de antoinedf » 31/03/2018 21:32
J'arrive un peu tard ; pour moi ça sera 6/20. J'aurais bien voulu trouver des qualités à ces trois albums mais si globalement, aucun des trois n'est un plantage total, on est sur du moyen. Le fait d'avoir privé Spirou du reste de son univers (l'éditeur est le premier responsable de ce résultat) en fait un héros banal, sans envergure. Le duo n'est pas attachant et les aventures sont oubliables. Si on avait eu une vingtaine d'album de ce calibre, la série se serait cassée la figure à vitesse Grand V. Encore une fois, c'est pas mauvais mais c'est banal, très en deçà de ce que doit être un Spirou.
Et ce n'est pas aidé par le choix de Cauvin au scénario ; Cauvin est un bon scénariste mais Spirou est une série qui ne lui convient pas (surtout si on lui a imposé un rythme de sortie régulier). Cauvin est un génie du gag du banal : le dessinateur de Bd, l'agent de police, le soldat qui va créer du comique dans son quotidien. Spirou ça marche pas comme ça et ça ne peut pas marcher comme ça. La scène où Spirou teste l'Aspison en est un bon exemple. Toutes les digressions sont amusantes (la voisine, le voisin qui veut regarder le foot, le pilote qui se parachute) mais ça ne prend pas, parce que Spirou est en train de détruire la ville ! Dans le dictateur et le champignon, on a une scène similaire, mais elle est causée involontairement par le Marsupilami, pas par un Spirou conscient ; de plus ces actions ont des conséquences. Le comte abandonne son invention, Spirou ramène le Marsu en Palombie. C'est pas gratuit, pas uniquement pour le gag . Les gags de Cauvin, aussi drôles qu'ils soient, desservent la cohérence de l'univers et les personnages. Dans les trois albums, Spirou et Fantasio sont bêtes ; ils prennent des décisions idiotes et ne font preuve de lucidité que lorsqu'il faut faire avancer l'intrigue. Rien que le fait que l'invention des machines soit presque magique et à l'origine de la boîte noire, réduit à néant le potentiel inventif de Fantasio. Nos héros n'ont plus rien de particulier. De plus, il y a un nombre hallucinants de coïncidences dans ces trois albums ; les méchants qui reconnaissent par hasard Spirou dans la rue (alors qu'ils ont son adresse > Cauvin aurait pu utiliser ce ressort scénaristique), le chef les retrouve par hasard parce que sinon l'appareil aurait explosé, Spirou tombe par hasard sur la Banque cambriolée, et bien sûr la fin (à croire que dans cette timeline, l'univers de Spirou fait 100m2) ...
Tout cela n'est pas aidé par le travail de Nic Broca ; tout d'abord, non, il dessine pas si mal (son style est assez proche de Seron, l'ingéniosité en moins). Son Spip est même plutôt sympa et ses couvertures sont pas mal (même ci celle-ci est la moins bonne). Ce qui pose problème c'est que Nic n'est pas un dessinateur de BD mais un animateur (de Belvision je crois) et ça se sent. Les cases sont dessinées de la même façon ; les personnages sont dessinés en pied et leurs pieds touchent le bord de la case. Il n'y a que très peu de changements de point de vue, de zooms, de "plans" plus imaginatif. Lorsqu'il se rapproche c'est toujours par soucis de lisibilité (c'est en ça qu'on sent plus son expérience d'animateur > pl 30, la case verticale, c'est typiquement le style de décor que doit fournir un animateur, pour que le réalisateur balade sa caméra dessus). Il y a des erreurs de dessins qui freinent la fluidité de la lecture (deux exemples : le dernier strip de la pl 25, j'étais persuadé que Spirou posait une question au personnage à la veste bleu, pas qu'il lui demandait de se pousser / pl19, il est impossible que la porte ait touché Spip > il était en plein milieu de la pièce avant). On a l'impression que tout va au plus facile (Fantasio se fait agresser à un coin de rue, mais la flemme de redessiner le coin de rue, donc on déplace l'agression au milieu d'une rue, voir on dessine pas le décor).
De plus Dupuis a complètement saboté la fin ; oui c'était difficile de tuer toutes ses baleines mais au moins, la fin était cohérente avec le ton du récit. La nouvelle fin est beaucoup plus poussive et expédiée. Et au final, on dévoile pas le grand méchant ... dommage.
Il y a néanmoins quelques qualités ; je peux tout à fait comprendre ceux qui aiment bien le côté tendre et absurde de ces histoires.Pour ma part, je suis pas ultra fan de Cauvin, et je vois plus les défauts que les qualités qu'il apportées. Le coup des sons est en effet sympa et permet quelques situations amusantes. J'aime bien le fait d'en faire un objet dangereux, comme une bombe qu'il ne faut pas allumé. Les possibilité scénaristiques de la boîte noire étaient incroyables et Cauvin a su trouver pour les trois tomes, une idée originale et farfelue. Si j'ai du mal à trouver des qualités pour cet album, j'aurais l'occasion de me rattraper avec La Ceinture du grand froid et La Boîte noire qui sont à mon goût, beaucoup plus réussis que les Faiseurs de silence . Le moins bon des trois, selon moi.