gio a écrit:de façon générale on a le droit de juger les lois et les décisions de justice
C’est un procès d’intention. Je ne sais même pas précisément de quoi tu parles. Si tu considères que j’ai dit quelque chose de faux ou de trompeur, merci de me le montrer. En attendant, je vais te donner un exemple précis qui illustre l’usage arbitraire qui peut parfois être fait de certains mots, et en particulier du mot “pornographie” : Alan Moore décrit son album Fille perdues (sorti en 2008 chez Delcourt, qui met en scène des relations sexuelles impliquant des enfants et de l'inceste, sans humour et sans que cela ait déclenché ni plainte ni polémique en France) que c’était de la pornographie. Or là encore c’est discutable. Mais il se trouve qu'il a expliqué lui-même pourquoi il l’a qualifié ainsi : parce que, dit-il, il supposait que s’il avait dit que c’était une œuvre d’art, les gens auraient dit “non c’est de la pornographie”, donc il dit que c’est de la pornographie pour que les gens disent “non, c’est de l’art”. Tout cela repose donc entièrement sur ce qu’il pense être le plus commode. Pourtant, c’est toujours la même BD, le même contenu, quelle que soit l’étiquette, laquelle n'est qu'une pure question sémantique qui n'altère pas la réalité objective.silverfab a écrit:J'ai rarement lu autant de mauvaise foi conjuguée!
Les BD de Bastien Vivès relèvent en effet du registre de l'humour (comme chez de nombreux autres auteurs de BD qui ont mis en scène du sexe explicite, de Gotlib à Reiser en passant par Crumb, Vuillemin et j’en passe). Bien sûr l’humour existe aussi dans la pornographie, mais il est là pour agrémenter une production dont les ressorts principaux et la fin relèvent de l’excitation sexuelle. Ce n’est absolument pas le cas dans les BD de Bastien Vivès en question, où l’humour (absurde) n’est pas un agrément, mais est bien l’unique registre employé et la seule fin.nexus4 a écrit:Si ce n'est pas de la pornographie c'est quoi ? De l'érotisme enfantin ? Soyons sérieux.
De l'humour ? Le burlesque (dans les deux sens) est souvent présent dans la pornographie.
De l'art ? Au siècle dernier, j'ai vu un jour chez kkun un recueil de photos d'un très beau N&B d'enfants posant nus dans une pièce. Ca s'appelait Les gamins je crois. La caution artistique et l'absence d'acte sexuel ne suffisait pas à masquer le fait que c'était une vraie saloperie. De la pédopornographie. Et ca a cristallisé mille faits qui m'avaient interpellé pour comprendre que je me trouvais chez un pédophile.
Si on veut chercher du côté de Gotlib (pour ne prendre que lui, c’est un exemple parmi tant d’autres), il n’y a pas que ça, loin s'en faut.e m a écrit:J'ai souvenir d'une planche où une mère lave son enfant, âgé de 2 ans tout au plus. Chute du gag : l'enfant qui a une bonne grosse érection.
Il me semble que c'est de Gotlib. Où je me trompe ?
gio a écrit:Certaines problématiques que tu soulèves me semblent trop généralisées dans ton message et devraient être placées dans un contexte particulier : tout cela dépend de la situation, des gens, de plein de choses. Si on pose pour principe, hors de tout contexte particulier, qu’il ne faudrait jamais juger les lois et les décisions de justice au motif que l’on est pas un politique ou un magistrat, cela signifierait que si un pays s'oriente progressivement vers la dictature par exemple, personne en dehors des autorités politico-judiciaires ne pourrait porter de jugement sur une telle évolution des lois et des décisions de justice, au motif que les autorités sont des professionnels et savent nécessairement mieux ce qui est juste. Cela revient à une foi aveugle en l’autorité.
gio a écrit:Il y a une équivoque dans ton propos : lorsque tu dis que je me suis “permis de juger à l’avance”, cela pourrait laisser entendre que j’ai jugé avant de connaître tous les faits. Or ce n’est pas le cas : ce qui est en cause ici, c’est le contenu de deux bande dessinées (Petit Paul et La Décharge mentale). Ces deux bande dessinées, chacun peut les lire dans leur intégralité, et comme tu t’en doutes, je l’ai fait. Je n'ai pas "jugé à l'avance" car j'ai lu les albums avant de défendre ma conviction.
