de vilcoyote » 01/06/2008 09:25
France 5 rediffuse les documentaires consacrés à Edgar Pierre Jacobs et à Cabu.
EDGAR P. JACOBS - BLAKE OU MORTIMER ?
Qui est le père de Blake et Mortimer ? Pour le savoir, ce film enquête sur la carrière d'Edgar P. Jacobs. L'homme est mystérieux, mais les confidences de proches et de spécialistes vont révéler ses sources d'inspiration, son processus de création et ses relations avec Hergé.
Parbleu ! Ce documentaire en apprend plus sur Edgar Pierre Jacobs et son oeuvre qu'une minutieuse lecture de ses neuf albums ! Quel régal d'écouter les interviews de ce mentor de la BD belge, de fouiller les cartons de son grenier ou d'entendre les indiscrétions de sa bonne !
Né en 1904, Jacobs ne se destine pas au neuvième art. Il entame même une carrière de baryton à l'Opéra de Lille, interrompue par la Seconde Guerre mondiale. Plein de ressources, il quitte aisément les planches des salles de spectacle pour celles du dessin.
d'abord illustrateur de catalogues, il intègre en 1942 le magazine de bande dessinée Bravo !, où il doit reprendre l'univers de la BD Flash Gordon. Le plagiat n'est pas loin, néanmoins Jacobs accepte ce travail qui lui évite la déportation vers l'Allemagne nazie.
Peu après, il crée sa première oeuvre, Le Rayon U, et impose son : un coup de crayon qui fait la part belle aux scènes théâtrales et une utilisation géniale de la couleur. Un tel talent ne passe pas inaperçu et Hergé l'engage pour colorier les albums de Tintin.
En 1946, Blake et Mortimer voient le jour dans le journal Tintin. "Le Secret de l'Espadon suscite un vif engouement, se souvient Raymond Leblanc, éditeur du journal. Hergé en est jaloux et cesse de collaborer avec lui en 1947." Qu'importe. Jacobs a 42 ans et il accède enfin à la gloire.
Du Secret de l'Espadon (1946) aux Trois Formules du professeur Sato (1977) en passant par La Marque jaune (1956), ses deux héros vivront... huit aventures ! On est loin des vingt-trois épisodes de Tintin, mais ces scénarios hallucinants où cohabitent science-fiction et ésotérisme suffisent à marquer les esprits.
En quelques centaines de pages, le physicien Philip Mortimer et le capitaine Francis Blake combattent ainsi un despote en pleine troisième guerre mondiale, décryptent le secret de l'Atlantide et sont même projetés dans le futur ! A chaque fois, cette idée originale : mettre ses héros aux prises avec le même adversaire, le colonel Olrik.
Reste à savoir qui a inspiré le trio. Témoignages et photographies à l'appui, le film démontre que Blake et Mortimer sont en fait les doubles de papier de Jacques Van Melkebeke et Jacques Laudy, les deux collaborateurs et amis de l'auteur. Quant au détestable Olrik, il s'agirait... du premier époux de Mme Jacobs. Damned !
De nombreux intervenants
L'ancien ministre français des Affaires étrangères Hubert Védrine ; le criminologue Alain Bauer ; Philippe Biermé, président de la Fondation Jacobs ; François Rivière, biographe d'E. P. Jacobs ; Benoît Peeters, biographe d'Hergé; Raymond Leblanc, éditeur du journal Tintin, Didier Pasamonik, journaliste et éditeur ; les auteurs et dessinateurs Jacques Martin, François Schuiten et Ted Benoît. Gaël Nivollet
Première diffusion : janvier 2006. Rediffusion jeudi 5 juin 2008 à 21:46 sur France 5.
Durée : 52'
Auteur et réalisateur : Francis Gillery
CABU, POLITIQUEMENT INCORRECT !
A l'occasion de l'exposition que la Mairie de Paris consacre à Cabu, ce documentaire suit page à page la vie du dessinateur et esquisse un portrait haut en couleur de ce caricaturiste engagé.
Si l'on vous dit : "dessinateur à la coupe au bol rétro", nul besoin de vous faire un dessin pour reconnaître Cabu. En effet, ce caricaturiste à la plume trempée dans le vitriol jouit d'une reconnaissance méritée en tant que croqueur de têtes sans concession. Armée, Eglise, politiques, sportifs... tous sont passés à la moulinette d'une caricature incisive.
De Hara-Kiri au Canard enchaîné, de Charlie Hebdo à Pilote, depuis cinquante ans, c'est un vrai jeu de massacre ! Si tout le monde peut se vanter de connaître ses dessins, sait-on qui se cache derrière cet éternel adolescent binoclard à l'air malicieux ? Réponse avec ce documentaire qui confronte Cabu à son travail, ses sujets de prédilection ou de révolte.
