de Moody » 02/02/2020 20:34
Message précédent :
J'en profite pour rappeler qu'un long métrage d'animation adaptant l'univers est disponible sur Netflix et à la vente.
Blame ! (Long métrage d'animation - Netflix)
Une fois de plus, le manga culte de Nihei est porté à l'écran. En un film cette fois, l"univers sombre et froid d'une société post-apocalyptique trouve donc des couleurs et des sons. Autant l'adaptation de Knights of Sidonia sublimait presque l'oeuvre originelle, autant ici, si les 105 minutes sont plaisantes à suivre, on perd la saveur de ce qui a fait l'empreinte même de l'ancien architecte dans le monde du 9ème Art.
Ainsi, les grands espaces ne donnent plus autant le vertige. Pire, le silence qu'impose le format papier et qui renforçait alors la solitude dans laquelle baigne des personnages (qui errent plus qu'ils ne vivent) est dérangé par une bande son certes efficace mais qui par son existence même gêne le vide ambiant qui mettait mal à l'aise. Trop de vie, trop de musique, trop de confort pour le spectateur dans cette intrigue plutôt que le délicieux malaise procuré dès le tome 1. Et ce même à travers le développement de l'histoire, qui, si elle propose une synthèse habile des thématiques et enjeux d'une saga en plusieurs volumes, s'avère bien trop bavarde et explicative. Même la réalisation réduit l'éloignement nécessaire que l'on doit avoir avec les lieux pour apprécier leur démesure, se complaisant trop souvent dans le choix de gros plans qui minimise l'impact des espaces environnants.
Dommage que ce pourtant bon film d'animation fasse le choix d'assister le spectateur plutôt que le perdre, de centrer l'action plutôt que de lui donner du recul. Deux éléments primordiaux qui définirent le mangaka dès le début de sa carrière avec ce sommet du genre, même si ses dernières productions tendent par lui-même déjà dans cette direction (Knight of Sidonia, plus "accessible" par exemple). C'est oublier comme il était délicieusement déconcertant de changer autant de référentiel de lecture à l'époque en achetant cette bande dessinée : une histoire qui économise les mots pour mieux s'exprimer par le dessin, une hallucinante sensation de se sentir tout petit face à des pages au contenu vertigineux de structures et bâtiments entre nos mains.
Killy, héros solitaire et quasi-mutique d'antan n'a pour autant pas à rougir de ce passage à l'écran, son émetteur de positron laissant de nouveau bouche bée à chaque apparition. Pour un projet casse-gueule (moins qu'un film live, qui serait catastrophique), le défi a quand même été relevé de façon convaincante dans ce qu'il a d'autre à proposer : une intrigue agréable à suivre et des protagonistes secondaires suffisamment bien développés (ni trop, ni pas assez).
A. FOGLI, ancien critique de manga pour BDGest.com