Storyboard - The Drawing Agency

[kollambre]

Bonjour,
j'ai monté il n'y a pas très longtemps une petite structure orientée vers le dessin, et plus particulièrement le storyboard pour la publicité et le cinéma.
Le storyboard représente pour moi la confluence de deux de mes passions, à savoir la bande dessinée et le cinéma.

Pour Wikipédia, "Un storyboard, parfois francisé en scénarimage, est la représentation illustrée d'un film avant sa réalisation. Il s'agit d'un document technique généralement utilisé au cinéma en préproduction afin de planifier l'ensemble des plans qui constitueront le film.
On y décrit l'ensemble des paramètres cinématographiques (cadrages, mouvements de caméra et de personnages, raccords, etc.) avec la plus grande exactitude possible, afin de visualiser et planifier le tournage du film. Il est très pratique car il améliore la circulation des informations entre les équipes de tournage, et constitue donc un outil de référence lors de la production du film."

C'est vrai tant en pub qu'en cinéma, mais si l'utilisation du storyboard est généralisée dans le domaine publicitaire (c'est aussi un moyen de rassurer la production sur l'aspect qu'aura le film au final), elle se développe doucement dans le cinéma français.

Vous trouverez des exemples (non exhaustifs, évidemment), sur le lien suivant : http://www.thedrawingagency.com/fr/ce-que-nous-faisons.html

J'essaierai d'animer ce topic ponctuellement en apportant des éléments, n'hésitez pas à intervenir et à poser des questions si vous le souhaitez, je tâcherai d'y répondre dans la limite de mes compétences...

[nexus4]

Alors j'ai deux questions ?
D'ou tu pars quand un client te contacte, il a scénar, il discute avec toi de ce qu'il veut, il te raconte sa vision, ses moments forts ? il est derrière ton épaule pendant que tu esquisses le premier jet ? Et l'autre question est la même en fait, comment se passe la relation avec le client en cours de process ?

[stema33]

Excellent comme sujet
A suivre de près!

[Anianka]

En plus des storyboards, vous faite également les concept design pour certains films ?
J'ai vu ceux par M. Lauffray dans le Axis Mundi, qui sont vraiment chouettes, je pensais pas que des auteurs de BD pouvaient intervenir sur ce genre de sujets.

[kollambre]

Bonjour,
alors juste pour éclaircir un point, je ne suis pas moi-même storyboardeur, je chapeaute une équipe de dessinateurs dont certains ont pour spécialité le storyboard. Je suis en quelque sorte leur agent pour le stroyboard, le concept art, et parfois des illustrations pour de la communication.
J'ai choisi d'aborder ici le sujet du storyboard pour la prise de vue réelle, parce que c'est à mon avis quelque chose de très intéressant et méconnu...

Pour répondre à Nexus, on voit de tout, tant en pub qu'au cinéma.
Pour la pub, il faut différencier deux types de travaux : les boards agence qui sont réalisés par l'agence de pub pour convaincre le client final de travailler avec eux (après un processus qui s'apparente à un appel d'offres). Nous avons choisi de ne pas nous concentrer sur ce segment, où en général il faut des boards en couleur, très finalisés.
Les shooting boards s'apparentent plus à un document technique, qui représentent de façon ou moins fidèle la vision qu'a le réalisateur d'une séquence. Le client final n'intervient pas dans ce process, les interlocuteurs sont donc le directeur de production au niveau de l'agence de publicité et le réalisateur du spot. C'est ce que nous faisons le plus.
Chaque réalisateur a ses habitudes, en général il y a un brief (environ deux heures) où le réal détaille les plans qu'il souhaite faire, les mouvements de caméra, etc. Pendant ce temps le boardeur fait de petits croquis très rapides pour positionner ses éléments. Il rentre ensuite sur son lieu de travail pour mettre au propre (il faut compter une vignette/seconde dans la pubicité en gros, donc en moyenne 20 vignettes pour un spot classique). Le maitre mot est la réactivité, car les demandes sont souvent du jour pour le lendemain, et un storyboardeur expérimenté réalise entre 10 et 15 vignettes/jour (on parle là des vraiment expérimentés...)

