Cette BD fait partie des meilleures ventes de cette année 2020.
Et pour cause, c’est le genre d’ouvrage qu’on offre facilement à des proches (souvent femmes) qu’on pense être victimes de la même chose que l’autrice.
Et c’est une très bonne chose car, comme les victimes de féminicides, c’est un piège aveugle qui se referme souvent sur elles et en parler, en témoigner, sont les seules choses que l’on peut faire pour réveiller une prise de conscience.
Et pourtant je viens de terminer cette BD et j’en ressors avec un avis très partagé.
D’un côté je comprends le besoin de cette dessinatrice de raconter l’expérience traumatisante qu’elle a vécu, de l’autre, je m’agace vite quand l’ouvrage prend un air de tutoriel pour aider à pour demasquer les manipulateurs plutôt que de témoignage pur, rapportant le ressenti d’un vécu, comme savent le faire si bien Guy Delisle ou Fabien Toulmé.
L’histoire laisse alors sa place à un genre de manuel analytique d’une dessinatrice qui empiète beaucoup sur les plate-bandes d’une psychologue qu’elle n’est pas et cela se voit. Tout devient tellement démonstratif et simpliste qu’on en arrive presque à avoir à la fin de la compassion pour son ex.
(Et s’il n’était pas si manipulateur et calculateur qu’elle ne l’imagine ?
Et s’il y avait aussi une petite part de règlement de compte ?)
Bien sûr, ce « Marcus » (le prénom a été changé) a dû la faire souffrir, mais je termine cette BD sans grande conviction, surtout à cause du fait que l’autrice utilise son cas personnel et son ressenti à des fins théoriques assez fragiles.
Ajoutez à cela cet ours en peluche (élément virtuel de dialogue dont on aurait pu se passer) assez insupportable, et cela me fait m’interroger sur ce très gros succès de 2020 aux critiques dithyrambiques...
Je ne dis pas bien sûr que tout est à jeter, et que sa lecture sera inutile aux victimes de manipulateurs (ou aux bourreaux d’ailleurs) mais j’aurais aimé autre chose sur le fond et sur la forme.
