de suite, de semaine en semaine, et de mois en mois.
Un bon succès c'est chouette, mais emprunter l'argent des libraires ça marche aussi en attendant d'avoir ce bon succès.
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Re: C'est la crise ?

Messagede nexus4 » 25/06/2010 15:52

de ces quelques réponses je retiens comme solutions, du point de vue du consommateur :
- Fond de catalogue à bas prix : on se ferait plaisir sur des vieilles séries madeleine de Proust. Mais n'est ce pas le rôle des intégrale finalement ? Je n'ai pas verifié la diminution de cout entre celles ci et les tomes à la pièce.
- Diptyques ou triptyques, le lecteur est pret à investir sur une histoire dont il connaitra la fin. C'est fou le nombre d'intervenants, des gros lecteurs, gros collectionneurs qui disent : "Moi ca me tente mais j'achèterai qd je la série sera terminée et que je serai sur d'avoir la fin". Des post comme ca on en a à la pelle. Du coup c'est un cercle vicieux.

Petite question aux libraires ? Quelle est votre marge de manoeuvre pour dire "ca je prends, ca non, ca non c'est de la daube, ca, non, ca tu rigoles j'en ai vendu 5, ca non, ca oui c'est top". Est ce que vous êtes "obligé" de prendre le ventre mou de la production ? De manière utopique on pourrait penser que votre conseil peut etre le reflet de votre choix (ce qui veut dire refus aussi) en amont. Refus de mise en place :arrow: vous "forcez" les éditeurs à faire plus de qualité. Vi, je sais, c'est simpliste. :P
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Re: C'est la crise ?

Messagede Beatrice Tillier » 25/06/2010 15:55

C'est la crise dans la mesure, où on a tellement tiré sur la corde, qu'il fallait bien à un moment qu'elle rompe. :?

On va dire pour simplifier que c'est la "mondialisation" et son modèle de production et d'échange qui est responsable de cela. Nous sommes dans une ère de profit, de surproduction et de surconsommation à tout va, jusqu'à épuisement des ressources (que ce soit des énergies fossiles, de la terre, des humains...) au lieu d'être réalistes et logiques en adaptant une production raisonnée à nos besoins réels.

Forts de ce modèle et profitant du fait que l'industrie du livre se portait bien, ainsi que de la baisse des coûts de fabrication d'un livre ( de plus en plus d'auteurs réalisent leurs oeuvres numériquement, ce qui élimine les scans, la photogravure, l'impression des bleus etc... - sans pour autant répercuter cette économie sur sur le prix du livre ou le salaire de l'auteur qui lui a dû investir dans du matériel couteux pour pouvoir le faire ! - et l'impression des albums à l'étranger), les éditeurs se sont mis à produire beaucoup d'albums (comme dits dans les posts précédents, en épuisant les filons à la mode : héroïc fantasy, historique... en copiant ou en déclinant à outrance ce qui cartonnait déjà) en se basant sur le fait que sur 10 bouquins sortis, si 1 seul marchait en se vendant tout seul, ils avaient remboursé leur investissement de départ et finalement étaient gagnant au bout du compte. (car les auteurs sont payés en AVANCE sur droits d'auteurs, c'est à dire, qu'ils remboursent à l'éditeur ce que lui a couté la création de l'oeuvre).
Et malheur aux 9 autres, qui n'ayant pas eu de promotion, de mise en place, de communication ou simplement le temps de s'imposer, disparaissent sans atteindre le tome 2.
Au départ les éditeurs utilisant cette politique étaient critiqués par leur pairs, qui finalement leur ont emboité le pas, perdant au passage leur âme d'éditeur et de diffuseur d'une oeuvre artistique et culturelle.

Le résultat ?

-Des auteurs dont l'oeuvre a été étouffée dans l'oeuf.
-Des livres non aboutis car manquant de maturité.
-Des lecteurs lésés, qui, ayant acheté un tome 1 sans suite, deviennent méfiants et n'achètent désormais que des séries terminées ou suffisamment avancées pour leur avoir fait reprendre confiance.
-Et comme le lecteur n'achète pas, la série est arrêtée (c'est le serpent qui se mord la queue) [:my name snake:2]
-Et des libraires qui à présent n'ont plus le temps matériel de lire les parutions et de les conseiller à leurs lecteurs.
-Des éditeurs, qui, pour réaliser tout cela, ont dû grossir et payer des salariés et par enchainement, des bouquins trop chers (alors que moins couteux à produire) et des auteurs moins payés.

Bref, plus personne ne fait son boulot. L'éditeur ne cherche plus à vendre ses livres, ni les commerciaux, le libraire retourne les cartons sans les ouvrir.

