Bigwolf a écrit:La Man of Steel Army me tombe dessus
Ce que j'apprécie beaucoup sur le topic comics, c'est comment certains débats permettent de creuser les choses et affinent les lectures et le regard que l'on peut porter sur les runs, cycle, personnages, etc.
Moi, je passe sur les forums pour me détendre, pour casser le rythme au milieu d'un bouquin, d'un scénario ou d'une traduction (ou alors carrément je me barre du bureau pour boire un café, donner la pâté aux chats… mais si je reste au bureau, je vais jeter un œil sur les forums). Et donc, j'arrive avec l'envie de papoter, comme on va au troquet du coin pour serrer la louche à quelqu'un. Et je reviens sur ce que je disais dans un autre sujet, c'est que j'aime partager, j'aime bien expliquer ce que je pense être de bons arguments, j'aime bien aussi qu'on m'explique des choses. Je déteste les arguments genre "wah, tu lis pas Superman, t'as trop tort, parce que Superman, c'est trop bien". Le mec, s'il aime pas Superman, ça va le braquer encore plus. En revanche, si je prends le temps d'expliquer pourquoi moi j'aime (en dépassant un peu le stade du "tu vois, la cape rouge, c'est trop la classe"), ou quel est le contexte de création, ou quel est le sujet derrière la baston ou whatever blablabla, assez souvent, le mec en face, il écoute. Et ça, c'est cool. Parce que même s'il est pas d'accord (et même si j'ai tort, et ça m'arrive souvent), paf, il va peut-être remettre le nez dans le bouquin. Et moi aussi, d'ailleurs, par la même occasion.
Bigwolf a écrit:Et en trois post de Magic Uncle Hermes et Super-Jim, me montrent des facettes du Grand Bleu que, pas forcément, j'appréhendais.
C'est un peu l'idée : comme je le disais pour
Top Ten, on n'a pas toujours les clés d'une lecture, ou on n'a pas toujours lu dans les meilleures conditions. Et quand un gars s'amène en prenant le temps d'expliquer, en général, c'est cool.
Là, pareil, je connais bien le personnage (pas sur le bout des doigts, mais bien quand même…) et je peux citer des choses intéressantes, qui donneront peut-être des envies de lecture.
Bigwolf a écrit:Certes, j'ai plus une culture chauve-souris mais je m'entête à m'éduquer sur Superman. j'ai surtout une culture Marvel (mais on fera le débat Marvel-DC, une autre fois
)
Moi aussi, j'ai une culture Marvel : élevé à
Strange. J'ai toujours préféré les héros Marvel. Mais bon, Superman, Flash et Green Lantern ont une certaine place dans mon panthéon personnel. Et depuis quinze vingt ans, je lis plus de DC, j'essaie de rattraper les retards de culture.
Bigwolf a écrit:Pour Jim, j'aime beaucoup ton argumentaire sur Clark qui revient chez lui.
Ouais, c'est le truc que j'aimais bien dans le Superman "post-
Crisis" (1986-2010, grosso modo) : ses deux parents sont vivants, et constituent l'ancre humaine (et humaniste, aussi…) du personnage. Et ça le rend tellement crédible, d'un coup. Parce que ce personnage capable littéralement de déplacer des montagnes, il avait, dans la série, des personnages secondaires à qui il pouvait réellement se confier. Même quand il a avoué son identité à Lois, même quand il s'est marié, il avait encore cette sorte de "jardin secret" au Kansas, et ça, c'était fort, j'aimais beaucoup. Ça comblait le fanboy en moi qui se souvenait de la scène de la mort de Pa Kent dans le film de Donner (merveilleux Glenn Ford), et qui s'était toujours demandé ce qu'il serait advenu de Clark si Pa était encore vivant.
Oncle Hermes a écrit:Jimbolaine a écrit:J'ai remarqué que souvent, par "complexe", les gens voulaient dire "tourmenté". Et s'ensuit un glissement vers la névrose et l'obsession. Ce qui peut tourner à la simplicité, justement, parce que Batman se définit alors comme un nostalgique mortifère centré sur la soirée terrible de la perte de ses parents.
