Evaristo - Carlos Sampayo / Francisco Solano López - iLatina

[Bolt]

Comment écrire un récit policier en Argentine? Comment créer un héros crédible est le plus grand défi dans un pays où les policiers et les détectives privés s’occupent généralement d’affaires étrangère aux exigences de l’imagination.
Avant de créer Evaristo avec Solano López, Carlos Sampayo avait déjà inventé Alack Sinner aux côtés de José Muñoz.
Dans Evaristo, le personnage est un commissaire argentin modelé par le mythe: Evaristo Menezes, héros de persécutions légendaires, célèbre pour son côté obsessif et son courage. Dans ces épisodes, il y a des récits à énigme, un duel Borgésien, des intrigues politiques, des assassins en série…
Sampayo change de l’un à l’autre, le ton et la stratégie. Ses histoires parviennent à une complexité et ses fins ont une solidité rarement vues en bande dessinée.”
D’après le prologue de Pablo de Santis

Plus d'infos et une preview chez l'éditeur.

[Torelli]

Du très bon polar noir. Ce sont des histoires courtes à chaque fois avec en vedette Evaristo flic taciturne, violent, fumeur comme un pompier mais avec une certaine morale. Un vrai personnage Hardboiled.
Et puis graphiquement c'est de toute beauté avec des planches très travaillées.
En fin d'ouvrage quelques compléments d'informations pour nous remettre dans le contexte argentin de l'époque.
Une belle découverte. Merci aux éditions Ilatina et longue vie à eux !!!

[Olaf Le Bou]

je remets ici un échange du forum généralités :

J'étais parti pour les Indes Fourbes et le Château des Animaux et puis je me suis dit que vu le gros tirage, j'avais bien le temps de les acheter. Du coup, j'ai pris ceci :



Lu la première histoire : belle ambiance de polar et beau dessin

Je trouve cela surprenant. Pour moi, la première histoire ne fonctionne absolument pas. Il y a un gros problème avec le découpage proposé et le texte de Sampayo. Dans un souci d'économie, le scénario, compressé en une vingtaine de pages, fait avancer l'action trop rapidement - on change de lieu et/ou de personnages entre chaque case - par rapport aux dialogues, qui eux se suivent et se répondent de manière immédiate. Le décalage que cela crée entre l'action décrite par le dessin et la continuité suggérée dans les phylactères empêche l'immersion dans l'intrigue et l'ambiance au point de me faire regretter mon achat, trouvant ce défaut à la limite de la faute professionnelle.

Heureusement, ce problème s'estompe dès la deuxième histoire avant de disparaître totalement par la suite. On sent qu'il y a eu une courbe d'apprentissage de la part des deux auteurs, mais une fois qu'ils tiennent leur rythme narratif et impose leur ton, le tout devient vraiment prenant grâce à l'ambiance qu'ils installent et la variété des intrigues que leur permet le format. J'ai particulièrement aimé celles intégrant d'importants morceaux de l'histoire contemporaine de l'Argentine, ces éléments conférant une patine dépaysante à la série en même temps qu'ils en épaississent le contexte. Au final, un achat impulsif de ma part qui va rester dans ma bibliothèque.

Pour ceux qui auraient des infos, cette série a bien connu une prépublication, non ? Si c'est bien le cas, quelles en étaient les modalités ? Des fournées de deux pages ? Plus ? Des épisodes entiers ? Ça m’intéresse car je pense ça expliquerai les errements initiaux que j'ai ressenti à la lecture.

eu exactement le même ressenti au début d'une accumulation d'ellipses temporelles hasardeuses et d'un décalage manifeste entre les textes et le dessin. effectivement la deuxième histoire est plus fluide, et par la suite je n'ai plus eu ce sentiment de construction maladroite.
Mais je me demande si l'adaptation et la courbe d'apprentissage évoquées par superboy sont réellement le fait du duo d'auteurs ou bien si ce n'est pas nous autres lecteurs qui nous accoutumons au rythme narratif singulier utilisé ici.

Quoi qu'il en soit, malgré un séquençage hardi et une exploration audacieuse des espaces inter-iconiques, malgré un emploi intense des sous-entendus et une confiance inusitée en l'intelligence du lecteur, j'ai pris un plaisir croissant à lire ces histoires… tout cela dresse un panorama vivant et fouillé de l'Argentine des années 50-60 (même si les histoires s'inspirent parfois d'épisodes historiques des années 30) et propose un portrait pas forcément flatteur mais profondément humain et nuancé du commissaire Evaristo. Et par delà l'intérêt des récits et la justesse des personnages, le dessin de Solano López est une invitation permanente à se replonger et s'attarder sur ces vignettes.

[cronos59]

La grande arnaque puis evaristo, je vais suivre attentivement ce que proposent les éditions ilatina

[Olaf Le Bou]

décidément, après le formidable Evaristo, les éditions iLatina continuent sur leur bonne lancée. tout au plus ferais-je le reproche d'une densité de noirs un peu fluctuante d'une planche à l'autre ; je ne sais quelle est la nature du matériel original utilisé pour ces rééditions, mais alors que l'essentiel est d'un beau noir profond et contrasté, il y a parfois des planches un peu pâlottes tirant sur le gris qui donnent une curieuse uniformité.

quoi qu'il en soit, voici encore un excellent album, constitué d'une longue histoire bien noire, avec femmes fatales, brutes patentées, ex-flic cabossé par la vie, politiciens corrompus, bref tous les requis du genre, mais additionné de quelques éléments originaux qui font le sel de ce récit.

d'abord, la femme fatale est infiniment plus complexe et duale que d'ordinaire, ensuite le personnage du narrateur / faiseur de mythe appointé du pouvoir est très bon, inédit, un réel plus ; et le tortionnaire / croquemitaine du régime est évidemment une figure inoubliable, quasi mythologique. Enfin, le sous-texte évoquant les dictatures militaires sudaméricaines est très finement exploité, navigant intelligemment entre tragique et grotesque.



la suite, séquelle, post-scriptum, consacrée au personnage de l'iguane, le tortionnaire en chef de la dictature, est un peu moins prenante que l'histoire principale, mais constitue néanmoins un exercice réussi, en incarnant les conséquences à long terme de la dictature et montrant comment ses exactions marquent durablement la population.

[Le Tapir]

5 ans que j'avais ça en boutique, oublié sous une pile, et puis ressorti par hasard à la faveur d'une recherche d'une autre bd...

Lu quasi d'une traite! Une des plus grosses claque graphique que j'ai eu en bd! Un plaisir pour les yeux à chaque page ou presque! On sent que le dessinateur prend un plaisir immense à dessiner les visages! C'est rare un tel niveau de dessin en bande dessinée, toutes époques confondues! Superbe!