Eh bien je dis au contraire qu’il y a beaucoup d’intérêt à se faire une conviction réfléchie et approfondie sur le système et l’activité politico-judiciaire et à en débattre en société, pourvu bien entendu que cette conviction soit rationnelle (ce qui implique d’être basée sur des faits, des connaissances, de la logique, etc). Mais ta présentation de la question est biaisée d’office : tu parles immédiatement des avis peu poussés, sur son canapé, basé sur des échanges de comptoir ou de forum… (et nous savons les connotations de ces termes) Autrement dit tu fais un package-deal entre d’une part le fait de se faire une conviction personnelle sans être soi-même le juge en charge et le fait de se faire une opinion ignorante et hâtive, peu informée, sans savoir de quoi on parle. Comme si les deux étaient nécessairement indissociables et s’impliquaient mutuellement. (J’avoue que le mot “canapé” me fait tiquer quand j’ai fait 300 km pour aller au procès Vivès à Nanterre. Je ne sais pas si une seule personne dans la salle d’audience était venue d’aussi loin.) Ce qui est nécessaire, encore une fois, c’est la rationalité et tout ce qu’elle implique (y compris d’avoir conscience de ce qu’on sait et ce qu’on ne sait pas). Le statut social n’a ultimement aucune importance. C’est pour ça que je te disais que cela dépend de pleins de choses : il y a des situations plus complexes que d’autres, il y a des gens qui ont plus de connaissances que d’autres, il y a même des gens plus bêtes que d’autres (dans toutes les professions, même les magistrats) il y a des situations qui mêlent toutes sortes de compétences variées qui peuvent être réparties dans la population chez des individus de divers parcours et horizons… il y a toutes sortes de cas. Les choses ne se divisent pas simplement entre d’un côté le monde des politiques et magistrats qui sont tous des hommes sages, rationnels, toujours bien informés, et de l’autre tout le reste de la populace qui est nécessairement ignorante, qui se fait un avis vite fait à moitié ivre sur les réseaux sociaux. (Même si bien sûr, tout cela existe aussi.) Je pense que c’est une grande erreur d’avoir cette sorte de schéma a priori : il faut voir sur pièce, sans préjuger, justement. Et sur Internet il y a de tout : il y a la bêtise, l'ignorance et la désinformation mais il y a aussi l'information, la culture, l'intelligence, etc.Keorl a écrit:Je dis qu'il y a peu d'intérêt à juger sur la seule base de sa propre pensée, qu'on avait dans son canapé, aussi poussée soit-elle (et entre nous, elle l'est rarement assez, c'est ce que j'essayais d'expliquer).
Tu as parlé à cet égard des lois et des décisions de justice. Séparons les deux.Keorl a écrit:Et que, si on se veut rationnel, alors oui l'expression "peut pas" intervient mais est restreinte dans le temps (à savoir jusqu'à ce que l'éventuelle décision ait été prise).
En effet, quelqu’un d'autre pourrait venir sur le forum et te faire changer d’avis. Dois-tu suspendre ton jugement sur cette base hypothétique ? Il n’y aurait rien de rationnel à fonctionner ainsi. On verra le cas échéant, voilà tout.gio a écrit:Bien entendu, je n’exclus jamais, sur aucun sujet, de pouvoir changer d’avis si je découvrais des arguments / faits que je ne connaissais pas / auquel je n’ai pas songé et que j’estimerais convaincants. Mais que je puisse potentiellement changer d’avis n’ôte pas ma capacité de juger à tout moment. En l'occurrence, je ne pense pas qu’il y aura des éléments ou des arguments nouveaux convaincants à l’avenir. (Mais je les cherche quand même.) On ne peut pas partir du principe qu’on ne devrait jamais se faire une idée sur quoi que ce soit sous prétexte que l’on pourrait peut-être changer d’avis. Sinon, je pourrais dire que tu as tort de dire ce que tu dis simplement parce que tu pourrais changer d’avis.
gio a écrit:Les BD de Bastien Vivès relèvent en effet du registre de l'humour (comme chez de nombreux autres auteurs de BD qui ont mis en scène du sexe explicite, de Gotlib à Reiser en passant par Crumb, Vuillemin et j’en passe). Bien sûr l’humour existe aussi dans la pornographie, mais il est là pour agrémenter une production dont les ressorts principaux et la fin relèvent de l’excitation sexuelle. Ce n’est absolument pas le cas dans les BD de Bastien Vivès en question, où l’humour (absurde) n’est pas un agrément, mais est bien l’unique registre employé et la seule fin.
Quant à l’art, ce n’est pas un registre en tant que tel, c’est un concept qui englobe toutes les créations qui concrétisent une certaine vision, quelle qu’elle soit. L’art n’a jamais été une caution de quoi que ce soit.Si on veut chercher du côté de Gotlib (pour ne prendre que lui, c’est un exemple parmi tant d’autres), il n’y a pas que ça, loin s'en faut.e m a écrit:J'ai souvenir d'une planche où une mère lave son enfant, âgé de 2 ans tout au plus. Chute du gag : l'enfant qui a une bonne grosse érection.
Il me semble que c'est de Gotlib. Où je me trompe ?
