Traits intimes - Joub, Collection Soudain éditions Vide CocagneTraits intimes est une série de portraits sur le rapport au corps réalisé par Joub. Chaque page, un modèle, majoritairement des femmes, quelques hommes aussi, des adultes de tous âges et leurs réponses à une série de question sur leur rapport à leur corps et à leur sexualité. D’un modèle à l’autre, certaines réponses reviennent d’autres sont plus originales, plus particulières. La séduction, la sexualité et le vieillissement étant les thèmes récurrents. Certains modèles posent nus, d’autres plus ou moins vêtus. Ce ne sont pas toujours ceux ou celles qui dévoilent le plus leur corps qui répondent le plus intimement. Le tout est entrecoupé de tranches de vies très courtes de l’auteur, volontairement un peu absconses. Le traitement graphique ne cherche pas à enjoliver, mais au contraire, dans un certain réalisme cru, montre ces corps tels qu’ils sont avec ces petits défauts qui font leurs beautés. Ce ne sont pas des objets de désirs que l’auteur peint mais bien ces enveloppes de chair, qui ont un vécu et qui abritent des esprits.
Par petites touches, petit à petit, avec beaucoup de pudeur et de subtilité, c’est finalement sur lui-même que l’auteur en dit beaucoup. C’est lui qui finit par se livrer de manière très intime. Sa vie, entre la Guyane et la métropole, Paris, Saint Malo, souvent seul, loin de sa famille. La difficulté d’essayer de vivre du dessin, de la bande dessinée, la versatilité des éditeurs, l’irrégularité des commandes, les périodes chômées qui débouchent sur trois projets à mener de front… C’est sa propre lassitude, sa propre usure, physique et mentale que l’auteur interroge à travers ses questions à ses modèles. Et en même temps, on comprend, ou, en tous cas, moi, je crois comprendre que ce projet est pour lui une bouée de sauvetage. Il lui permet de rompre avec une certaine solitude du dessinateur devant sa page en se confrontant à d’autres, en se retrouvant lui-même chez d’autres. Et en même temps, cela lui permet de renouer avec ce qui lui permet d’avancer, ce qui est son moteur original, le dessin. C’est par le dessin que l’auteur se réapproprie ces corps et probablement, à travers eux, le sien, dans le plaisir qu’il arrive encore à trouver dans ces rencontres et dans le fait de trouver encore du plaisir à les poser sur papier que l’auteur trouve l’énergie de continuer. Finalement, à travers ce qui pourrait sembler un simple exercice anodin, cet album est une expérience forte et profonde
"Une centrale nucléaire c'est comme une femme, il suffit de bien lire le manuel et d'appuyer sur le bon bouton." Homer J. Simpson