Même si je prends toujours plus de distance avec le monde du foot, je repasse par ici pour annoncer le bouquin de Jérôme Latta (Les Cahiers du Football) sorti en début de mois, retraçant l'évolution du football de ces 30 dernières années
Ce que le football est devenuEn filigrane de ce livre, un questionnement : pourquoi ce qui est arrivé au football durant les trente dernières années n'a fait l'objet de quasiment aucune analyse, aucun débat, aucune exposition médiatique, pourquoi les bouleversements qu'il a connus n'ont pas été reliés entre eux, reconnus comme un phénomène global ?
Pour le désigner, j'ai retenu l'expression "révolution libérale", cela aurait pu être "révolution élitiste" ou une autre appellation : peu importe le contenant, le contenu, lui, fait l'objet d'un consensus chez tous ceux - économistes du sport, institutions sportives et publiques, cabinets de consultants, etc. - qui ont étudié les métamorphoses du football professionnel.
Accompagnant la croissance phénoménale de l'économie du football, impulsée par l'augmentation des droits de diffusion, des mécanismes d'accroissement des inégalités économiques et sportives ont été méthodiquement empilés. Les uns, sinon "naturels", du moins logiques, les autres parfaitement artificiels, délibérés. Tous très puissants et, surtout, sans opposition consistante.
D'abord, justement, parce que le débat n'a jamais eu lieu. Ensuite parce que les pouvoirs sportifs et publics ont capitulé, ne leur opposant aucune politique de régulation suffisante. Enfin, parce que le football qui en est issu, outre qu'il génère des richesses qui profitent à presque tous ses acteurs, est puissamment séduisant et que son expansion se poursuit, malgré de criantes fragilités.
Il en a résulté une corrélation toujours plus étroite entre puissance économique et résultats sportifs, au mépris de l'équité qui devrait présider aux compétitions, et la formation d'une petite oligarchie de clubs. La suprématie politique, économique et sportive acquise par ceux-ci les a conduits au lancement d'une "Super Ligue" privée et fermée en avril 2021.
Si le fiasco de ce lancement et la large opposition qu'il a suscitée ont semblé indiquer le désaveu de ce football-là, rien n'a changé par la suite. La Super Ligue ne semble qu'ajournée et la fuite en avant se poursuit. Le football s'appartient de moins en moins, livré à des intérêts qui lui sont toujours plus étrangers, il devient de plus en plus une industrie du spectacle et de moins en moins... un sport. (...)