Certains éditeurs commencent à faire machine arrière. Ils se recentrent sur des oeuvres bien précises, mais surtout sur ce qui ne demandera pas trop d'efforts à vendre : un auteur déjà connu et "bancable", un sujet facile à placer et porteur. Pas de prise de risque. Du coup beaucoup d'auteurs se retrouvent sur la touche en attente de signature de contrat...

Ce sont même les commerciaux qui décident aujourd'hui de ce qui se vend ou pas. Alors que logiquement, c'est à eux de convaincre le libraire que leur livre est mieux que celui du voisin. C'est le monde à l'envers !!! [:my name snake:2]
Imaginez un livreur de salade (en gros un conducteur de camion avec son diable et ses cagettes) dire à la coopérative qui l'emploie : "dorénavant, moins de scarole, parce que les consommateurs en mangent moins que de la laitue et du coup j'en livre trop et ça me fait mal au dos !" alors qu'au fond, il est payé pour ça !!
Et grassement en plus. Sur les 13 € de l'album, 6 € lui reviennent, contre 3 pour l'éditeur et 0,50 € pour l'auteur qui est quant même le créateur de la matière première !!! (je crois, mais je peux me tromper, que le coût de revient d'un bouquin avoisine les 1 € - merci de me corriger si je dis une grosse bêtise!!)

Et quand on lui retourne ses scaroles à notre livreur, au lieu de les redonner à une autre épicerie (donc remettre les livres dans le circuit, c'est à dire les stocker dans un entrepôt et les redistribuer quand il a une commande) il va préférer les détruire. Car aujourd'hui, c'est moins cher d'imprimer que de stocker.
C'est pour cela qu'on se retrouve avec des livres en rupture de stock (chouette, on croit qu'on en a vendu plein, mais non, ils sont juste passés à la trappe !!), sauf que l'éditeur ne veut pas les réimprimer parce que ça ne s'est pas assez vendu : c'est sûr, si il n'y a plus de livre, ni de mise en place, on ne peut pas les vendre !!!

Un beau gachi !!!

Juste au passage, (ce n'est pas pour pleurer sur notre sort !!) saviez-vous que notre métier "dessinateur de B.D. " n'existe pas ? selon la loi, nous n'avons même pas le droit au titre d'"auteur" comme les scénaristes. Nous sommes toujours la case "autre" à cocher.
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Re: C'est la crise ?

Messagede nexus4 » 25/06/2010 16:07

moriniere a écrit:Ce qui permet aussi (et surtout) aux éditeurs de continuer à "prospérer" c'est aussi les placements qui génère une trésorerie virtuelle.
Etant donné qu'il y a un train de vie à maintenir, plutôt que de ralentir la cadence pour produire mieux il y a un emballement de la machine. on cherche la poule aux oeufs d'or et pour ce faire on place un paquet de série. ON sait d'avance qu'on va se prendre une brique dans la tronche au moment des retours mais on place, parfois de "force" en envoyant un peu plus que la quantité demandé par les libraire...
Et ce placement, qui n'est pas une vente ferme, finance le train de vie de l'éditeur. On prend des retours, mince, mais bon, pas trop grave, on a 50 séries ce mois ci qui sont placées et qui comblent la brèche. Et ainsi de suite, de semaine en semaine, et de mois en mois.


Beatrice Tillier a écrit:Bref, plus personne ne fait son boulot. L'éditeur ne cherche plus à vendre ses livres, ni les commerciaux, le libraire retourne les cartons sans les ouvrir (grâce à un magnifique tour de passe-passe du diffuseur : les retours ne sont pas payant pour le libraire !!)


C'est marrant vos histoires de cartons, on dirait tout à fait la blague juive où les mecs du sentier se vendent un carton en faisant a chaque fois un benefice jusqu'au moment ou y en un qui ouvre le carton.
- Allo Moshe, ils ont qu'une jambe tes pantalons !
- Quoi !? T'as ouvert le carton ? Mais c'est pas fait pour être ouvert, c'est fait pour être revendu !
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Re: C'est la crise ?

Messagede kness » 25/06/2010 16:12

Je vais juste répondre en tant que minuscule éditrice depuis un an, et un peu auteur depuis 10 ans - oui en général on commence jeune, et ça fait partie du problème.

Une grande partie du souci tient effectivement d'abord à une production massive - 40 sorties / semaine, faut avoir envie - et complètement, ou quasi complètement uniformisée. À part quelques petits, un peu comme nous mais plus gros, qui essaient des trucs avec plus ou moins de bonheur, on a le choix entre : des chevaliers un peu celtes, des meufs un peu à poil, et de l'humour ras les godasses, et je compte pas la mode des blogs publiés qui sont plus ou moins bien, mais souvent moins quand même.

