de edgarmint » 19/09/2014 17:44
Cette démarche me semble précisément celle voulue par l'auteur : il ne raconte pas à proprement parler, mais il analyse son parcours, essaye de comprendre le pourquoi du comment. Après, le rendu plaît plus ou moins que le souvenir de lecture que l'on peut avoir de Pilules bleues - gné, je n'arrive plus à remettre la main dessus, ai dû le prêter... - ou du plus récent Histoire d'un couple qui sont aussi, de mémoire, un retour sur du vécu, mais en fin de compte la démarche n'est pas la même. Carnation est le fruit d'un long travail d'introspection, on sent que Xavier Mussat a véritablement trituré sa matière première, il me semble, de mémoire, qu'il y a plus de naturel, plus de légèreté dans les deux autres ouvrages cités. En caricaturant un rien, tel que c'est narré, on peut presque parler de personnages auxquels il est possible de s'identifier pour le lecteur, que ce soit dans Les pilules bleues et Histoire d'un couple, or je ne suis pas certain que l'on puisse transposer cette idée avec autant de force avec Carnation. Il n'est pour ainsi dire pas possible de s'identifier au personnage "Xavier Mussat", peut-être ponctuellement, c'est possible pour une anecdote, une idée qu'il développe, mais pas au-delà. Son cheminement à travers sa voix off va tellement dans le détail - le texte est précisément travaillé - qu'il est impossible de lire ce livre sans être conscient qu'il s'agit du cheminement d'un autre, et exclusivement de ce cheminement ; et ça demande pas mal d'attention !
J'ai comparé dans ma chronique la narration de Carnation avec celle des bandes dessinées de Fabrice Neaud, je parle là du Journal qui est aussi à caractère auto-biographique, et de Philippe Squarzoni qui sont, elles, à dominante militante (l'auteur s'y met aussi en scène, mais pas à des fins identiques). Pour ce dernier, on peux s'amuser à faire un rapprochement proche de celui que tu fais plus haut, avec un album comme Les ignorants d'Etienne Davodeau, sans doute narré d'une manière plus conventionnelle. La manière de raconter est littéralement différente, le résultat est une réussite dans les deux cas.