Auteur BD: ne vaut-il pas mieux avoir un autre métier?...

[D H T]

Je pose une question simple: vu la crise économique en général et la crise de l'édition en particulier, ne vaut-il pas mieux, si on est vraiment artiste dans l'âme, avoir un autre métier à côté (par réalisme) et consacrer son temps libre à la BD (par passion)? N'est-ce pas la meilleure manière de rester authentique dans son art, si tel est vraiment le but recherché?

Personnellement j'en suis persuadé. Plus je vois le monde évoluer, plus je vois les auteurs professionnels comme des gens qui ont vendu leur âme au diable (même s'il existe heureusement des exceptions dans l'édition professionnelle, des réussites tant sur le plan artistique que sur le plan économique). Et vous, qu'en pensez-vous?

[zourbi le grec]

L'idéal, si l'on ne fait pas parti des stars bankable de la bd, est d'avoir un métier pour le bifteck et de faire de la bd pour le plaisir. Cela implique d'avoir un métier pas trop prenant car être un bon dessinateur demande beaucoup de travail

[D H T]

L'idéal, si l'on ne fait pas parti des stars bankable de la bd, est d'avoir un métier pour le bifteck et de faire de la bd pour le plaisir. Cela implique d'avoir un métier pas trop prenant car être un bon dessinateur demande beaucoup de travail

D'expérience je dis que c'est tout à fait faisable, même avec un métier prenant mais il faut être motivé:
- 8 heure de taf quotidien;
- 6 heures de dessin/écriture et activités connexes (recherches de doc, web, culture générale...);
- 2 heures pour le reste (repas, douche, courses, ménage);
- 8 heures de sommeil.
Mais cette organisation implique également d'aimer la solitude...

Par contre, ceux qui ont une vie de famille et plein de potes, je vous dis d'avance: laissez tomber, ce n'est vraiment pas fait pour vous...

[zourbi le grec]

Il y a aussi certains auteurs qui font des séries commerciales ou de la pub pour bouffer et des choses plus exigeantes à côté.
C'est surement moins galère que d'avoir un job de 8h/jour en plus mais cela oblige à faire des concessions

[sainfoins]

Cette question n'est pas seulement valable pour les auteurs de BD, mais pour les artistes en général. Je sais de quoi je parle. La crise touche tout le monde. Manger et payer son loyer essentiellement en vivant de sa passion est extrêmement difficile, voire impossible pour de nombreuses personnes dont je fais partie.

[sainfoins]

C'est clair que le gars il a intérêt de se ménager au travail.

[D H T]

C'est clair que le gars il a intérêt de se ménager au travail.

Non, pour un vrai bosseur ça ne pose aucun problème. Il faut avoir une volonté et un moral d'acier. Le jour où la France deviendra enfin une culture du travail, ce que je lui souhaite pour son bien, cet état de fait sera plus facile à comprendre et à admettre dans ce pays.

Tu penses vraiment qu'après un 8 heures de taf, un dessinateur a toute la concentration et l'énergie pour se taper un 6 heures de dessins?

J'en suis la preuve vivante. Un mode de vie très sain en est le secret: pas d'alcool, pas de drogue, pas de tabac, des fruits, des sucres lents, des litres d'eau par jour, un peu d'exercice... Et un peu de Redbull de temps en temps, avec modération.

[sainfoins]

Je crois que tout dépend du taf que tu exerces. Y a certaines professions, après une grosse journée de 8 heures, tu ne penses qu'à une seule chose : te reposer. Personnellement, il n'y a que le week end ou pendant les vacances que j'ai le temps de m'adonner à ma passion. En semaine, ce n'est pas la peine, je suis trop claqué (et pourtant je ne bois pas et ne fume pas non plus).

[D H T]

Je crois que tout dépend du taf que tu exerces. Y a certaines professions, après une grosse journée de 8 heures, tu ne penses qu'à une seule chose : te reposer.

Il est vrai que je ne travaille pas à l'usine, c'est plutôt un travail de bureau...

[D H T]

:nononon: Très mauvais le Redbull, même avec modération.