Il se fait tour à tour pudique sur son enfance, irrévérencieux et critique sur la société et le monde politique, et idéaliste sur l'écologie. Mais derrière le caricaturiste qui est "contre", il y a aussi l'homme qui aime Charles Trenet et le jazz.
Aux antipodes de l'hommage pompeux, l'originalité de ce film réside dans sa mise en scène. Soit un dialogue qui se noue entre Cabu et son personnage fétiche : le Grand Duduche, lycéen lymphatique - inspiré de ses propres souvenirs d'étudiant. Ce grand mou prend ainsi vie grâce à la voix d'Antoine de Caunes, volontiers impertinent et moqueur, et commente sans tabou les années qui défilent page à page.
Plus proche de Tintin reporter que du dessinateur cloîtré chez lui, "en pantoufles avec son chat", Cabu est un vrai journaliste de terrain. On l'accompagne depuis sa capitale chérie, devant l'Elysée, où il croque l'arrivée des députés tout juste "sortis du musée Grévin", jusqu'à Lourdes où il suit le pape.
Enfin, pour parachever son portrait, nombre de ses pairs (Cavanna, Gotlib, Wolinski...) interviennent tout au long du film. Ainsi, au-delà de la simple biographie, c'est bien le métier de dessinateur de presse qui est esquissé. Soit "chercher la grimace en chacun de nous et en faire un instantané", comme Cabu le définit lui-même. Avec deux qualités indissociables - l'humour et la méchanceté - indispensables pour se distancier du monde.
C'est donc avec un humour mordant que Cabu s'attaque aux thèmes qui le révoltent par ce qu'ils révèlent de bêtise ou d'intolérance. On débute ainsi par son combat contre l'armée. Sorti très affecté de la guerre d'Algérie, il mitraille la génération des généraux Massu et Bigeard, avec notamment son personnage de l'Adjudant Kronenbourg inspiré d'un militaire qu'il a connu, "bourré du matin au soir, [...] toujours avec un pistolet".
Autre ennemi pointé de la plume : la religion qu'il dénonce dans le sulfureux journal Hara-Kiri. Un véritable sacrilège à une époque où la France était engoncée dans ses tabous. Armé de sa mine, infatigable dessinateur continue aujourd'hui à mettre en joue toute forme de culte. Un combat obsolète ? Non, car, pour lui, "la religion est en sommeil", avec le danger d'un possible retour.
Même vigilance dans sa guerre sans faille contre l'extrémisme, notamment avec Le Pen. Autres champs de bataille : "Le Beauf, symbole de la connerie humaine", qu'il inventa et qui traverse les années sans prendre une ride.
Ce n'est qu'après ses désillusions post-68 qu'il s'oriente vers les dessins politiques pour Charlie Hebdo puis pour Le Canard enchaîné. C'est à coups de crayon que le caricaturiste, clairement engagé à gauche, tape juste, là où ça fait mal. Ses célèbres victimes : Giscard avec sa "bouche en cul-de-poule et son air de monarque" ou Mitterrand. Dont il faut pour faire le profil dessiner une théière, apprend-on dans un extrait de Récré A2 où il crayonne face aux petits.
Pour autant, Cabu serait-il "une âme sensible au coeur d'enfant ?" ? "Tu parles", s'amuse Duduche, "c'est surtout un sale gosse !". Véritable récréation, ce documentaire à l'humour caustique est salvateur en ces temps de consensus mou.
Croqueur de Paris
Cinquante ans de carrière, plusieurs milliers de croquis, et pourtant Cabu n'avait jamais fait l'objet d'une exposition personnelle. Un travail aujourd'hui salué par la Mairie de Paris qui l'accueille du 21 septembre 2006 au 27 janvier 2007. On connaît le caricaturiste et son trait insolent ; on découvre un dessinateur amoureux de la capitale, arpentant ses rues, le carnet de croquis toujours à portée de main. l'exposition s'articule autour du lien qu'il a tissé avec la ville, représentée dans ce qu'elle a de plus vivant : ses paradoxes architecturaux et sa faune bigarrée. A ne pas rater !
Les intervenants
Les dessinateurs Charb, Luz, Gotlib, Wolinski et Riss ; le journaliste Jean-Claude Guillebaud ; Michel Gaillard, directeur du Canard enchaîné; Philippe Val, directeur de Charlie Hebdo, et François Cavanna, "ange tutélaire" de Charlie Hebdo et cofondateur de Hara-Kiri avec le Pr Choron, également présent dans ce documentaire.
Diffusion : jeudi 12 juin 2008 à 21:50 sur France 5.
Durée : 52'
Auteurs : Bernard Fournier, Jérôme Lambert et Philippe Picard
Réalisation : Jérôme Lambert et Philippe Picard
Narration : Antoine de Caunes