de Johnny Fletcher » 02/02/2020 16:04
Ne connaissant pas l'existence de ce fil de discussion consacré à l'album de Franck Pé, j'avais publié un avis sur la lumière de Bornéo sur le fil de discussion concernant les one shot de Spirou. Donc pour plus de cohérence, je vais recopier ici ce que j'avais écrit :
Je viens de lire la lumière de Bornéo, le Spirou de Franck Pé et Zidrou.
Fichtre! Quelle réussite que cet album que je découvre après la bataille, 3 ans après sa sortie! Si seulement je m'étais douté du moment de lecture extraordinaire qu'il me ferait passé...
Elles sont rares les bd qui m'ont ému à ce point ces dernières années. J'ai refermé celle-ci à regret car j'en aurais lu volontiers une centaine de pages supplémentaires.
J'ai grandi en lisant le journal de Spirou, de la fin des années 70 au début des années 90. J'ai retrouvé ici tout ce qui avait enchanté mes lectures d'enfance. Franck Pé est pour moi la synthèse de ce style développé par les éditions Dupuis. Son dessin, la composition de ses cases et de ses planches possèdent une force d'évocation hors du commun. Quant au scénario, il a trouvé un point d'équilibre rare entre les différentes émotions. Il se dégage de ce Spirou une grâce étonnante, inattendue pour moi avant d'en entamer la lecture et je m'incline devant le talent qui a été mis en oeuvre ici.
Nom d'une pipe, qu'est-ce qu'il m'a touché ce bouquin!
Je voudrais faire une remarque sur une critique récurrente au sujet de l'histoire des champignons noirs développée en parallèle: certains se plaignent de l'inutilité de cet épisode. Sans vouloir leur manquer de respect, ce n'est pas parce qu'ils n'ont pas compris qu'il n'y a pas de sens à cette partie du récit qui est fondamentalement liée aux autres parties. Les auteurs ne donnent pas d'explications à l'inverse de toutes les mauvaises séries tv qui aiment le faire en mâchant et pré-digérant pour le spectateur ce qu'il y a à comprendre, le rendant finalement paresseux et incapable de se débrouiller sans cette canne. Et c'est toute la force de cet album de nous donner à comprendre par l'entremise des pensées et des réflexions induites par les émotions qu'il sait faire naître.
A sa manière donc, et dans son style, La lumière de Bornéo est un chef d'oeuvre qui parvient à convoquer tout le génie d'un journal et d'une tradition éditoriale pour en restituer l'exceptionnelle saveur.
Un mot pour finir sur l'objet lui même: les éditions Dupuis ont eu l'heureuse idée d'imprimer cet album sur un papier mat, blanc cassé, qui offre un plaisir de lecture décuplé. Le livre est beau, l'impression également, merci aux auteurs et à l'éditeurs qui semblent avoir donné le meilleur d'eux mêmes.