Dans tout ça, j'ai pas acheté de vraie bd cartonnée classique depuis un sacré bail, je compte pas les albums des amis parceque bon là c'est un peu du marketing affectif.
Le dernier truc que je connaissais pas et que j'ai acheté sans lire était "La Parenthèse" chez Delcourt, parceque j'étais tombée sur une critique sur Bodoi qui m'avait parlé.
Et le truc d'avant remonte à plusieurs semaines.

Du coup en tant que auteur / lectrice voilà : trop de trucs, avec une majorité de choses qui ne me parlent pas, donc j'achète rien. Le coût du livre n'entre plus en compte quand on achète une bd tous les 3 mois, du coup ce n'est pas vraiment un facteur.

En tant qu'éditrice, je suis confrontée au même problème mais de l'autre côté : quoi sortir et surtout QUAND ? quand on sait qu'on ne peut plus sortir de livre de manière efficace à certaines périodes (Noel, Angoulême) parceque, dixit la distrib : ça sert à rien ton bouquin va se retrouver sous la pile de lanfeust, XIII, Titeuf et Astérix nouvelle formule. Et effectivement, c'est le cas.
On a sorti 3 volumes d'un roman graphique petit format noir et blanc, il a rien pour lui le pauvre, c'est un peu le petit enfant spécial des libraires, ceux qui l'ont lu le chouchoutent, les autres le regardent comme un petit être handicapé, et ce livre, bon moi je suis pas objective mais pour le moment j'ai vu personne qui l'ait lu et qui ait été décu, parceque au delà du graphisme qui n'est pas conventionnel par rapport à la bd actuelle, l'histoire est bien racontée et intéressante - trouve-je...
Du coup elle a eu un super succès critique... et des ventes molles. Pourquoi ? ben la faute aux gros machins entre autres, et aussi un peu au public formaté. Alors c'est bien hein ils ont raison, tant qu'on gagne on joue, mais jusqu'à quand poussera-t-on le bouchon ? comme toujours la réponse va être : jusqu'au drame. Jusqu'à ce qu'ils mettent 300 000 bouquins d'un titre lambda à la poubelle, et que ça fasse un peu cher du coup on se calme un peu.
De notre côté on va continuer à soutenir ce titre parcequ'on pense sincèrement que ce livre a quelque chose à apporter, et on aurait pu (qui a dit du ?) l'arrêter au troisième tome, mais on a bien envie de continuer jusqu'à la fin. Juste pour dire que merde, on commence un truc, on va jusqu'au bout, par respect pour les 1000 et quelques mecs qui suivent l'histoire. C'est ça je trouve l'engagement de l'éditeur de BD : soutenir, suivre, aider, porter son choix jusqu'au bout, c'est un engagement, une responsabilité.

A contrario, la partie de la maison qui s'occuppe d'Artbooks est plutôt cool, on peut vendre nos livres, même ceux à 30 euros parceque ça touche une niche. Et les niches c'est le truc en ce moment. De toutes manières on a pas le choix : soit tu fais les blondes en string, soit tu vises un public un peu plus "éduqué" - je veux pas dire des gens plus intelligents mais plutot des gens plus sensibilisés à certains types de livres, qui n'ont pas l'appréhension de la nouveauté (oui ça existe, la peur d'ouvrir un livre :D) ...

Je pense pas que le livre soit victime de la crise économique, mais plutôt que la BD est victime d'une crise autogénérée, une sorte de maladie autoimmune comme dirait Gregory House, et cette maladie il n'y a que ses acteurs principaux qui peuvent la juguler : les plus gros éditeurs.
La solution est simple et plutôt économique : moins de titres à l'année, ça fait moins de titres qui se plantent à l'année aussi, et surtout, des directeurs de collec qui se soucient un peu de l'après signature de contrat. Parceque aujourd'hui, combien d'auteurs ne voient leur éditeur que deux fois : présentation du dossier, signature du contrat, et pour le reste tu te débrouilles ?
Ça fait partie intégrante de l'intérêt de plus en plus restreint des gens, il y a de plus en plus de "nouveaux auteurs", "jeunes talents" qui sont laissés à l'abandon total avec leur premier album, sans aucun suivi éditorial, aucun conseil, et ça donne parfois des super abérrations.

Bon je crois que j'ai fait la tartine de l'année là :)
Tout ça est un peu en vrac, brut, pas très nuancé et pas forcément très gentil, je généralise pour éviter de citer mais évidemment il y a un tas de contre-exemples dans toutes les maisons d'éditions, ça sera bien quand ces contre-exemples seront la majorité et plus un luxe :)
Je retourne dans ma grotte, je reviendrai voir par ici l'avancée des débats :)

Merci merci :)

Kness pour elle-même et un peu pour la maison CFSL Ink :)
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