CAPTAIN AMERICA : L'INTÉGRALE 1981-1982
J.M. DeMatteis, Mike Zeck, Gene Colan I 288 pages, 36,00 €
En 1981 et 1982, J.M. DeMatteis et Mike Zeck réalisent une série d’épisodes qui bouleversera la vie de Captain America et de son entourage. Ces récits figurent parmi les plus réussis et mémorables du titre. Les deux artistes accompagneront le héros jusqu’à la fin de l’année 1984.
(Contient les épisodes US Captain America (1968) 261-269 et Annual 5 et Defenders (1972) 106, précédemment publiés dans MARVEL CLASSIC (V2) 5, Strange 215 et inédits)
19 FEVRIER
Avant tout, je vais avouer que le run de J;M. Dematteis est un de mes préférés sur le personnage avec celui de Steve Englehart et les épisodes de Jim Steranko. Cela ne se verra peut-être pas de suite car c'est un peu un run diesel.
On commence par une saga qui en fait a été plusieurs fois réécrite. Au départ c'est un projet d'un album où Cap rencontrerait l'acteur qui joue "Captain America" dans le téléfilm des 70's (sorti au cinéma en France).
Ca se voit car des parties sont assez "faciles" comme étant voué pour un album grand public.
Ceci dit cette histoire introduit pas mal de choses: un nouveau Nomad assez éphémère, un Red Skull en homme d'affaire qui veut utiliser le capitalisme pour faire chuter la démocratie qu'on retrouvera tout au long du run de Dematteis mais aussi chez Mark Gruenwald, enfin le fait d'imposer sa volonté et sa vision sur d'autres qui sera un leitmotiv du run. L'intrigue envoie donc pas mal de clins d'œil vers la période Englehart (Nomad/ l'utilisation d'une campagne médiatique de dénigrement avec un vilain se faisant passer pour un héros) et la période Don Glut/Steve Gerber puisque le héros se retrouve sur un tournage avec le retour de l'Améridroid. Ces 3 épisodes s'avère quand même un peu bancal. Mike Zeck est encré par le Quickdraw Studios. On peut penser que Vince Coletta ou Frank Springer en font partie et donc le résultat bouge d'une page à l'autre et est rarement en adéquation avec la puissance du trait de Zeck. On sent aussi que le scénariste tâtonne encore sur la vie privé de Steve que ce soit la soirée de beuverie (qui sera mal accueilli par le lectorat) ou les liens avec Bernie. Cependant, on sent que cela l'intéresse et qu'il gardera la galerie de personnages introduit par Roger McKenzie ou Roger Stern et John Byrne. Bref cet arc n'est pas convaincant dans son ensemble mais place des pions.
On part ensuite sur un stand alone mais qui va vraiment montrer ce qui intéresse J.M. Dematteis : confronter Captain America à des idéologies ou idéaux pour définir ou circonscrire les siens.
Morgan McHardy utilise des télépathes pour modifier la réalité et revenir à sa "bonne vieille Amérique". Cependant chaque télépathe a aussi sa propre idée d'un monde parfait entre un monde enfantin, dominé par les nazis ou profondément raciste. Une des télépathes contacte le Captain. L'histoire est un peu rapide mais commence a montrer ce que veut faire le scénariste. Certains trouveront que le Captain parle beaucoup mais c'était sa caractérisation à l'époque. Il livre quelques discours déjà avec Stern et le fera aussi dans l'arc suivant par Anthony Kraft. Dematteis jouera là-dessus sur plusieurs niveaux tragique ou comique par la suite. La partie graphique "bénéficie" toujours de l'encrage de Quickdraw studios qui passe de pages superbes à la calamité.
La suite nous mène vers un Annual par David Michelinie et Gene Colan avec une histoire oubliable mais qui se lit bien. Le Graphisme de Colan est dans la lignée de ses travaux des années 80 avec un bon encrage. En effet, j'adore le dessin de Gene Colan mais moins son travail à partir des années 80 que je trouve parfois plus fouillis mais là Dave Simmons tend vers le réalisme tout en conservant l'énergie et l'impression de mouvement des crayonnés.
Dave Anthony Kraft arrive pour un fill-in de deux numéros d'une histoire qui semble faites pour pouvoir aller dans les séries Captain America, Spider-Man ou Marvel Team-Up. On a une histoire d'un apprenti maitre du monde savant fou dans la droite ligne des histoires du SHIELD. Nick Fury, Spidey et Cap devront déjouer ses plans. On voit que la scenario est classique. La grande nouveauté vient du fait que John Beatty encre Mike Zeck. Enfin le dessinateur bénéficie d'un encrage à la mesure de son talent sur la série et l'équipe va rester.
J.M. Dematteis revient pour une histoire avec un vilain qui joue la carte du populisme pour se révéler ne jouer que pour lui même. C'est assez classique dit comme cela mais cela continue d'opposer notre héros à desidées ou idéologies différentes. On peut penser que la conclusion est un peu simpliste mais d'un autre côté elle remet Cap sur la route des délaissés du rêve américain, ce qui devrait être le minimum sur ce type de personnage. Il y a un coté qui rappelle la future mini-série sur le Falcon dans quelques mois. Zeck et Beatty montrent qu'ils sont totalement compatibles graphiquement et continuent de livrer de belle planches.
A noter l'apparition dans l'univers Marvel de Karen Berger, éditrice chez DC, qui finira par prendre quelques années plus tard le titre Swamp Thing avec Alan Moore et a créer Vertigo. En effet, c'est une amie du scénariste.
Dematteis décide de croiser ensuite les deux séries qu'il anime: Defenders et Cap. Il joint l'intrigue des télépathes vu quelqus épisodes avant avec celles de Defenders impliquant August Masters et Mindy Williams, elle aussi télépathe. Masters tente lui aussi de remodeler la réalité comme il le souhaite en imposant sa volonté. La fin est assez tragique pour les Defenders. La partie Captain America est au niveau, celle des defenders un peu moins avec déjà Don Perlin qui a un style Marvel mais assez fade qui n'est pas aidé par le fait d'avoir 4 encreurs passant du passable à mauvais.
Enfin Dematteis se voit contraint d'utiliser Team America, une ligne de jouet que Marvel devait adapter comme Rom, Micronautes ou plus tard Crystar. On a donc un trio de motard/cascadeurs aventurier avec un twist. Captain America se déplaçant pas mal à moto à l'époque, le lien était fait. Tout ce petit monde se trouve transporté dans une sorte de société crée par le penseur fou. Elle est composée des meilleurs esprits humains ou en tout cas de leurs copies. Le plan est assez mal foutu mais il dévoile un pan que Dematteis utilisera souvent. En effet, il tente là de révéler un penseur fou ultime comme il le fera plus tard pour le Red Skull, Zemo, Kraven, Le bouffon Vert, Scarlett, Baron Mordo ou Mysterio. Révéler l'être humain derrière le méchant et ses véritables obsessions et d'en livrer une sorte d'histoire ultime dans tous les sens du terme parfois.
On a donc une sorte de prise en main de la série par le scénariste et l'équipe artistique. Un schéma se dessine avec la confrontation du héros à des idéaux, idéologies, idées contraires et/ou soumises de force. Les histoires sont un peu courtes et ne permettent pas d'aller toujours au bout de l'idée. S'il a bien en main la plupart du casting de al série, la relation Steve/Bernie Rosenthal n'avance pas pour l'instant et balbutie. Le déclic ne tardera pas à venir et la prochaine intégrale couvrira la première grande saga du run.