Dans Hamster Jovial (édition de 2004) on peut voir :
- Un adulte qui embrasse goulument une petite fille sur la bouche par surprise [page 7]
- Un seau de sperme d’un enfant qui vient de se masturber. [page 20]
- Une relation sexuelle suggérée (non montrée) entre une petite fille et un adulte [page 23]
- Un adulte qui jouit à côté d’enfants qui débattent sur le vaginal/clitoridien. [page 28]
- Un vieillard qui a une érection en regardant une petite fille et qui l’embrasse ensuite goulûment sur la bouche par surprise. [page 31]
- Des attouchements enfant/adulte et enfant/enfant. [page 32 et ailleurs]
Dans Rhââ Lovely tome 1 (édition intégrale de 2017), on peut voir :
- Un loup ayant une relation sexuelle avec une enfant. [page 15]
- Une petite fille qui fait une fellation à un adulte. [page 16]
Dans Rhââ Lovely tome 3 (édition intégrale de 2017), on peut voir :
- Un enfant montrant par surprise son sexe en érection à sa mère. [page 164]
- Un enfant qui frappe un adulte avec son sexe en érection. [page 165]
- Une adulte sexuellement excitée par les testicules d’un enfant, tandis qu’elle lui met un doigt dans l’anus. [page 166]
- Un enfant qui rentre sa tête dans le vagin de sa mère qui y prend du plaisir. (Puis l’ensemble du corps) [page 168]
- Un enfant qui viole sa mère par le vagin et par l’anus. [page 170]
- Un enfant qui se masturbe, qui éjacule (ou urine, ce n’est pas clair) sur un adulte. [page 173]
Dans Rhââ Gnagna tome 1 (édition intégrale de 2017), on peut voir :
- Une petite fille qui cherche à tripoter (voire plus) les parties génitales d’un adulte. [page 193-194]
- Une petite fille sexuellement excitée par la fessée d’un adulte. (Et un petit garçon excité par la scène.) [page 195]
- Une petite fille sexuellement excitée en voyant les parties génitales d’un adulte exhibitionniste. [page 196]
- Une petite fille transportée dans un corps d’adulte qui se met à avoir toute sortes de relations sexuelles [page 220-235]
Dans Pervers Pépère (édition de 2018), on peut voir :
- Un adulte qui offre un godemichet à une petite fille. [page de garde]
- Un petit enfant montrer son sexe à un adulte en mode exhibitionniste. [page 6]
- Un adulte qui fait sentir l’odeur de son anus à un enfant pris dans la rue. [page 21]
- Un adulte qui a pris des photos d’enfants se montrant leurs parties génitales. [page 22]
- Un adulte qui amène une petite fille chez lui pour lui faire toucher son entrejambe. [page 23]
Cela n’est pas exhaustif. Par ailleurs je ne compte pas les viols ou la zoophilie. Dans tous les cas de figures bien sûr, il s’agit d’humour absurde.
gio a écrit:Si on veut chercher du côté de Gotlib (pour ne prendre que lui, c’est un exemple parmi tant d’autres), il n’y a pas que ça, loin s'en faut.
[...]
Cela n’est pas exhaustif. Par ailleurs je ne compte pas les viols ou la zoophilie. Dans tous les cas de figures bien sûr, il s’agit d’humour absurde.
Je suis étonné de cette question. Non, je ne considérerais pas ces BD comme pédopornographiques dans un tel cas hypothétique. Pas plus je ne considérerais n'importe quelle BD ou image non-pédopornographiques comme devenant subitement pédopornographique au motif qu'on la trouverait sur un site pédopornographique ou au domicile d'un pédocriminel. Le principe, c'est que les facteurs qui déterminent le caractère pédopornographique ou non, se trouvent exclusivement dans le contenu objectif de la chose, et non pas dans le regard subjectif du pédophile, qui pourrait s'exciter sur toutes sortes de choses auquel on ne songerait même pas. Par exemple, j'ai entendu dire à plusieurs reprises (je ne sais pas d'où cela provient, mais cela a été évoqué par Richard Malka à Nanterre) que les pédophiles regardaient le catalogue La Redoute. Cela n'a jamais fait des catalogues La Redoute des ouvrages pédopornographiques.L'Ombre Jaune a écrit:Et donc, si d'aventure, sur un site dédié à la pédopornographie (dont les contenus sont des photos, des vidéos, des dessins animés, etc.. , mettant en scène des adolescents/pré-adolescents/enfants), on trouvait une planche d'une BD de Vivès comme "Petit Paul" ou "Une soeur" (ou d'un des exemples de Gotlib, bien que dans son cas, àmha, l'humour qui percole sembait nous dire à l'époque, "oui, ça existe, et on va dédramatiser le contexte"), tu ne considérerais toujours pas ces dessins comme de la pédopornograhie ?
