Je me faisais la même réflexion : Yann a été l'un des grands scénaristes des années 90, un peu des années 2000, mais pour ce qui est de cette décennie, à part sur le nombre de scénarios, je trouve qu'il n'y a pas de quoi pavoiser.
Le dernier Porphyre est tout bonnement indigeste et le dernier Louve est d'un pompeux et "artificiel" au possible (encore pire que le premier, ce qui était déjà un joli défi à relever...).
le souci avec Yann, c'est que ses idées sont souvent très intéressantes, mais qu'au fil du temps, ses scénarios ne se limitent qu'à ça : des idées, alignées l'une après l'autre, et ce alors qu'elles ne se prêtent parfois pas du tout à la psychologie des personnages, dont Yann ne s'embarrasse plus du tout. C'est de nouveau criant pour Thorgal : Yann assimile parfaitement le passé des héros, la mythologie (dans tous les sens) de la série, mais aucunement les caractéristiques propres, les petites fêlures des protagonistes. On en arrive à des planches où un personnage change radicalement de sentiment en trois cases, sans aucune évolution progressive, et ce juste pour les besoins du scénario.
Le second gros défaut de Yann, depuis un certain temps, ce sont les dialogues, qui sont d'une lourdeur effroyable et ne laissent plus aucune place à l'imaginaire du lecteur. C'est clairement en cela que, par exemple, les premiers Porphyres sortaient du lot, et je n'ai compris la raison de cette "amélioration" qu'après avoir lu une interview de Parnotte, qui disait avoir non seulement "laissé respirer le scénario de Yann" (en introduisant des cases "vides"), mais également éliminé certains dialogues, dont il avait pu faire passer le message par le dessin.
Il fallait des solides "corones" pour faire cela, mais le résultat y est, alors que dans le XIII Mystery et dans les Yoni, dans les Eternels, dans Louve, les interventions des "acteurs" sont clairement plus pesantes et redondantes par rapport au dessin.
Ceci étant, je réalise en écrivant cela que -je trouve- le style de Yann se marie pour cela très bien avec celui de Schwartz, parce que je n'ai pas du tout ressenti ses "tics", ou que je lais ai trouvés plus "assimilés", sans doute parce que Schwartz fait aussi des clins d'oeil "graphiques".
Euh, pourquoi je disais tout ça, encore, moi ?
Ah oui, en fait, je crois que Yann, il est pas fait pour le réaliste. Parce que les innommables, c'est quand même une oeuvre que personne d 'autre n'aurait pu faire... (ok, question logique mathématique de cette dernière phrase, on peut mieux faire, mais vous voyez l'idée...