Et les gens semblent bien aimer cette dimension que je trouve pour ma part monolithique. Batman ne m'intéresse jamais autant que quand il crée des trucs. Batman Incorporated, avec Morrison, c'était intéressant. Mais dans les années 1970, quand il crée une fondation ("Victims Inc", je crois) dont le but est d'aider les victimes d'agression, ça, c'est génial, on voit que le mec utilise son traumatisme pour en faire quelque chose, et là, pour le coup, ça me semble "complexe".
Après, "complexe", c'est quoi ?
Dans le Man of Steel de Byrne, quand il revient à Smallville après sa première mission et qu'il explique ses tourments à son père, c'est pas complexe ? Et dans "Our World at War", quand il est face à l'invasion, que Smallville est ravagée, que ses parents sont portés disparus, qu'il est sur le point de céder à la rage mais qu'il se retient, c'est pas complexe ?
J'évoquais l'impression première, l'évidence apparente, domaine qui n'est pas loin de l'idée reçue...
Donc oui, c'est une vision critiquable et que tu as super bien critiquée d'ailleurs.
C'était surtout une remarque à la cantonade : j'aimerais que des choses comme "
Our World at War" ou "
Ending Battle" soient traduites (et bien entendu "
The Wedding"). Parce que c'est des choses qui, l'air de rien, ont une dimension politique intéressante, en plus de pousser le personnage dans ses retranchements, de l'attaquer dans ses convictions (la famille, la maison, le mariage…). Et je continue à penser (ai-je tort ?) que si les gens avaient la chance de lire plus de Superman, ils pourraient sans doute en saisir l'intérêt et le charme plus aisément.
Oncle Hermes a écrit:Mon propos, c'était que j'ai l'impression qu'on est beaucoup d'ex-gosses sur le forum à avoir kiffé Batman assez tôt, alors qu'hormis toi, on croise assez peu par ici d'ex-fans de Superman en culottes courtes. Alors que l'image communément véhiculée est celle de Batman comme héros plus "adulte". Mais c'est peut-être lié aux conditions de traduction en France que tu soulignes par ailleurs.
À bien y réfléchir, vers 1986, Sagédition s'arrête, et personne ne reprend. On reste sur quelle image, en France ? Celle des récits one-shots de Cary Bates, à chute et à truc, dessinées par Curt Swan (de manière raffinée, académique et élégante, mais pas très électrisante). Alors qu'en face, on avait Batman dessiné par Don Newton ou Gene Colan, enquêtant sur des prises d'otage, des enlèvements, des sabotages, avec le Joker ou le Pingouin qui tendent des pièges, et quelques histoires d'amour (Catwoman, Vicky Vale qui revient…).
Puis, en gros, plus rien, sauf le
Dark Knight de Miller, quelques albums de Batman chez Glénat par Fershid Bharusha, suivi de quelques rares productions kiosques chez Semic ou sous un petit label de Fershid… Pas grand-chose, mais au moins, Batman continue à se maintenir. Superman, à part le
Bon Anniversaire de Moore et Gibbons (formidable histoire qui aurait pu relancer le perso), la biographie de Lex Luthor par James Hudnall et le World's Finest de Gibbons et Rude, je crois qu'il n'y a rien, il faut attendre le début des années 2000 pour que Semic se lance dans la mêlée et que Soleil fasse les tabloïds d'Alex Ross.
Ces quinze ans, en gros, ils disent quoi, aux lecteurs de passage ? Il dit "
Batman combat des méchants la nuit, et Superman, c'est des histoires ringardes dessinées par Curt Swan".
Du coup, Superman est oublié. Pire : mésestimé.