gio a écrit:Je suis étonné de cette question. Non, je ne considérerais pas ces BD comme pédopornographiques dans un tel cas hypothétique. Pas plus je ne considérerais n'importe quelle BD ou image non-pédopornographiques comme devenant subitement pédopornographique au motif qu'on la trouverait sur un site pédopornographique ou au domicile d'un pédocriminel. Le principe, c'est que les facteurs qui déterminent le caractère pédopornographique ou non, se trouvent exclusivement dans le contenu objectif de la chose, et non pas dans le regard subjectif du pédophile, qui pourrait s'exciter sur toutes sortes de choses auquel on ne songerait même pas. Par exemple, j'ai entendu dire à plusieurs reprises (je ne sais pas d'où cela provient, mais cela a été évoqué par Richard Malka à Nanterre) que les pédophiles regardaient le catalogue La Redoute. Cela n'a jamais fait des catalogues La Redoute des ouvrages pédopornographiques.L'Ombre Jaune a écrit:Et donc, si d'aventure, sur un site dédié à la pédopornographie (dont les contenus sont des photos, des vidéos, des dessins animés, etc.. , mettant en scène des adolescents/pré-adolescents/enfants), on trouvait une planche d'une BD de Vivès comme "Petit Paul" ou "Une soeur" (ou d'un des exemples de Gotlib, bien que dans son cas, àmha, l'humour qui percole sembait nous dire à l'époque, "oui, ça existe, et on va dédramatiser le contexte"), tu ne considérerais toujours pas ces dessins comme de la pédopornograhie ?
La caractéristique de l'humour de Bastien Vivès, c'est que c'est, d'une certaine manière un humour "pince sans rire". C'est-à-dire que c'est un humour dont le ressort principal consiste à traiter une situation absurde / aberrante / délirante avec un certain sérieux, comme si on avait l'impression au premier coup d'œil qu'il ne s'agit pas d'humour et que c'était réellement sérieux, parce que l'auteur ne montre pas toujours de façon très accentuée là il où faut rire. (À l'opposé d'un humour "clownesque" ou "gras".) Cela repose sur un contraste entre l'absurde et le sérieux. On peut voir ça à divers degrés dans ses albums de la collection Shampoing chez Delcourt : Le Jeu vidéo, Le Football, L'Amour, La Guerre, La Famille, La Blogosphère, etc. Le grand maître de ce type d'humour pince sans rire, et celui qui l'a poussé le plus loin à mon avis, c'est Daniel Goossens. Parce qu'il a poussé loin ce type d'humour, le public de Goossens est relativement restreint : il y a beaucoup de gens qui semblent incapables de voir l'humour dans ses BD, surtout dans certains ses albums. Une anecdote personnelle à ce propos : lorsque j'étais adolescent, j'ai fait lire des histoires de Goossens à mon cousin qui avait la vingtaine à l'époque. Celui-ci lisait les histoires (que je trouvais désopilantes) avec le plus grand sérieux, et était incapable de percevoir l'humour.e m a écrit:Donc quand c'est sous couvert d'humour bien gras ça passe, personne ne s'offusque...
Une des limites à ne pas franchir par exemple, c'est la diffamation.L'Ombre Jaune a écrit:Mec, je t'avertis gentiment : si par ta prose logorrhéique, tu fais la promotion de représentations graphiques d'enfants/de mineurs en mise en situation sexuelle, peu importe (au terme de la législation consolidée actuelle) les "gna-gna-gna c'est pas pédophile", ou les "gni-gni-gni c'est de l'art", tu t'exposes à quelques risques de confrontation de nature judiciaire, adresses IP et tutti quanti faisant foi.
Non mais, sérieux, on peut débattre sereinement, mais j'ose espérer qu'il y a quelques limites à ne pas franchir.
jolan a écrit:Bah montre l'exemple alors.
Gio n'a jamais fait une telle promotion.
Tu débloques là.
A moins que tu ne puisses prouver que "par sa prose, il fait l'apologie de la pédopornographie"
gio a écrit:Une des limites à ne pas franchir par exemple, c'est la diffamation.L'Ombre Jaune a écrit:Mec, je t'avertis gentiment : si par ta prose logorrhéique, tu fais la promotion de représentations graphiques d'enfants/de mineurs en mise en situation sexuelle, peu importe (au terme de la législation consolidée actuelle) les "gna-gna-gna c'est pas pédophile", ou les "gni-gni-gni c'est de l'art", tu t'exposes à quelques risques de confrontation de nature judiciaire, adresses IP et tutti quanti faisant foi.
Non mais, sérieux, on peut débattre sereinement, mais j'ose espérer qu'il y a quelques limites à ne pas franchir.
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