Comme dit ma grand-mère, les reprises, c'est bon pour les chaussettes.
Donc d'une façon globale, je suis très réfractaire aux reprises et autres opportunismes financiers qui traduisent plus la timidité (pour ne pas dire la lâcheté) à la fois des éditeurs et des lecteurs, qui n'osent pas sortir d'une façon générale de ce qu'ils connaissent.
Je parle bien sûr du grand public et des grands éditeurs, le premier entraînant le second ou l'inverse, dans une danse effrénée où la finalité sera d'avoir une série sur la bonne de la Castafiore ou Spip (ne riez pas, on est pas loin : Vehlmann a fait une histoire courte sur Spip déjà).
Cela ne m'empêche pas d'en lire, d'une part parce que je suis quand même un peu mouton et complétiste, et d'autre part par curiosité, parce que j'ai toujours l'espoir de trouver quelque chose que j'aimerais.
Mais force est de constater qu'à part les personnages intrinsèquement liés à la reprise (Spirou, les comics, ...), il y a toujours des choses qui me chafouinent.
Les reprises :Finalement, j'ai l'impression qu'on peut résumer les reprises à deux catégories : les reprises "fidèles" (B&M, Boule & Bill, ...) et les reprises "d'auteur" (Lucky Luke par…, Valérian par…, ...).
Dans le premier cas, chaque choix d'évolution me semble problématique, car comment ne pas figer la série dans le temps (cf. Blake & Mortimer) tout en ne dénaturant pas la série elle-même (coller un smartphone à Boule par exemple). Je n'ai pas l'impression d'avoir lu de série qui parvient à l'équilibre sur ce sujet.
Et quand bien même, je trouve toujours que le dessin, bien que voulant imiter au maximum l'original, ne parvient pas à convaincre. Il y a souvent des expressions ou des décors ou des plans qui viennent du repreneur et de sa personnalité.
J'avais discuté avec Achdé au tout début de sa reprise de Lucky Luke, et il me disait que son trait sur le personnage était proche de celui de Morris "fin période Dupuis, début période Dargaud", et que son objectif était d’être fidèle au trait de l’auteur, mais en apportant quand même des découpages et des perspectives plus modernes, tout en gardant les poses iconiques. Il me disait (je ne suis pas allé vérifier depuis) par exemple que Morris ne faisait pas de plan américain, et que lui en faisait.
Dans le second cas, on n’est davantage dans la posture artistique que dans la volonté de respecter l’œuvre. Il s’agit soit de démontrer les défauts ou qualités de l’œuvre (cf. le Lucky Luke de Bouzard), soit d’utiliser les personnages comme prétextes à des envies personnelles (cf. le Lucky Luke de Bonhomme), comme par exemple de montrer que finalement telle série aurait pu être créée par l’auteur-repreneur, parce que dans son parcours artistique, ça colle bien.
Je trouve que cette façon de faire est intellectuellement intéressante, mais pas forcément totalement satisfaisante. C’est clivant, à tout le moins, et au mieux on n’en sort pas rassasié.
Les spin-offs :Là, je ne vois pas d’exemple de réussite. Zorglub est sympa comme série, de même que le très bon Champignac, mais pourquoi utiliser ces personnages, au lieu d’en créer exprès pour l’occasion ?
Zorglub est certes un génie scientifique totalement maladroit et avec un égo surdimensionné, et en cela Munuera respecte parfaitement la caractérisation du personnage. Mais le contexte ne fonctionne pas, ça n’a rien à voir avec l’inventeur de la Zorglonde par exemple.
Idem pour Champignac. En quoi un mycologue peut-il aider Alan Turing ? Quel rapport entre un biologiste, et un mathématicien ? « Bof, c’est des scientifiques, ça va marcher ! On a bien un mathématicien qui veut se la jouer homme politique ! »
L’histoire est très chouette (et le contexte de Champignac pendant l’Occupation me fait encore frétiller sur les quelques pages où on le voit), mais pourquoi utiliser Champignac ?
Je ne parle pas du Marsupilami, qui n’est qu’un prétexte à sa propre série.
XIII Mystery montre également ses limites (à quand un numéro consacré au photographe que l’on voit à la page X du tome Y ?), et ça me fait un peu l’effet du Before Watchmen : tout est dans la série principale, pourquoi s’emmerder à développer sur des dizaines de pages ce qu’on sait déjà ?
Je n’ai pas lu Alix Senator, la série principale ne m’intéresse déjà pas, donc comme la vie est faite de choix, je ne peux pas me prononcer.
Mais là encore, je prends des exemples de spin-offs par d’autres auteurs. Quand c’est le créateur d’une série qui nous propose des dérivées, ça me dérange bizarrement moins (Arleston avec ses séries sur Troy, Corbeyran avec ses séries sur les Stryges, …), quand bien même elles me plaisent plus ou moins.
Voilà, désolé d’avoir déblatéré, vous pouvez reprendre votre vie.