Ben écoute, contrairement à la réponse très argumentée de mon prédécesseur, j'adhère parfaitement à cette théorie.
Le Village des Schtroumpfs est en effet une des plus récentes représentation de ce qu'on appelle une UTOPIE (U = privatif, + TOPOS = Lieu. C'est à dire "Nulle part"), c'est à dire un monde idéal qui n'existe pas, qui répond à tout ce qu'un auteur/philosophe/penseur etc... attend d'un monde parfait.
OR, les plus célèbres utopies (mis à part
Utopia de Thomas More, qui était moins politisée, et aussi plus ancienne d'un siecle) sont sorties au tournant du XXème siecle (un peu avant ou un peu après 1900), au moment où la révolution industrielle battait son plein, et où on entrait dans le monde moderne, mercantile, capitaliste.
Les utopistes en question s'appelaient notamment Edward Bellamy, auteur de
Looking Backwards, et William Morris avec
News from Nowhere ("Nouvelles de Nulle-part"). Et ces deux auteurs-là se sont servis de la "littérature" (vu la qualité artistique des œuvres en question, c'est un bien grand mot) pour faire passer leurs idées anticapitalistes inspirées des œuvres (récentes pour eux) de Marx.
Celui qui me parait le plus proche des Schtroumpfs est le numéro 2 : William Morris.
Alors que Bellamy était très urbain, lui avait une vision de la vie très campagnarde et bucolique.
Dans le "nouveau monde" de Morris, conséquence d'une explosion du monde moderne industriel qui a engendré un retour aux sources et aux "vraies" valeurs, les gens sont heureux. Ils ont tout ce dont ils ont besoin car ils se contentent de peu et ils produisent tout eux-même. Les biens, produits au nom de l'utilité publique, sont accessibles gratuitement, car il n'y a plus de monnaie. Les gens travaillent parce qu'ils savent que c'est utile, et ne sont évidemment pas payés. Leur seule récompense est le plaisir d'avoir accompli leur devoir pour la société, en ayant par exemple construit un pont, nécessaire à la communauté.
Il n'y a pas de gouvernement. Les gens n'en ont plus besoin, puisqu'il n'y a plus de lutte des classes, tout le monde étant égal à tout le monde.
Il n'y a pas de gens malhonnêtes, le crime étant considéré comme une maladie, une perversion venue des temps anciens (du monde industriel), et traité en hôpitaux psychiatriques.
Et c'est là que je te renvoie à un album Post-Peyo des Schtroumpfs :
le Schtroumpf financier. Outre le remarquable côté pédagogique qui explique aux gamins le fonctionnement de la monnaie fiduciaire, il met en lumière aussi le mode de vie des Schtroumpfs:
Société campagnarde, proche de la nature, il n'y a aucune sorte de hiérarchie, à part le Grand Schtroumpf qui fait plus office de vieux sage que de vrai chef. Pas de lutte de classe.
Il n'y a pas d'argent. Le Schtroumpf boulanger fait son pain parce que c'est utile pour les autres Schtroumpfs, et ne s'est jamais demandé s'il pouvait en tirer autre chose que le plaisir du devoir accompli.
Les Schtroumpfs, sages, raisonnables, car ils ne connaissent pas les abus, ne profitent pas de lui, et tout se passe bien.
Evidemment, il n'y a pas de Schtroumpf malhonnête.
Le Schtroumpf financier montre par ailleurs que le monde capitaliste, géré par l'argent, n'est pas bon pour eux :
Le jeune assistant d'Omnibus montre au futur Schtroumpf financier comment marche son monde. Il veut tenter le coup. Or, si le Schtroumpf boulanger ou cuisinier peut aisément faire son beurre, le Schtroumpf paresseux, lui, ne sait rien faire, et se retrouve vite sur la paille. Et le village commence à chavirer.
Les Schtroumpfs sont donc communistes sur deux plans :
Leur mode de vie est calqué sur l'œuvre des grands utopistes de la fin du IXIème siecle, qui vantaient par le biais d'une littérature très politiquement technique, les mérites du marxisme.
Leur tentative d'évolution, contraire à celle des romans utopistes, (cad de communiste à capitaliste et non de capitaliste à communiste), se solde par un échec, mettant en avant les côtés dévastateurs et l'absurdité de l'économie de marché.
Le seul bémol vient du fait que Peyo n'a PAS signé le "Schtroumpf financier". Peyo avait donc une vision utopiste marxiste du Village des Schtroumpfs, mais peut-être sans le savoir.
Ses successeurs, eux, ont précisé cette tendance.
Si Peyo n'était peut-être pas communiste, les Schtroumpfs eux-mêmes, en revanche, le sont certainement.
Voilà ma contribution
Bon courage!