Ben il faut attendre qu'il se vende.
Je remets ici mon commentaire posté dans "C'est la Crise ?"
----
Eh bien il est rès bien ce documentaire (et je ne dis pas ça parce qu’on est crédité Producteurs associés
).
Un peu à charge tout de même puisque le film a été réalisé par Maiana Bidegain et co-écrit en couple par Maiana Bidegain et Joël Callède (Enchainés, L'appel des origines) et qu'on reste dans la mouvance syndicaliste SNAC-groupement BD. Quoique, est-ce que décrire la paupérisation du métier d'auteurs est être syndicaliste ? A ce compte là, on ne peut plus rien dire.
La réalisatrice donne la parole à tous les éléments de la chaîne. Y compris l'imprimeur : Éditeur (Dargaud, Delcourt), responsable éditorial, auteurs, diffuseur, distributeur (le passage dans l'antre des entrepots Hachette est assez impressionnant. Il faut imaginer la scène finale d'Indiana Jones, mais en plus grand.
), auteurs (Marko - dessinateur des Godillots -, Velhman, Van Hamme sur le mode "comment peut-on sortir tant de bouses" et Isabelle Bauthian "je rame sévère mais c'est la surproduction qui m'a permis d'être signée") etc. Sans oublier le riant avocat du SNAC-BD.
Peu de réaction de lecteurs cependant, il a fallut sabrer un peu au montage, et c'est tombé sur eux. Ceci dit, se passer de séquences micro-trottoirs ne peut pas nuire. On sait grosso modo ce qu'ils vont dire.
Il en ressort bien sur que c'est la surproduction, mais surtout de la faute de l'autre, chacun faisant son métier au mieux. Ce qui est marquant, c'est de voir la balance artistique/industriel évoluer selon les postes.
Distributeurs et diffuseurs se foutent carrément de l'artistique. Ce serait des pattes aux oeufs frais ou des pantacourt Adidas, ça leur ferait le même effet. L'éditeur aimerait bien mais ne peut pas, le cul entre un tabouret et un fauteuil. Le libraire aimerait bien lui aussi, mais ne peut plus, pas le temps.
Guy Delcourt apparaît un peu comme le grand méchant mais il faut dire pour sa défense que l'autre éditeur interrogé parait un peu candide (quand il n'est pas carrément aux fraises : "l'éditeur est un héros"...). Du coup le réalisme de Delcourt tranche : droit dans les bottes, business is business. Et dans ce monde de darwinisme capitaliste galopant, il vaut mieux manger qu'être mangé. Selon lui l'auteur doit s'adapter si il veut survivre dans le milieu et si son métier ne suffit pas à faire bouillir la marmite, il faut qu'il trouve un complément. Ce pragmatisme assez franc peut choquer, mais on ne peut pas lui reprocher de faire dans la langue de bois et ca a le mérite de rappeler que ce n'est pas parce qu’on fait du petit Mickey qu'on est dans le monde de Winnie l'ourson.
Sur le fond, les lecteurs assidus du sujet "C'est la crise ?" apprendront ici et là deux trois choses, mais c'est surtout les témoignages humains qui sont importants. Ça donne une image concrète de l'état des lieux. Le grand public, lui, apprendra pas mal de choses.
Coté solutions, les auteurs se tournent cette année vers le magazine numérique, ils tentent de défricher et de baliser un segment encore vierge. Ce que les éditeurs suivent de près puisque c'est non seulement un nouveau débouché, mais un nouveau vivier.