Je ne pense pas que ce soient les meilleures planches du livre qui aient été présentées en preview. Mais au fond peu importe, puisque c'est le fond, qui est assez général, qui est le plus souvent mis en cause dans les interventions que je lis, assez abasourdi, dans les pages de ce topic. Certains ici ont quand même de singulières pudeurs. Et en plus ils découvrent la lune (sans mauvais jeu de mot) (oh et puis si, maintenant que j'y ai pensé, j'assume).
Premièrement, ce
love blog ne tombe pas du ciel directement dans les librairies, telle une brusque révélation fracassante. Comme son nom l'indique, l'essentiel en a déjà été publié sur Internet, au cours des cinq dernières années. Beaucoup semblent avoir une culture BD certes très étendue (plus que la mienne) mais uniquement focalisée sur l'édition papier, je veux dire à peu près, voire totalement, aveugle aux phénomènes récents liés à la bande dessinée en ligne. Je ne pense pas que ce soit le cas de la majorité du lectorat visé par la collection "shampooing" de Delcourt, étant donné le nombre d'auteurs qui y sont publiés qui viennent de, ou officient de façon notable dans, cette sphère-là. Obion, et, dans une moindre mesure, Gally, font partie de ces auteurs qui se sont d'abord fait remarquer sur la toile (et pas seulement, mais notamment, oui, avec ce blog) avant de se voir proposer d'autres projets. Ceci dit non pas pour "lancer" une polémique sur la BD numérique et la BD traditionnelle (il y a des lieux de réflexion ailleurs pour cela), mais pour rappeler que la plupart des lecteurs potentiels de ce
Love blog papier, et à peu près tous les fans d'Obion et Gally,
connaissent déjà, dans les grandes lignes, son contenu.
Deuxièmement : l'absence de "distance fictionnelle". Oh la jolie expression, mais qu'en savez-vous ? Les premières pages reproduites en preview expliquent la genèse du blog, et accessoirement donc du livre, à l'époque où les deux auteurs vivaient une relation à distance (1440 km de distance) :
En guise de mots d'amour, nous on a commencé à s'envoyer des petits dessins par internet, des billets doux illustrés, parfois gnangnans, parfois un peu cochons...
Un jour, on a décidé de les réunir sur un blog. A défaut de vivre sous le même toit, on s'aménageait notre petit chez-nous sur le web: le loveblog.
Il me semble qu'il y a là matière à s'interroger sur la question. Je ne pense clairement pas que tout soit à prendre comme une "reproduction photographique du réel" là-dedans. Je ne pense pas non plus que tout soit purement de l'ordre du pur fantasme, attention. Le plus plausible est que le curseur se balade quelque part entre les deux. Où ça exactement ? Je n'en sais rien, vous non plus, personne à part les deux auteurs en fait, et, en ce qui me concerne, je m'en... euh... moque
(bande de tordus !!).
Enfin, à l'attention de tous les moralisateurs à deux sous qui rôdent dans le coin. Je n'apprécie pas particulièrement les odeurs de pieds ni le poil sous les aisselles, et je n'irai pas raconter sur un blog mes ébats avec ma compagne (réels, fantasmés, ou semi-fantasmés). Les deux auteurs de ce
Love blog ont d'autres idées. Et ils le disent. Dans
leur livre. Qu'on est libre d'aller lire ou pas, d'acheter ou pas, mais franchement, rien qu'avec la couverture, n'allez pas dire que vous (ou votre enfant-de-huit-ans) n'êtes pas un peu prévenu du contenu. Oui, la norme est ailleurs en ce moment : du côté du lisse, de l'aseptisé, sans odeur, sans poil où que ce soit. Il n'en a pas toujours été ainsi (regardez les femmes peintes par Rubens, lisez Casanova qui aimait particulièrement que ces amantes dégagent un parfum de vieux fromage !...), mais c'est la tendance du moment et ça me parait difficilement niable. Ce n'est pas la came d'Obion et Gally et ils nous en avertissent dès les premières pages, c'est ce qu'on appelle un
pacte de lecture. Après, franchement, si l'odeur dégagée par les parties intimes excitées de votre compagne (/compagnon) représentent pour vous un summum en matière de "sexualité différente des autres", là...
Je ressent en tout cas beaucoup plus de "mépris" dans le post de Yaneck (08:29) que dans les planches de la preview. Et un côté beaucoup plus donneur de leçon chez un Zep, qui me met beaucoup plus mal à l'aise que les deux zigotos dont il est question ici. Quant aux grandes déclarations du genre "je ne m'imagine pas rencontrer l'auteur en dédicaces après ce genre de révélations", je pense qu'on atteint là des sommets de grotesque voire d'hypocrisie, mais ce n'est pas grave : au contraire, libérez la place, ça me fera moins de file d'attente quand j'irai me faire dédicacer un
Donjon ou un
Villebrequin.