Il paraît... Mais parfois ça fait du bien.

... et pas de vie sociale!

Tout à fait.

[sainfoins]

Je trouve le sondage bizarrement formulé car on sait que la meilleure solution pour tout auteur serait de passer professionnel, non? et c'est seulement s'il n'y arrive pas qu'il exercera un autre métier à côté. Je ne comprends pas trop l'intérêt du sondage. Désolé.

[D H T]

Je trouve le sondage bizarrement formulé car on sait que la meilleure solution pour tout auteur serait de passer professionnel, non? et c'est seulement s'il n'y arrive pas qu'il exercera un autre métier à côté. Je ne comprends pas trop l'intérêt du sondage. Désolé.

Ta réaction est compréhensible mais le contraire l'est tout autant: c'est tributaire de la sensibilité de chacun. On peut ne jamais essayer de se faire éditer et choisir dès le départ un autre métier par nécessité, tellement l'aversion est grande vis à vis du monde de l'édition, que n'importe quel autre métier en comparaison semble plus souhaitable à partir du moment où il ne touche pas à l'art - au double sens de "concerner" mais aussi de "corrompre".

Si on est persuadé que les éditeurs sont des gens foncièrement mauvais et infréquentables de par le rôle illégitime qu'ils s'attribuent dans la production et de par le chantage implicite qu'ils imposent aux auteurs du fait des rapports de pouvoir; si les éditeurs, de ce fait, ne nous inspirent que du dégoût et du mépris, voire même une certaine violence (morale, mais quand même), le choix est vite fait... Quelqu'un disait: "J'aime trop l'art pour en faire un métier".

[D H T]

Il y a aussi certains auteurs qui font des séries commerciales ou de la pub pour bouffer et des choses plus exigeantes à côté.
C'est surement moins galère que d'avoir un job de 8h/jour en plus mais cela oblige à faire des concessions

Voilà, à mon sens, un très bon résumé de la situation...

[zourbi le grec]

Si on est persuadé que les éditeurs sont des gens foncièrement mauvais et infréquentables de par le rôle illégitime qu'ils s'attribuent dans la production et de par le chantage implicite qu'ils imposent aux auteurs du fait des rapports de pouvoir; si les éditeurs, de ce fait, ne nous inspirent que du dégoût et du mépris, voire même une certaine violence (morale, mais quand même), le choix est vite fait... Quelqu'un disait: "J'aime trop l'art pour en faire un métier".

Je ne pense pas que les éditeurs soient responsables. C'est plutôt notre société d'hyper consommation qui transforme tout en produit et même le dernier espace de liberté et de résistance de l'homme, à savoir l'art. Et donc les éditeurs gestionnaires remplacent tout naturellement les éditeurs connaisseurs mais ils sont plus une résultante qu'une cause. Et la mort lente des auteurs "intègres" en est un dommage collatéral
La disparition progressive de l'art au profit du produit artistique est à mon avis, le phénomène le plus dramatique car je ne pense pas qu'il y ait d'humanité (au sens noble du terme) possible sans l'art.

[Metal.Hurlant]

C'est comme tout métier hors "contexte", dessinateur,acteur,musicien, chanteur, sportif etc il y en a 1 qui réussit pour 500 qui se casse la gueule.

[silversurfer]

Je trouve la question bizarre. Déjà, j'imagine que... ca dépend. Il y a sûrement des auteurs qui sont plus à l'aise en se consacrant le plus possible à leur art, d'autres auxquels un autre métier apporte la sérénité financière dont ils ont besoin. Enfin comme dit plus haut, les métiers qui le permettent tout en laissant le temps de faire la BD sont sûrement rares.

Mais peu importe en fait, même de manière purement virtuelle je trouve étrange de juger des choix qui sont quand même très personnels. Et l'histoire de "vendre son âme au diable" me parait bien excessive. Je ne sais pas ce que tu mets derrière, DHT, mais quoi qu'il en soit j'ai l'impression qu'un paquet de BD que j'adore qui ont été publiées par des éditeurs mainstreams sont le résultat d'une telle "vente d'âme", et franchement je suis bien content qu'elle ait eu lieu...

