Mouiche...
Il serait très facile de trouver des romans de l'âge d'or de la SF comportant un mélange SF + Histoire. C'était un thème assez banal, finalement... Surtout avec le fantasme de l'ATLANTIDE (Antiquité + space opera) !
Non, pour moi, c'est bien plus simple et bien plus basique :
THORGAL a commencé comme de la pure Héroïc-Fantasy (Van Hamme aime à rappeler que le père d'Aaricia s'appelle GANDALF-LE-FOU en hommage au Gandalf de Tolkien que très peu de monde connaissait dans les années 70).
A la fin du premier album, "Slive la socière" rejoint son "drakkar de glace", sans voile.
Or, désirant retrouver Slive dans l'histoire suivante, JVH aura simplement imaginé que le drakkar ne serait pas "magique" mais "motorisé" par du charbon que... que... qu'un peuple saurait utiliser dès cette époque... un peuple très avancé technologiquement, donc...
Ah mais ouiiiii ! Et s'il s'agissait des Atlantes ? On les a cru vivre en Grèce, dans l'île de Santorin, dans le Sahara (films) ou même "au-delà des colonnes d'Hercules", peut-être les Canaries... ou carrément les Amériques (cf le cycle de Qâ) ! Pourquoi pas près des pôles, après tout (on se rapproche des territoires Vicking, ainsi) ? Et puisque la légende provient de Grèce, on verrait très bien un personnage portant à la fois des attributs hellènes (casque à franges) et vickings (cornes) !
Oui, c'est un bon plan, ça ! Donc Slive est une Atlante et Thorgal lui doit une année de vie. Elle va le ramener à elle, dans son territoire de SF. Une ville engloutie comme dans les films ? Ma foi... carrément un vaisseau spacial, à y être... Et échoué, tiens ! C'est pas mal, ça ! Prisonnier des glaces, lui aussi ! Ils ne pourront plus jamais redécoller et seront donc coincés sur Terre. Et Slive... hé bien Slive est la reine de l'Atlantide (la célèbre Antinéa des films de 1921 et 1932) ! Mais une reine catastrophée par sa situation désespérée : son peuple, sa science, son génie va disparaître. Et puis tiens, on accélère un peu la chose : tout le monde est mort !... Tout le monde sauf Slive et... et sa fille ! On mêle un peu d'Atlantide et un peu d'Amazones, comme ça.
Mais quel rapport avec Thorgal dans tout ça ? Ce batard rejeté par son propre roi... un "scalde" inconnu que l'on dit "Fils d'Aegir" ou "Fils des orages dont il peut avoir la colère et le tumulte" (planche 5 du tout premier album)...
Ah mais attends ! On ne sait pas d'où il vient en fait ! Il était vaguement prévu de l'apparenter à un dieu (Thor, Aegir), mais pourquoi ne pas en faire un homme de l'espace ??? Il viendrait donc lui aussi du peuple Atlante... heu... perdu au moment de l'atterrissage, par exemple ! Une sorte de "Moïse vicking" sauvé des eaux...
Et Slive aurait besoin de lui et de personne d'autre parce que... parce qu'ils sont les derniers ! Oui : il est le dernier Atlante de sexe masculin ! Le dernier espoir de cette race presque disparue ! Ainsi,n on en fait quand même une sorte de demi-dieu, comme prévu, mais un demi-dieu bien plus original que d'habitude. Evidemment, ce beau projet va se casser la g... , pour faire plus tragique, et Thorgal restera le DERNIER "enfant des étoiles" ! Un être unique, sur Terre qui aura un destin exceptionnel, entre HF et SF !
Voilà ! Pour moi, c'est aussi bête que ça : de simples rapprochements logiques et historiques qui forment l'essence de la Création. Rien n'était prévu, pour cette petite série imaginée "sur le pouce", sans aucun plan de carrière, sans aucune ambition particulière, et pour laquelle on pouvait s'amuser à y ajouter tous les ingrédients que l'on veut, juste pour le fun, parce que cette série n'est qu'un jeu... Et elle le restera tout le long des trentes albums : un "alibi" à des délires variés qui s'entremêlent joyeusement en un ensemble le plus cohérent possible. La seule contrainte : placer le héros dans des situations extrêmes, de pire en pire, pour donner de grands coups au coeurs aux lecteurs. Car c'est ça qui marche avant tout, avant même le thème que l'on traite (comme l'ont parfaitement compris les mangas).
Un tel succès n'était donc pas prévu... ni même l'alternance entre HF, SF et Histoire, d'ailleurs ! Et au bout d'un moment, son auteur s'est fatigué de toute cette inconstance, de ces alibis ridicules dans lesquels il fallait placer son héros. Il avait changé : il était bien plus porté à raconter le Monde Contemporain et l'Héroïc Fantasy qui l'avait subjuguée dans sa jeunesse ne l'intéressait plus...
Et JOLAN est né [:sly:2] ...