de edgarmint » 21/12/2017 19:45
Cet album s’inscrit plus dans la continuité de Temps mort (récemment réédité) que comme une suite de TMLP. Par petites tranches de vie, Gilles Rochier raconte une part de son quotidien en banlieue
La petite couronne est un album dont il compliqué de parler, tant l’auteur lui-même semble désemparé face à ce qui l’entoure, dépassé par les événements, voire plutôt les non-événements. On sent qu’il n’est plus l’enfant, l’adolescent de TMLP, qu’il n’est même plus le jeune adulte de Temps mort. Il est père de famille, mais comme surpris de l’être, parfois sidéré d’être passé de l’autre côté.
Sa famille - qu’il élude graphiquement d’un bout à l’autre de son album - semble en fait la seule chose qui en fasse un adulte et qui maintient un soupçon d’organisation dans son quotidien manifestement précaire et sans emploi stable (chercher les enfants à l’école, les devoirs…). Dans ce qu’il donne à voir par petites touches, son existence semble une longue errance dans le quartier, on pourrait même parler de stagnation. Comme l’impression que rien n’a changé, si ce n’est son regard, avec une conscience très forte de son environnement qui s’est forgée au fil du temps et qui le plombe tout en le maintenant dans une sorte d’inquiétude permanente. Inquiétude qui semble le ronger au point de le pousser vers des zones d’ombres intérieures. Narré non sans quelques touches d’humour, Le petite couronne n’est pas moins un récit particulièrement pesant (et c'est moi qui le dit !).
Gilles Rochier, en cloisonnant strictement son récit, c’est-à-dire en éludant toute l’autre part de son existence (peut-être plus joyeuse, peut-être pas, peut-être plus ouverte sur l'extérieur, peut-être pas...), ne m’a pas donné assez de clés pour pénétrer au-delà de la surface de ce qu’il évoque. Petit regret pour ma part, donc.