Larry Bambell a écrit:Après un "long" survol général, Commencé la lecture proprement dite de cet ouvrage...
Perso, c'est "Rombaldi" (en tout cas pour le tome I) contre "Dupuis 2025"...
Il faut rappeler déjà que c'est Yvan DELPORTE qui supervisait les Rombaldi, et en a rédigé les textes de présentation..
Non. Delporte écrivait certains textes, mais c'est Thierry Martens qui supervisait cette édition. J'ai d'ailleurs eu accès à la correspondance de Franquin et de Martens sur cette édition, et clairement Martens s'occupait de tout.
Larry Bambell a écrit: Une chose frappe dans les texte :au-delà de l'aspect plus "technique" (bienvenu, surtout pour les "spécialistes" du dessin (que je ne suis pas...

)) de la nouvelle éd., c'est le vocabulaire un peu trop "politisé" utilisé.. Un seul petit exemple, pour éviter de polémiquer inutilement : parler d' "idéologie" (p. 25) à propos du mouvement scout semble pour le moins désobligeant... Il y a des scouts de toutes religions , pas seulement cathos; et le mouvement des AdS lancé chez Dupuis par ... Jean DOISY, communiste bon teint (pour l'époque, ce n'est pas un reproche...), leur ressemble pas mal...
Le texte parle de l'idéologie des revues de la Fédération des Scouts Catholiques qu'illustre Franquin, et non du scoutisme en général. Et à nouveau, je vous ai donné une définition du mot idéologie, attestée par le CNRTL, qui n'est pas nécessairement péjorative - mais, je l'emploierai volontiers dans un sens péjoratif, à la suite de Franquin.
Larry Bambell a écrit: On croirait presque, en lisant l'ouvrage, que "Spirou" était une revue quasi confessionnelle !.... Alors que Dupuis visait surtout à distraire sainement les p'tits Belges; qu'il ait voulu que les grands moments religieux de l'année (Noël, ...) y trouvent un écho dessiné ne paraît pas excessif...
Spirou était une revue qui faisait du prosélytisme, comme Les Bonnes Soirées ou Le Moustique. Il n'y a aucun doute là-dessus, c'est parfaitement assumé par son fondateur, et il n'y a aucune honte à cela. Plusieurs textes incitaient d'ailleurs les lecteurs catholiques à faire des prières, en particulier dans la période qui nous intéresse. Quant à Franquin, il en avait bien conscience et n'a cessé de le souligner dans ses entretiens tardifs.
Larry Bambell a écrit: On ne retrouve pas du tout ce type de discours... "orienté" (et appuyé) avec Delporte.... dont le "catholicisme" (!!

) ne sautait pourtant pas immédiatement aux yeux !
La période couverte par l'intégrale n'a aucun rapport avec Yvan Delporte (et au passage le journal version Delporte avait également des tonalités catholiques, au grand damn du rédacteur en chef, ses témoignages affligés sur ce sujet ne manquent pas).
Larry Bambell a écrit: Pour l'aspect purement graphique, je recommande toujours le Rombaldi (pour le tome I), qui bénéficie déjà d'une très belle mise en couleurs (comme M. Amram l'a expliqué ici).
Je n'ai pas expliqué cela. La mise en couleur de Rombaldi, pour ces premières histoires, transforme, globalement, tout en marron et en gris, dans la grande mode "plus sérieuse" des recolorisations des années 1970 et 80. J'ai déjà énuméré la liste des récits recolorisés dans ce premier tome.
Par ailleurs, quand elle recourt à ces mises en couleurs refaites - dans les années 1970 avec la collection Péchés de jeunesse pour les premières histoires, ou spécialement pour Rombaldi pour Le ring et d'autres -, elle ne respecte pas les indications d'origine de Franquin. Et enfin, les histoires qui sont maintenues dans leur mise en couleur d'origine dans l'édition Rombaldi, comme les Plans du robot, souffrent du grand décalage entre les teintes des encres utilisées dans les années 80 et celles des années 40.
Voici quelques exemples qui montrent comment la nouvelle version suit les choix de l'auteur à l'époque de la création de ces planches, là où l'édition Rombaldi présente autre chose.
1)

Ces deux dernières cases d'une très belle planche de L'héritage
forment une seule image, dont la continuité est assurée, entre autres, par le prolongement de l'ombre des fauves de la dernière case vers l'avant dernière. Ces ombres sont indiquées par Franquin au crayon bleu sur l'original, et ont été suivies dans la nouvelle mise en couleur (deuxieme image). A l'inverse, non seulement la version Péchés de jeunesse / Rombaldi (premiere image) ne prolonge pas ces ombres, mais en plus crée une différence dans la couleur du sol qui brise l'effet de continuité recherché par le dessinateur. De plus, les indications de Franquin exigeaient un halo autour de la lune qui n'a pas été réalisé par Leonardo et qui a été rétabli ici. Elles exigeaient aussi des yeux verts pour les fauves, qui n'ont pas été mis dans les recolorisations successives.
2)

Dans Spirou fait du cheval, Franquin a indiqué des reflets très précis sur le cheval (image 1). Ils ont été dans la plupart des cas ignorés dans les versions recolorisées (y compris chez Rombaldi, cf image 2) et sont rétablis dans cette nouvelle édition (image 3).
3)

Et enfin, sur cette photo, on voit que la nouvelle édition (première image) respecte le placement des ombres des boxeurs, ombres dessinées par Franquin sur les originaux. Là où Rombaldi (deuxième image) oublie ces ombres et transforme les boxeurs en personnages flottant dans un vaste espace désespérant.
Larry Bambell a écrit: Il y a d'ailleurs de surprenantes différences parfois. Ici encore, un seul ex., p. 128 (Le Tank), 1ère case : (entre autres : ) la dame qui sort vêtue ici de jaune, et de rouge dans Rombaldi et l'Int. classique ??...
Une nouvelle fois, ce qui est suivi, ici, ce n'est pas la version des années 1970 réalisée par Leonardo et réutilisée par Rombaldi, mais les choix chromatiques de l'édition originale. La version du Tank qui sert de référence, globalement, ici, date donc de 1949 (souvent datée fautivement de 1948) et bénéficie d'ailleurs de rectifications par rapport à l'almanach 1947, dont la qualité d'impression était mauvaise. La dame est bien vêtue de jaune dans cette édition.
*
A nouveau, je suis à l'écoute de toutes les critiques, et j'en ai moi-même à formuler, et je connais la liste des oublis, des bourdes, des détails ratés - ce en quoi ce livre partage, avec tous les autres livres de la planète, son lot de défauts et d'erreurs (ceci n'est pas un appel à la chasse à la coquille et des bourdes, pitié !). J'imagine qu'il ne faut pas que je réponde à la moindre remarque - mes amis qui écrivent sur la bande dessinée s'affligent que je réponde à ces interventions -, mais c'était une façon pour moi d'expliquer le travail de cette intégrale et de l'exorciser.