L'attentat de Loïc Dauvillier et Glen Chapron d'après le roman du même nom de Yasmina Khadra aux éditions Glenat.Amine, est Arabe et Israélien, il fait parti de ceux qui ont réussi à s'intégrer, c'est un chirurgien reconnu et il a réussi à se construire une petite vie tranquille avec sa femme Silhem à l'abri du conflit qui déchire son pays. Du moins c'est ce qu'il croit. Un jour, un attentat dans un restaurant, 19 victimes et la police vient lui apprendre que le kamikaze est sa femme. Le monde d'Amine s'écroule. Comment a-t'il pu vivre toutes ses années auprès d'elle et ne se rendre compte de rien. Il part dans une quête désespérée pour essayer de comprendre l'incompréhensible.
N'ayant pas lu le roman original, (mais j'espère bien, un jour trouver le temps de combler ce trou, parmi, hélas, tant d'autres dans ma culture), j'ai un peu du mal à juger du travail d'adaptation en lui même. Mais ce que je peux vous dire, c'est que cette bande dessinée est sans doute celle qui m'a le plus pris aux tripes de toutes celles que j'ai pue lire, un contre-exemple que je ressortirai maintenant fièrement à tous ceux qui prétendront devant moi que la bande dessinée ne peut pas être le support d'émotions intenses et d'oeuvres majeures et bouleversantes.
Je crois que la grande force de cette histoire, vu la délicatesse du sujet, c'est de ne pas essayer de prendre parti. Cette BD est le constat glaçant, d'une réalité qui n'est qu'une énorme incompréhension et une somme de soufrances. Derrière les crimes, les fanatismes et les intérêts politiques, ce livre nous montre avant tout des humains qui vivent une situation atroce et absurde qui leur échappe totalement. Une spirale de haine sans logique qui semble s'auto alimenter, chaque action étant toujours justifiée par une action précédente.
Plus Amine cherche à comprendre, plus il se rend compte qu'il n'y arrivera pas, plus son désarroi, et sa rage autodestructrice augmentent. Et toute l'habileté de cette oeuvre est dans la façon dont le dessin est utilisé pour nous faire passer le message. Les décors et le couleurs chaudes nous plongent en immersion totale dans ces terres brûlées et nous les rendent réelles et étoufantes. Mais c'est toute l'humanité et le désespoir que Glen arrive en quelques traits à placer dans le regard de son héros qui font de cette lecture une expérience forte, dure et marquante.
Cette capacité de Glen à mettre énormément d'émotions dans ses traits était d'ailleurs déjà une des grandes forces de Vents Dominants, précédent album de Glen avec Julia Wauters paru chez Sarbacane. Je ne peux que féliciter Loïc Dauvillier d'avoir su repérer ce don et d'avoir eu l'idée brillante de le mettre au service de cette histoire particulière.
"Une centrale nucléaire c'est comme une femme, il suffit de bien lire le manuel et d'appuyer sur le bon bouton." Homer J. Simpson