Lecture du tome 8 et de la saga terminée
Comment faire du neuf avec du vieux ? D’un point de vue scénaristique, cette série aura été un sans-faute. Malgré quelques écarts avec la Caste (dont certains + ou – légers sont sans doute à mettre au crédit des dessinateurs), j’ai trouvé que Frissen s’était parfaitement inscrit dans la veine de Jodorowsky et dans une continuité naturelle de la série mère. Tous les codes y sont respectés et on retrouve au travers des 8 albums de nombreuses références.
Certains n’auront sans doute pas apprécié ces écarts et encore moins la « réécriture » de l’histoire. Personnellement, j’ai trouvé l’idée de ce secret bien gardé dévoilé longtemps après excellente. Et faire de l’Épiphyte un des personnages principaux amène un vent de fraîcheur indéniable.
Dans la construction de la série, on est également dans la continuité de la Caste : 8 tomes, avec 8 personnages. Si Wilhelm 100 et Khonrad paraissent être des antagonistes secondaires visant à lancer la série, j’ai trouvé que les 4 tomes suivants allant de Orne 8 au Techno Baron pouvaient être lus comme un nouveau diptyque dans la suite directe de ceux de la Caste. On a également dans la fin du tome 6 un statuquo avec la fin du 6 (Dona Vicenta...) de la Caste. Enfin on termine par un dernier ( ?) diptyque avec les descendants directs de Sans Nom.
Je ne mettrais qu’
un petit 90% (tout de même) à cause de certaines approximations, de certaines facilités (qu’on retrouvait déjà cependant dans la Caste) et de nombreuses fautes d’orthographe ou grammaticales dans les dialogues, un détail pour certains, qui évoquent chez moi un certain amateurisme dans le travail de relecture.
Côté dessin, après les grands noms qui ont dessiné ce personnage, Moebius, Gimenez, Charest, Ladronn (non je plaisante, c’était vraiment hideux), la tâche s’avérait ardue pour leurs successeurs.
Valentin Sécher, dont le travail sur Khaal avait fait naître chez moi l’espoir de le voir sur la suite de la Caste (souhait exaucé) s’inscrit déjà parmi les grands noms de la BD actuelle et est largement digne de ses prédécesseurs. Niko Henrichon a également effectué un travail remarquable, et là aussi a su contribuer à ce vent de fraîcheur sans chercher à imiter qui que ce soit.
Le forfait de Mukesh Singh a permis à Sécher de revenir sur la série, pour mon plus grand plaisir, et c’était sans doute pour le mieux, tant les 6 premiers tomes forment un tout. Curieuse, mais au final bonne idée des Humanos de les avoir regroupés en une intégrale, alors qu’il ne manquait qu’un dernier diptyque.
Après, le nouveau forfait de Esad Ribić, il fallait trouver un nouveau dessinateur, et surtout celui qui allait devoir conclure la série en beauté ! Et c’est là que le bât blesse. CE dessinateur avec CE dessin, numérique, si particulier et bien trop éloigné de tous ces prédécesseurs est un choix trop clivant à mon sens. Certains aiment, d’autres détestent. Et je trouve cela dommage que l’éditeur n’ait pas su en trouver un de renom qui fasse plus consensus. Comme avec Ladronn sur le one-shot
Les armes du metabaron, ce choix m’a semblé dicté par une certaine urgence, mais je ne suis pas dans les coulisses, je me trompe peut-être. Et c’était peut-être finir la saga avec Woods que ne pas la finir du tout...
Woods a été pour moi, comme je l’ai évoqué dans un précédent post, déroutant à la 1ère lecture du tome 7. C’est mieux passé à la seconde et à la troisième, mais c’est surtout lié au fait que le meta-baron est quasiment totalement absent de cet avant dernier tome. C’est dans ce tome 8 avec le retour de Sans Nom que l’adhésion allait se faire ou non et force est de constater que je l’ai trouvé en-dessous. Certaines cases m’ont paru très brouillonnes.
Enfin, la fin reste ouverte. J’aurais préféré une vraie fin avec un parti pris, que le scénariste et l’éditeur sachent s’arrêter. Or, qui dit fin ouverte, dit possible suite. Mais avec ce dernier dessinateur, j’ai trouvé que le désamour sur cette série débuté dès le tome 5 de la Caste pour certains s’était encore accentué. Nous ne sommes plus beaucoup sur ce topic à louer la qualité de cette saga.
J’ai peur que celle-ci trouve une suite dans cette veine numérique, qu’elle devienne la norme, avec ce standard qualitatif bien moindre.
Ça n’entame en rien le plaisir que j’ai eu à lire toute cette saga, mais ce diptyque conclusif me laisse un sentiment doux amer.