Gabriel, il faudra que tu nous fasses davantage de confidences, que tu prennes le temps de rassembler tes souvenirs et que tu veuilles bien partager ce qui peut l'être...
Cette couve de la dernière édition de
Docteur Moebius et Mister Gir fait évidemment écho au fameux et mythique récit
"La déviation", jadis (1973 !) paru dans l'hebdomadaire Pilote (n° 688) et qui marqua véritablement, bien qu'il fût signé Gir
(alors que la signature Moebius existait déjà dans Hara-Kiri depuis le début des années 60) le début d'une carrière sous cet alias. Dans une case, on y voit Giraud exactement dans la même attitude.
Dans "Les réparateurs" également, épisode relevant du
Monde d'Edena, Moebius recycle cette séquence de l'auteur à sa table.
C'est le premier récit qui fait véritablement entrer le lecteur dans l'intimité (certes fantasmée et largement revisitée) de Jean Giraud, vaste champ d'expériences graphiques et narratives qui s'étendra jusqu'aux six albums introspectifs d
'Inside Moebius et qui englobe les interviewes de Numa Sadoul dans le fanzine
Schtroumpf-Les Cahiers de la BD (1974) et dans le bouquin initialement paru chez Albin Michel en 1976.
Dans ce récit fantastique (La déviation), on voit tantôt Gir et sa petite famille (notamment Claudine, sa femme d'alors) sur la route des vacances et en voiture, et tantôt l'auteur, chez lui, à sa table à dessins en train de plancher sur Blueberry.
Tout au long de sa carrière, il déclinera ce thème de l'auteur au turbin. Jusqu'à Inside Moebius.
Dès 1974, Gir se remettra en scène dans une courte interview déjantée et dessinée dans un style relâché qui annonçait, un quart de siècle plus tôt, celui souvent utilisé dans
Inside Moebius. Par ailleurs, Gir se représentait également sur la couverture du fanzine, en costume d'apparat.
D'autres planches de la fameuse interviewObservons que le numéro de Schtroumpf précédent celui consacré à Gir mettait à l'honneur Claire Bretécher, autrice sensiblement de la même génération que Giraud. Les deux se connaissaient pour travailler ensemble à Pilote et avoir notamment pour amis communs Marcel Gotlib et Nikita Mandryka.
Et la couverture du magazine consacré à Bretécher la montrait... à sa table à dessin.
Ce récit de
la Déviation, avant d'être intégré à de multiples albums portant le label des Humanos, a connu les honneurs de la collection 30/40 de Futuropolis. Inutile de préciser que c'est une merveille, à ce format, le seul véritablement adapté à ces planches si travaillées.
Perso, du Sadoul, j'en suis resté à l'eo (collection Graffiti, 1976) que je dois avoir en double ou triple exemplaire et à la réédition cartonnée de Casterman 1991 qui ne reprenait pas le titre d'origine, à la différence de la récente édition sous couverture bleue. Il faudra quand même bien que je me décide à prendre la troisième mouture de cet incontournable.