Thierry_2 a écrit:le problème de la vidéosurveillance, c'est que c'est un outil qui est, par définition, neutre en soi.
D'accord avec tout le reste de ton post, sauf ta prémisse
Un outil n'est en réalité jamais neutre.
Un épluche légume est pour droitier.
Les systèmes de sécurité routière sont faits à partir de mannequins sur des morphologie masculines.
Tu le dis toi-même l'intelligence artificielle de la VSA est entrainée sur des blancs (avec de très nombreux faux-positifs sur les noirs)
A ce propos j'avais entendu une conférence de Fanny Verrax : très intéressante philosophe qui a travaillé sur l'éthique de l'ingénieur.
Livre dispo ici :
https://docs.eclm.fr/pdf_livre/408Quell ... enieur.pdfExtrait :
Dans la thèse de la neutralité de la technique, la valeur des techniques ne
dépend donc que de leur usage, autrement dit de l’éthique de leurs utilisateurs.
Mais c’est ne pas voir que les techniques embarquent des valeurs en elles-
mêmes, c’est-à-dire qu’elles internalisent et priorisent des choix de société et
promeuvent la diffusion de valeurs sociales considérées comme désirables.
Aussi insignifiants soient-ils, les objets techniques développent des scripts d’action
auxquels les individus doivent se conformer en automatisant leurs interactions
avec l’environnement : un gobelet en plastique incite à jeter. Il promeut la
culture du jetable où percolent les valeurs de la disponibilité immédiate, de la
fonctionnalité sans esthétique et de la banalisation de l’abandon des déchets.
D’autres exemples de notre quotidienneté technique relèvent de la même
logique : le dos-d’âne oblige le conducteur automobile à ralentir. Dans sa matérialité
même, il inscrit l’injonction morale à « ne pas rouler vite ». Cette injonction
peut être le produit d’une concertation collective et transiter par un acte de
langage prolongé dans des panneaux de signalisation du type « Ralentir ! École à
proximité ». Mais le dos-d’âne sera sans doute plus efficace, ce qui signifie que le
médium de l’éthique n’est pas uniquement le langage humain, mais également la
matérialité des objets techniques. Le bus avec alcootest intégré ne peut démarrer
que si le conducteur souffle dans l’alcootest et que celui-ci est négatif ; la ceinture
de sécurité sonne tant que le conducteur ne la porte pas, etc. Les éléments
techniques de notre environnement matériel intègrent des impératifs moraux
et organisent une situation de décision morale. Nos actions morales ne sont
donc pas mises en forme uniquement par nos décisions conscientes, mais interagissent
également avec les technologies qui organisent notre univers matériel.
Pour moi la vidéosurveillance est en plein dans ce schéma là, elle n'est pas neutre dès le départ. Elle présuppose le besoin de surveiller. Et elle agit sur les personnes surveillés en auto-régulateur social, quelque soit l'usage qui est fait des images, comme un panoptique (cf
surveiller et punir de Foucault).