Pour le cinéma, c'est assez différent car le process est plus long, il y a une vraie relation qui s'instaure entre le réalisateur et le storyboardeur, chargé de mettre en images la vision du réal. L'intérêt est multiple dans le cinéma, car le storyboard permet d'avoir une vison sur la faisabilité d'une séquence, mais également sur le chiffrage de celle-ci (ce qui est important pour le directeur de production), c'est aussi une base de travail commune pour tous les techniciens qui bossent sur un projet... En général sur ces projets de plusieurs semaines (voire mois), le storyboardeur travaille directement dans les bureaux de la production (après c'est comme pour tout, il y a des exceptions...)

Pour ceux que ça intéresse, il y a un bouquin sorti récemment chez Eyrolles qui s'appelle "Masterclass Storyboard", et qui est intéressant car ce sont des entretiens croisés de storyboardeurs et de réalisateurs.

Allez j'arrête, sinon je vais devenir indigeste...

[Malnati]

Ha bon ?? Moi pour le film "AO le dernier néanderthal" je réalisais 50 à 80 vignettes par jour
J'aurais bien mieux gagné ma vie à lever un peu le pied visiblement !
Loïc.

[kollambre]

Je parlais de pub Loïc, avec le niveau de finition qui va avec (en général plutôt détaillé, et en niveaux de gris).
Pour le ciné c'est différent, et pour le coup il est fréquent de voir des 50/60 vignettes/jour (encore une fois pour quelqu'un d'expérimenté). Plus ça devient quand même compliqué...

[Malnati]

Ha oui, autant pour moi. Ceci dit, quand je bossais pour Mac Guff Line, sur des pubs, je faisais des boards en couleurs très poussés, et il me semble que je faisais plus que 10 vignettes/jour... Mais je me trompe peut-être, ça date un peu...
Belle initiative en tous cas Kollambre.
Loïc.

[buzznico3000]

Yeah !! on y va dans le story-board !!!

allez, allez !! pressez-vous !! y en aura pour tout l'monde ! et c'est d'la bombe !

The Drawing Agency, c'est trop mimi !




Bonne lancée, mon poto !

j'suis à fond avec toi et ta bande !

[Cobalt 60]

Le story board pour les agences de pub est un outil de vente, il est donc normal qu'il soit très finalisé car l'interlocuteur côté annonceur n'a aucune formation à l'image (c'est d'ailleurs bien regrettable puisqu'il juge des choses pour lesquelles il n'a pas de compétence). Il faut donc lui montrer de la façon la plus précise possible à quoi va ressembler le film publicitaire.
L'élaboration de ce type de story board a peu à voir avec le résultat final. Il ne prétend pas à un chronométrage précis des plans, ni même à fixer ces plans et leur enchaînement. Il s'agit principalement de raconter le script en s'aidant du support de l'image pour que le client s'en fasse une idée la plus claire possible (du moins on l'espère). A cette étape, le story board a été élaboré en collaboration avec le directeur artistique de l'agence, le concepteur-rédacteur et le story boarder qui peut apporter des suggestions. Mais si le DA est assez bon en dessin lui-même et a un sens de la narration en image, le story boarder ne vient que pour finaliser le tout.
Quand le script est accepté et validé par le client (toujours après de nombreuses modifications), alors l'agence entre en phase de recherche du réalisateur en soumettant le SB à diverses boîtes de production. Dès que le choix est arrêté, le réal retenu peut travailler à son propre découpage technique avec ou sans l'aide d'un story boarder.
D'un point de vue présentation, le SB de pub est en général bien plus intéressant car il est finalisé. Le SB technique est réalisé beaucoup plus rapidement en noir et blanc avec des flèches et des indications. Le dessin n'y est pas mis en valeur car il ne s'agit pas de séduire, il est totalement au service de la technique. Si on veut établir une comparaison en terme d'intérêt graphique, on peut dire qu'il est l'équivalent du bleu de mise en couleurs manuelle.
Le prix d'une image de board de pub n'a évidemment rien à voir avec celui pratiqué pour le cinéma. Quand on aime le dessin et que l'on veut en vivre, c'est une bonne solution… de compromis. Les plus doués dans le domaine ne bâtissent en effet pas toute leur carrière là-dessus, car c'est assez peu valorisant en termes artistiques et assez éprouvant en terme de boulot (travail la nuit ou dans des délais très courts). Le destin des images d'un story board de pub est de finir à la poubelle ou derrière une armoire, jusqu'au prochain déménagement de l'agence. Je parle uniquement des SB exécutés sur support papier et dont les originaux sont remis à l'agence (c'est de plus en plus rare, sauf board effectué sur place).
Le story boarder de pub est choisi sur son style (mode, bagnole, perso, bouffe…) à partir d'échantillons de son travail. Les plus forts d'entre les story boarders sont une toute petite poignée d'individus que l'on doit réserver des jours à l'avance auprès de leur agent.

