Thometymal a écrit:J'ai survolé les posts qui parlait de Killing joke pour garder mon avis neutre quand je le lirai et également ne pas lire par erreur des bouts de l'histoire.
Tu as bien raison.
Mais comme je dis, tu vas découvrir une histoire formidable.
Thometymal a écrit:Quand je disais Batman n'est pas le sujet, je voulais dire "pas le sujet de ce post".
Ah pardon, j'avais pas compris.
Thometymal a écrit:Je ne sais plus lequel des deux titres suscités j'ai lu mais je n'ai pas réussi à le finir.
Vraiment, je suis étonné, tellement c'est d'une force d'évocation irrésistible !
Thometymal a écrit:Une case sur deux on voit la télé avec la speakerine qui demande "Batman or not Batman?"
Ah tiens !
Bon, "une case sur deux", tu exagères. Mais je vois ce que tu veux dire (et c'est sans doute le premier,
Dark Knight Returns, mais il utilise le procédé, en variant, dans
Dark Knight Strikes Again.
Bon, moi, je suis super client, pour mille et mille raisons. La première, c'est que je trouve que ça donne un autre son de cloche au récit, on n'est pas centré sur le héros, ça permet justement de voir des points de vue qui ne sont pas le sien, et c'est intéressant. La seconde (voir plus bas), c'est aussi que tout le propos de
Dark Knight Returns, c'est de voir comment le retour de Batman influence sur le monde alentours, et notamment la ville et les médias (sans compter les super-vilains, dont le Joker. Et les médias, leur rôle dans le récit, c'est d'être une caisse de résonance qui amplifie les rumeurs, les sentiments, les avis, tout ça… Les médias (et donc les cases en écran télé) constituent un personnage en soi, dans cette série.
Voilà ce que j'en disais ailleurs :
Jimbolaine a écrit:Baltimore a écrit:Baltimore a écrit:Jimbolaine a écrit:Au contraire, je crois que Dark Knight Returns, au-delà de ses qualités propres (qui sont colossales…), est très intéressant parce qu'il présente un Batman en dehors de la continuité (donc, pour reprendre ce que dit Plumo, on peut le lire "sans se prendre la tête à devoir tout acheter") et pose particulièrement bien les enjeux du personnage. Donc vraiment, moi, je le conseillerais. D'autant que, d'une certaine manière, il fonctionne en réponse à Year One.
DKR très très interessant, mais c'est fou ce que j'ai été énervé par la télé
Je l'ai lu il y a assez longtemps, mais j'avais été pas mal échaudé par la présentatrice télé dans son petit écran qui intervenait toutes les 3 cases. Une critique des médias je suppose. J'ai trouvé que ça coupait trop souvent le rythme.
En fait, c'est presque ça qui m'a le plus marqué...même si le fond de l'histoire est génialissime.
Tu parles des cases en écran de télé, comme dans cet exemple ?
http://www.blogcdn.com/www.comicsallian ... dk-185.jpgAh moi, j'ai adoré.
J'aimais déjà bien quand il lançait le processus dans ses derniers
Daredevil, mais j'adore comment il articule tout son récit avec cet outil-là. Et je trouve que ça dynamise énormément, parce que ça impose de glisser des scènes courtes entre chaque "case écran télé", et donc d'imposer un rythme soutenu.
De plus, l'un des axes de
Dark Knight Returns, c'est comment la légende se répand, comment le retour de Batman après dix ans d'absence perturbe et transforme la société tout entière (influence sur les citoyens, sur les gangs, sur Carrie Kelley, sur Gordon…). Et la narration par écrans télé se fait l'écho de ça, montrant les avis pour, les avis contre, les conséquences au quotidien (attaque de boutiques, vigilantisme, récupération politique…). Ça gagne du temps, ça gagne de la place, ça gagne en nervosité. Je suis super fan.
Cependant, j'ai longtemps trouvé ça révolutionnaire. Mais des années plus tard, en lisant les premiers
American Flagg de Howard Chaykin, j'ai découvert que c'est Chaykin qui a généralisé voire systématisé le procédé. C'est lui qui se sert de la télé pour passer de l'information, et pour opérer une véritable critique de l'omniprésence des médias (alors que Miller, me semble-t-il, en tout cas dans
Dark Knight Returns, semble s'intéresser davantage à la fonction de relais et de caisse de résonnance des médias, qu'à leur omniprésence).
