de the frog » 25/05/2016 22:06
Decidement, Mitterrand est a l'honneur ces derniers temps dans la BD. L'automne dernier, nous avons eu droit a sa jeunesse racontee dans un tres bon album. Il faut dire que le sujet m'interesse beaucoup car je considere Francois Mitterrand comme le deuxieme plus grand chef d'etat que la France ait connu depuis la fin de la Deuxieme Guerre Mondiale, le premier etant de Gaulle bien entendu mais j'etais beaucoup trop petit quand il etait au pouvoir pour pouvoir l'apprecier a sa juste mesure. On pourrait qualifier Mitterrand comme la face obscure du General, celui-ci etait a priori, plus facile a discerner compare au charentais, au nivernais et au landais. Il faut dire que ce dernier s'est beaucoup promene en France et si il a atterri a Chateau-Chinon, c'est pour etre certain d'y avoir un siege de depute, siege qu'il a conserve jusqu'a son election en 1981. Que venait faire l'homme de Jarnac de l'autre cote de la France dont il n'etait pas originaire? Depuis 1988, annee de sa reelection, je suis devenu fascine par cet homme qui apres avoir mis KO au premier round Jacques Chirac lors du debat les opposant entre les deux tours de la presidentielle de cette annee et qui quelques minutes plus tard mentit effrontement a la France entiere en regardant son opposant droit dans les yeux alors que celui-ci lui avait pose une question qui savait qu'il mentait mais ne pouvait pas repondre lui-meme. Chirac est un tueur polique mais la, il avait trouve son maitre et il repartit la queue entre les jambes bien penaud. Cet homme qui a tout fait pour arriver au pouvoir supreme en France a savoir l'Elysee et qui a tout fait pour y rester, qui etait-il vraiment? Que pouvait-il lui arriver apres qu'il ait quitte l'Elysee? Rien d'autre que mourir puisqu'il avait tout vu, tout connu. Et c'est ce qu'il fit.
C'est ce que raconte la BD, les derniers 15 jours de la vie de Mitterrand qui sait qui va mourir et qui fait le bilan de sa vie en devisant avec Anubis, le dieu egyptiens des morts, puisque le dernier voyage que Mitterrand fit jamais fut d'aller en Egypte et de faire une croisiere sur le Nil. Il etait accompagne de son medecin personnel, d'Anne Pingeot et de leur fille, Mazarine avec qui il passera donc les fetes de Noel. La deuxieme partie nous conduit a Latche, dans les Landes, ou il sera en compagnie de sa famille officielle, Danielle et ses 2 fils pour ce qui sera son dernier reveillon de fin d'annee et que tout le monde le sait. La fin a lieu evidemment a Paris dans ce qui sera sa derniere residence ou il decedera. Callede a donc concu l'album comme un recit ponctue de retours en arriere plus ou moins long ou il passe en revue les grands moments de sa vie en n'occultant pas les zones d'ombre et Dieu sait si il y en a, ainsi que les contradictions telle que celle ou il appliquait la peine de mort sans etats d'ame quand il etait Garde Des Sceaux pendant la 4e Republique a l'encontre des rebelles independentistes algeriens durant la Guerre d'Algerie, peine de mort qu'il fit abolir en 1981. Dans la longue liste des choses peu reluisantes, il a oublie le faux attentat de l'Avenue de l'Obervatoire qu'il avait lui-meme organise afin de regagner de la visibilite politique et de nombreux autres bien sur. Il oublie aussi les petitesses du grand homme, la securite de sa maitresse et de la batarde etait paye par tous les contribuables de France et de Navarre. Mais il reste l'essentiel, sa rencontre avec Petain, son action dans le gouvernement de Vichy, la francisque, pas mal pour un homme qui a fait croire a ses electeurs de 1981 qu'il avait toujours ete gauche, quasiment depuis l'age du biberon a l'entendre. Je vous le disais, cet homme est fascinant.
Callede a ete tres econome de ses moyens et a tente d'aller a l'essentiel en restant tres sobre dans ses cases. On y voit 2 ou 3 personnages ayant des conversations plus ou moins longues ou il se remet en question. Peu de fioritures donc et c'est tout aussi bien comme cela car l'interet du lecteur ne se perd pas a contempler de beaux dessins bien faits ou tout le monde est ressemblant. Callede juxtapose les retours en arrieres dans un ordre non chronologique sans que le lecteur se perde en route. Les scenes se succedent les une aux autres juqu'a l'inevitable conclusion ou Mitterrand a enfin la reponse a la question qui le hante. Mais le drame final de cet homme quand on le compare avec son adversaire politique de 1965, le General de Gaulle est que comme il le disait lui-meme. "Mon probleme est que je n'ai pas le 18 Juin avec moi" En effet, de Gaulle avait immediatement compris le sens de l'Histoire alors que Mitterrand ne l'a saisi que plus tard, trop tard, alors qu'il s'etait deja fourvoye avec Vichy
J'ai beaucoup aime le dessin que j'ai trouve tres elegant, plein de retenue et sans emphases. Un joli travail.
Ma derniere remarque concerne l'editeur puisque l'album est sorti au Lombard. C'est tres etonnant car la maison d'edition bruxelloise n'a pas la tradition d'editer ce genre d'ouvrages. Je l'aurai plus vu chez Dargaud, Futuropolis, Casterman ou chez Aire Libre de Dupuis, plus habitue a de telles BD. Bizarre autant qu'etrange, non?
C'est un tres bon album qui complete bien celui de Rebena et Richelle de l'annee derniere. Et puis le sujet est passionnant.
"Schtroumpfer, voilà ma devise!" Peyo