[kollambre]

Tu as l'air de bien connaître le marché Cobalt, et tu as parfaitement raison!
Tu différencies bien ce que j'appelle board agence, plus communément appelé rough dans la pub, et le document technique qui n'a d'utilité que pour le réal, et qu'on appelle un shooting board.
Pour ce qui est des roughmen, il y en a environ 200 en France, très majoritairement représentés par des agences parisiennes. Nous avons fait le choix de ne pas réaliser ce type de travaux, pour plusieurs raisons et notamment parce que, comme tu le soulignes, il y a dans cet exercice de multiples intervenants, qui en général n'ont pas le bagage technique pour évaluer objectivement un travail dessiné (j'ai plein d'anecdotes à ce sujet...)
La population dont je m'occupe est encore plus petite, puisqu'elle concerne entre 20 et 30 personnes, sur des travaux à vocation technique et pas pour vendre un concept.
Tu travailles en agence de pub?

[nexus4]

(j'ai plein d'anecdotes à ce sujet...)

Wouhavazy, fais pas ton rat, fais tourner.

[kollambre]

(j'ai plein d'anecdotes à ce sujet...)

Wouhavazy, fais pas ton rat, fais tourner.

Des trucs du type 6 allers/retours pour un sourcil sur un personnage, ou une modification de couleur d'une partie de décor en herbe, où après 4 demandes de changement, on resoumet la proposition initiale que le client trouve géniale et valide...
C'est typiquement le genre de choses qui arrive très régulièrement (ça fait partie du job, mais parfois ça irrite un peu tout de même)

[Cobalt 60]

Oui, je travaille en agence.
Et l'essentiel de mon boulot consiste en effet à recommencer : changer un mot pour un autre ou une couleur d'herbe (un classique) et ceci parfois jusqu'à une dizaine de fois. Mon record personnel étant un texte que j'ai dû réécrire une bonne cinquantaine de fois (c'était pour un film de 30s, dialogues et voix off).
Pour faire ce métier, il faut avoir des nerfs d'acier. Ce qui explique que les petits jeunes viennent y faire un tour mais ne restent pas.
Ma "meilleure" anecdote : un annonceur regardant image par image un film d'animation pour son produit (comme si le commun des mortels se livrait à ce genre d'exercice) a exigé que le contour des dessins (visible un douzième de seconde pour rappel, autant dire qu'on est dans le subliminal) soit noir et non brun. Le réalisateur du studio d'animation, une pointure internationale, avait choisi cette couleur pour que les personnages se découpent en douceur sur les décors. Seulement voilà, dans les écoles de marketing, on n'apprend pas ce genre de subtilité. Donc comme tout ignorant qui se respecte, le type se fie à ce qu'il a toujours pensé être juste sans se poser de questions : un contour c'est forcément noir. De même qu'un filet tournant sur une page, c'est obligatoirement pour un faire-part de décès. Et le gars pensent que tout le monde va penser comme lui (ça c'est l'argument servi à toutes les sauces).
Essayer de convaincre quelqu'un qui est dans l'erreur relève de la même démarche qu'expliquer à un béotien que la dédicace qu'il vient d'acheter sur la baie n'est pas de Mœbius. Il manque un pan entier de culture, une pratique qui se compte en années pour développer une sensibilité à ce genre de choses. Les types ne savent rien à rien en cinéma, en musique, en montage, en jeu d'acteur mais ils viennent quand même emmerder les professionnels chevronnés qui travaillent pour eux.
J'ai aussi eu des clients qui ont demandé à un compositeur d'enlever un par un les instruments de son morceau, sans rien connaître aux arrangements ou à l'harmonie.
L'absurdité de ces demandes est facilitée par l'emploi des machines qui permettent tout. En salle de montage, un client peut demander des modifs qu'il aura sur l'instant même. Ce qui n'était pas possible quand on travaillait sur film 35mm avec une visionneuse. Pareil pour la musique et Protools qui permet de tout modifier (même la reprise de souffle d'un comédien).