Inversons le raisonnement, imaginons que quelqu'un ait repris la licence. À la Lug, avec des mensuels, des "Récits Complets DC", des "Top BD DC", ce genre de choses. On aurait eu quoi ? On aurait pu avoir l'
Annual de Moore en Récits Complets, on aurait eu le
Man of Steel de Byrne en reliure, on aurait eu le reboot par Byrne, Wolfman et Ordway dans un mensuel, et dès 1987, mettons, on aurait vu Superman en grande forme, avec un bon dessin (je préfère le Byrne des
X-Men, mais là, il est encore très bon) et de bons scénarios (je parlais plus haut, je crois, de Cat Grant et Maggie Sawyer : hé bien il y a des trucs formidables, je lis les TPB
Man of Steel en VO, et je trouve ça franchement très bon).
Ce genre de situation aurait permis d'avoir une présence régulière du personnage dans le paysage (et ça aide pour conquérir un public) et de présenter des récits vraiment prenants, et très quali.
Au lieu de cela, on a une absence totale, qui a suivi une période assez somnolente (et très mal éditée en France). Ça n'aide pas.
(je dis ça pas pour toi, hein, mais pour tous ceux qui ont la patience de me lire…)
Oncle Hermes a écrit:Ceci dit, puisqu'on en est à dire "d'où on vient", moi, j'ai connu Batman bien avant les autres super-héros, par la série animée de Paul Dini et Bruce Trimm principalement. Puis les films de Burton (et les horreurs de Schumacher, aussi). Et seulement des années plus tard : les comics. Mais à la même époque que la série animée Batman, il y avait "Superman l'ange de Métropolis", des mêmes producteurs, sauf que je n'avais pas du tout accroché.
Ah j'ai adoré : je retrouvais l'élan du film de Donner, et le charme des vieux Fleisher (que je connaissais pour avoir chopé une VHS dans une solderie quelques années avant…). J'adorais cette modernisation lumineuse et rusée.
Oncle Hermes a écrit:De trois : "facile à écrire" n'était pas forcément un compliment supposé montrer la supériorité intrinsèque et ontologique de Batman ou un truc du genre.
Et surtout le "difficile à écrire" implicite concernant Superman n'est pas du tout une critique. Au contraire, il faut être très bon pour arriver à tirer le meilleur du personnage. Parce que si on ne s'intéresse qu'au côté exploit / challenge / suspense, bah, dans l'absolu, y a pas grand chose qui peut résister à Superman plus de quelques minutes. Et par ailleurs, c'est quand même un personnage qui est toujours, fondamentalement, sans nuance, du côté du Bien, ce qui réduit un peu les possibilités scénaristiques. Je vais schématiser à outrance, mais alors que pour Batman, on prend une histoire de polar tout à fait classique, on rajoute le facteur de la double identité, et roule ma poule, on a un épisode qui peut très bien tenir la route ; pour Superman, si tu t'en tiens au minimum syndical (oh, un méchant : baffffe, plus de méchant), ça fait flop... Donc il faut creuser pour en tirer des grandes choses, mais heureusement, il y a tout d'auteurs qui y sont formidablement arrivés.
Je pense tout pareil.
C'est pour cela que j'aime beaucoup la période Mike Carlin (grosso modo, 1988-2000). Y a tout : du drame, de l'action, du grand spectacle, du sentiment, de l'humour (ah purée, que je trouve que ça manque, ça, l'humour, chez les super-héros). Le court
run Superman Blue / Superman Red, avec les deux versions qui courent dans les couloirs en chassé-croisé, comme dans un vaudeville, j'adore, on sent que les auteurs s'amuse, j'aimerais bien pouvoir compléter cette période…
Après, avec Eddie Berganza, c'est un peu plus nostalgie, et un peu plus politique, mais y a des choses super. Et effectivement, "
Luthor Président", c'est quand même très fort.
Mais y a plein de trucs que j'ai pas lus, ou alors de manière parcellaire. Les épisodes de Joe Kelly, je les connais super mal, faudrait que je les lise en détail, tout le délire autour des Timesmith, je connais que de nom, ça a l'air costaud.
Jim