Alors Chaykin et Miller se connaissent, ils ont partagé un studio au début des années 1980 (avec Simonson et Starlin…), Lynn Varley a fait les couleurs des premiers
American Flagg avant de faire celles de plein de BD de Miller (et accessoirement de devenir son épouse…), Chaykin dessine Miller dans une histoire courte d'
American Flagg récente… Donc je pense que c'est l'influence des pages d'
American Flagg qui se ressent chez Miller.
Mais Chaykin est un incroyable précurseur : que ce soit sa narration (les différentes voix off, les écrans télé, les ellipses…), les thèmes abordés (la privatisation des forces de l'ordre, la télé réalité, le virtuel, les médias…), l'ambition (choisir les indépendants pour créer une série de politique fiction au moment où Marvel et DC lui déroulaient le tapis rouge…). Le problème pour le lectorat français, c'est que Chaykin est complètement méconnu (parce qu'il n'a pas été traduit beaucoup, et fort peu en albums). Mais
American Flagg!,
Time2,
Blackhawk,
Black Kiss, autant de trucs qui ont montré des pistes pour la suite. C'est un défricheur incroyable. Mais le redécouvrir aujourd'hui, alors que ses contemporains (Miller, Simonson, puis Moore et d'autres) et ses suiveurs (que serait un Mark Millar, qui a clairement lu Chaykin, sans Chaykin ?), c'est rude, parce que ses successeurs sont plus hype. Et pourtant, et pourtant…
Bon, je dévie, mais pour en revenir à la narration en écran télé, je trouve ça génial, moi !
Jimbolaine a écrit:Le Complot a écrit:Oui j'en avais déjà parlé avec Ulys je crois ou bien c'était déjà toi. C'est sympa de vouloir déconsidérer la boîte à images que je n'aime pas particulièrement mais là c'est un peu too much.
C'est un outil narratif puissant et efficace. Ça se marie très bien avec le projet esthétique du
Dark Knight Returns, à savoir un gaufrier de seize cases. Et, comme je le dis plus haut, dans ce premier volume, je ne crois pas que Miller fût motivé par une critique des médias en tant que tel. D'ailleurs, même dans
The Dark Knight Strikes Again, je crois que son intention est davantage de faire le portrait d'une caisse de résonance que d'en faire la critique. Après tout, c'est par la télévision que Batman reconstruit sa légende.
Thometymal a écrit:et le reste du temps c'est Batman qui pense... du coup ça a fini par me gonfler.
C'est marrant, parce que moi, je trouve ça génial, la voix off, surtout utilisée de la manière déstructurée, comme un vrai flux de pensée, manière que Miller a plus ou moins imposée avec
Dark Knight Returns (et qui explose dans
Elektra Assassin, atteignant des niveaux jamais égalés). Vraiment, je trouve ça pertinent, ça passe tellement d'information tout en donnant une vision tellement précise du personnage…
D'une manière générale, je trouve aussi que la voix off traitée de cette manière arrive à une époque (le milieu des années 1980) où elle propose une alternative intéressante à la bulle de pensée. Elle permet de rester en prise avec ce que les critiques (Thierry Smolderen, je crois, je sais plus…) appelaient "la boîte noire des super-héros", leur esprit, sans recourir à une bulle (peut-être un peu artificielle). Ça créait une dynamique assez formidable, un moyen super efficace de passer plein d'info, et un outil pour caractériser les personnages avec une grande vivacité et pertinence. Dans le cas de récit comme
Batman : Year One, ça avait enfin l'avantage d'associer les récits à une ambiance de polar et de roman noir, ça collait parfaitement.
Et je trouvais que Miller s'en sortait avec brio, et même légèreté, il créait des effets formidables (répétitions, phrases courtes et non-verbales…) qui restituaient avec force l'état d'esprit des héros au moment où on les suivait. Je n'ai jamais vu un équivalent aussi efficace (à part DeMatteis, mais il avait commencé à faire des trucs du genre en même temps que Miller, peut-être avant, même…). Personne ne me semble avoir géré la voix off aussi bien.
Pour en revenir au sujet de cette discussion, je te conseille quand même la lecture de
Dark Knight Returns, parce que Miller présente une version vachement intéressante du Joker. Et réfléchit aux liens qui unissent le héros et le vilain au sein de Gotham City. Épisode remarquable, selon moi. Mais bon, toute la série est remarquable.
Jim