Aigle Solitaire a écrit:Même si je confesse avoir un peu surchargé mes messages (en même temps, je faisais comme ça me venait), tout dépend de comment on interprète le sujet.
Tout à fait, et il ne fallait pas y voir malice, juste un constat.
Plus belle, pour moi (et ça rejoint le débat sur cette catégorie dans les BDGest'Arts) c'est avant tout "qui me reste en tête et me donne envie d'ouvrir (voire d'acheter) le bouquin".
Pour d'autres c'est "juste" jolie", ou remarquable (dans le sens qui pète à l'œil et ressort sur les étales), pour d'autres encore c'est qui "résume"/symbolise/est en adéquation avec le contenu.
Quand tu regardes en bas de page les chroniques, sur les 9 titres, mangas, FB et comics, tu en as 6 avec le héros/perso principal de face, qui regarde +/- vers le lecteur.
Les 3 autres sont celles qui retiennent mon regard (pour diverses raisons).
Un beau dessin, je n'ai rien contre, on peut y voir la technique/l'art de l'auteur et parfois même un bout du contexte, mais ça ne m'excite pas.
J'aime qu'on brise les codes, qu'on me surprenne, qu'elle se grave dans ma rétine.
Mais une fois lu, j'aime aussi quand elle me renvoie à des sensations, des moments de lectures et une couv qui se "dévoile" après coup risque aussi de me plaire alors qu'elle ne sera pas dans le canon "donner envie d'ouvrir le livre".
Donc oui c'est subjectif et paradoxal, c'est aussi pourquoi je demandais une mise en contexte si possible.
Il y a quelques mois j'ai eu la chance d'assister à une discussion entre D. Bertail et R. Recht, dans la librairie où j'étais (qui fait bar, c'est un détail qui pose le contexte). R. R. me faisait une dédicace quand D.B. arrive et qu'il s'assoit à notre table.
R.R. avait un "souci" de couv' pour son Conan et demande l'avis de quelqu'un qu'il considère comme un spécialiste.
Il montre (sur son tel) son ébauche et D. B. "ben elle est nickel, tout y est : le méchant, une femme court vêtue et une hache, ça le fait, t'as l'essentiel".
Rires et chambrages plus tard, il développe et explique que, pour lui, pendant très longtemps tu n'avais le choix qu'entre 2 approches :
- Le héros en situation de danger/d'action (type Tintin)
- Le héros de face ou 3/4 qui cherche le regard du lecteur (type celles en bas de page ou que tu as postées)
Et c'est Moebius, à ses yeux qui a ouvert une voie nouvelle avec une couv' "simple" et pourtant terriblement efficace : perso de face MAIS dont le regard ne cherche plus le lecteur, mais est tourné vers l'arrière, vers le monstre qui s'avance et le menace.
Cette couv', c'est :
(clique dessus, elle déboite en fait)
Elle date de 1976, et elle brise une règle appliquée par beaucoup sans forcément se poser trop de questions.
Avec ce regard en arrière, tout le danger, toute la peur du héros est transmise/représentée. Tu n'as qu'une envie, savoir ce que c'est, pourquoi, qui c'est, va-t-il s'en sortir ?
Mission accomplie, couv' accrocheuse qui donne envie d'ouvrir le bouquin.
Ce principe, toujours selon D.B. a été "modernisé" et repris à son compte par Lauffray sur LJS T1 :
On retourne le concept. Au lieu d'avoir le perso de face, il est de dos et ne nous regarde pas mais ce n'est pas un souci car il a trouvé un élément fort (graphiquement) qui le rend PARFAITEMENT et IMMÉDIATEMENT identifiable : le tricorne.
La pluie, les ombres au fond, les oiseaux font le reste. tu as l'ambiance, le mystère et ton héros qui fait face à son destin.
Quel est-il ? Où va-t-il ?
Il te faudra ouvrir le bouquin pour le savoir.
Si tu regardes aujourd'hui ce qui prévaut, tu constates que tout un pan s'est ouvert (et donne lieu à des variations +/- heureuses) notamment sur les one-shot, à côté de ces couv avec des héros en "action/danger" (Shi, Undertaker pour les premières qui me viennent) et celles qui misent sur le héros (Oracle, Nains, Elfes).
Ces dernières d'ailleurs se foutent de te donner envies d'ouvrir le bouquin, elles misent sur l'unité, la "marque" (Jour J, Les Grandes batailles ou peintres) et représentent pour moi le degré zéro de la création en terme de couv' (même si le dessin peut être chouette et le travail soigné).
Je trouve aussi que l'alchimie texte/dessin est importante. C'est une des remarques qui a été relevée pour Ar-Men dont on parlait plus haut. Superbe dessin mais le texte en plus du titre et du nom de l'auteur gâchait pour certains l'harmonie du truc. À croire que sans ce texte il manquait un truc alors que sa présence amoindrit la force de l'ensemble.
Dans les récentes j'avais notamment poussée celle-ci lors des délibérations, qui justement réussit, pour moi, cet équilibre :
Elle reprend une scène iconique du western, le duel dans la rue principale, mais avec des tons (bleus) inhabituel (en général ocre/jaune). De plus l'absence de "l'autre" et le titre amènent plein de questions (LL meurt ? Mais qui le tue ? Et pourquoi ?).
De plus, c'est un superbe hommage à l'un des titres (et des couv' !) les plus marquantes de la série mère.
Du coup, tu as en un coup d'œil :
- Le héros (parfaitement identifié)
- Le contexte (et la trame principale, le climax)
- L'auteur, parce que ce LL il porte clairement la patte de Bonhomme
Tout y est, et perso, j'ai qu'une envie, c'est d'ouvrir le bazar pour savoir ce qu'il se passe, pourquoi, quand, où, comment ?
EDIT : Désolé pour le pavé, me suis emporté, du coup je supprime mon passage sur Shi et Elric