[D H T]

Les éditeurs sont décideurs donc ils sont dans le devoir d'assumer leur responsabilité dans les décisions éditoriales qu'ils prennent. Si de bonnes BD ont été publiées par leur biais, c'est le talent des auteurs qu'il convient de saluer car c'est eux, et seulement eux les auteurs, qui produisent l'oeuvre. On s'en fout que Lucky Luke soit passé de Dargaud à Lucky Productions, ou que certaines séries Semic ont été récupérées par Panini. Tout ce qui compte, ce sont les albums. Et si un auteur, un jour, a les moyens de devenir son propre éditeur, c'est encore mieux pour lui.

Pensez qu'un auteur pro est "grillé" s'il vérifie la comptabilité liée à la vente de ses albums, droit pourtant légitime, voilà qui en dit long sur la sale mentalité des éditeurs et sur leurs abus de pouvoir. En attendant, la question se maintient et peut également se traduire par: vous êtes prêts à bosser avec ces enfoirés d'éditeurs de merde (ceux qui méritent d'être appelés ainsi se reconnaîtront), ou vous préférez avoir un autre métier et faire votre art comme bon vous semble? C'est une formulation de la question qui a le mérite d'être claire. Si comme moi vous maudissez les éditeurs en général sur dix générations, on peut contester ce point de vue et sa formulation radicale qui n'engage que moi, mais le constat demeure implacable: c'est un choix sans appel.

[Martin Juneau]

En tant que dessinateur BD et ayant un vrai métier, ce sondage me revient beaucoup. Je crois qu'il vaut mieux faire de la BD et vivre de son art plutôt que d'être un produit de la masse. Je connais beaucoup de gens qui s'embarquent là-dedans sans s'en rendre compte.

[Cableguy]

Un auteur pro est "grillé" s'il vérifie la comptabilité liée à la vente de ses albums ??

Ah bon, et tu fais quoi alors, tu te laisses voler ou spolier ? Le déculottage total, quoi !
Alors, non, un auteur vu à Dardilly m'a confié ne pas avoir été payé UN an complet, pas de droits, car il était en conflit sur ses droits d'auteurs, pas d'argent pour lui et sa famille, un an complet sans un seul centimes et tu penses que le gars va laisser faire de peur d'être grillé Ou vite coller le malfaisant au tribunal

Sinon, j'ai un exemple, d'un ex collègue et partenaires de pub pour les GSA/GSB qui a voulu revenir à la BD après 20 ans d'absence, un retour aux sources en quelques sortes
il s'est retrouvé à concocter péniblement sur ordre un de ces albums sur les métiers ou les corporations, genre les plombiers ou les électriciens, alors qu'il projetait un truc de sci-fi
Un rapide calcul, ( vu qu'on lui payait 200 roros la planche terminée avec scénar et couleur ) a démontré qu'il palpait environ 2,5 euros de l'heure, car il lui fallair une grosse semaine longue par planche soit le 1/4
des revenus de sa propre femme de ménage L'éditeur en a balancé QUE 2800 ex sur le marché saturé, et les 2/3 sont vite revenus en retour

Je vous laisse deviner ce qu'a fait ce collègue, il a vite tout envoyé promener, et maintenant il retape des appartements ce qui lui permet à nouveaux de vivre décemment sans banquiers au phone chaque jour

Son temps libre il le consacre à la peinture, la BD c'est fini pour lui, car il le dit lui même, déjà en 1990, c'était louche, mais 20 ans plus tard c'est devenu encore pire, alors, courage, fuyons

Sinon pour en revenir au débat, vu la suprod, les nouveautés qui restent très peu de temps en librairie, leur faibles mises en place, les avances sur droits qui fondent comme neige au soleil, faut un métier en parrallèle, sinon faut avoir une femme qui bosse et gagne bien sa vie, et pas de gamins à élever

[sainfoins]

L'exemple que tu donnes Cableguy est tout à fait représentatif de ce que vivent beaucoup de personnes qui essaient de vivre de leur art. Je me suis parfaitement reconnu dans cet exemple.