[Cobalt 60]

C'est bien joli de créer un sujet sur le story board, mais le problème est qu'il n'y a pas grand chose à en dire et encore moins à montrer. C'est un outil de travail pour professionnels auquel le grand public n'a pas accès. Par conséquent ce sujet risque de se retrouver assez rapidement dans les limbes du forum.
Personnellement, je suis soumis au secret professionnel envers mon agence et ses clients. Il m'interdit de mettre les images des story boards sur lesquels j'ai travaillé sur le Net. Elles sont la propriété des annonceurs et des story boarders. Pour le faire, il faudrait que je demande des autorisations qui me seraient de toute façon refusées

[kollambre]

Oui, je te remercie, je trouve en effet ça bien joli... Je ne voulais pas déclencher ton courroux.
Si ça n'intéresse personne ce sujet finira évidemment dans les limbes du forum, ce qui est plutôt naturel comme process. Je trouvais justement intéressant d'aborder un aspect différent du dessin narratif.
Et pour ce qui est des visuels, aucun souci pour utiliser ce qui est public, et ce qui est confidentiel ne le reste qu'un temps déterminé (légalement il est impossible de t'empêcher d'utiliser tes visuels à des fins non commerciales, ne serait-ce que par le droit d'extrait par exemple).
Et si ce sujet crée une quelconque polémique, on le fermera, sans problème.

[Cobalt 60]

Tu m'as mal compris, je ne suis pas du tout en colère et suis au contraire très content qu'on parle des story boards. Bien souvent j'ai trouvé un peu injuste que les artistes très talentueux qui travaillent à la périphérie des créations soient de complets inconnus hors d'un petit cercle de professionnels. Il existe de plus en plus de livres qui montrent le travail des designers et concepteurs de décors pour les jeux vidéo ou le cinéma par exemple. Pour les storyboarders et les roughmen de pub, il n'y a rien de la sorte mais on peut toujours visiter les sites de leurs agents pour se faire une idée.
En tout cas, pour ton agence, je trouve que tu as choisi un bon créneau car la concurrence est rude à Paris entre les agences de roughmen. Pour éviter des coûts supplémentaires, les agences de pub incitent les directeurs artistiques à faire eux-mêmes les roughs à partir de photos issues de banque d'images retravaillées sous Photoshop. Les présentations ont ainsi plus de gueule et d'impact qu'un rough classique. Le métier de pur roughman est donc en train de disparaître ou d'évoluer vers la retouche photo pour ceux qui s'y sont mis.
Pour les storyboarders c'est un peu différent car retoucher des photos prendrait beaucoup trop de temps. Encore que, là aussi, j'ai déjà vu des storyboards entièrement réalisés à partir de photos retouchées.
Je souhaite en tout cas beaucoup de succès à The drawing agency et à ce sujet.

[kollambre]

Merci Cobalt, ça fait un moment que je suis le boulot de ce micro-segment, effectivement majoritairement par les sites des agences parisiennes...
Est-ce qu'il y a possibilité d'afficher des images dans le sujet sans passer par un hébergeur extérieur?

[nexus4]

Oui, quand tu rédiges un message tu peux utiliser l'onglet "ajouter de fichiers joints" (non disponible dans la réponse rapide) juste en dessous des boutons "Sauvegarder" "Aperçu" "Envoyer".

[kollambre]

Pour animer le sujet et partager quelques visuels d'actualité, ci-après une petite planche montée réalisée pour "Les Profs" qui est sorti aujourd'hui.
Bien sûr il y a des modifications entre le visuel et ce qui passe à l'écran (en particulier pour ce cas il a été décidé a posteriori qu'une image de jour et sans neige serait plus approprié pour une comédie), ceci étant la perspective a été conservée et le cadrage également.
Le dessinateur est Pierre-Emmanuel Chatiliez, un garçon très talentueux qui, outre le storyboard, développe en parallèle une activité orientée vers le digital painting...



Uploaded with ImageShack.us