Bien aimé, sans être aussi dithyrambique que ubr.
A ma connaissance, c'est la BD la plus réaliste que j'ai pu lire sur la quotidien dans les campagnes portugaises (mettant à part l'Alentejo qui était un cas encore plus hardcore, mais c'est un autre sujet), entre la peur de parler en public et d'un voyage sans retour en Afrique, entre les difficultés d'emploi (le "corporatisme" sous Salazar, autre gros sujet), la faim, les conditions difficiles... Surpris qu'on n'évoque pas les enfants qui partent dans les champs pendant plusieurs mois dès 11-12 ans, coupés de leurs familles, ce qui était largement la norme à l'époque.
C'est la seule BD qui traite de manière aussi forte et intime le Salto (à comparer avec certains films documentaires de José Vieira). Evidemment, ça fait écho aux traversées que m'ont raconté mon père et mes oncles (aucune femme ne l'a fait dans ma famille). Et comme le souligne la postface, chaque traversée a son histoire, de la plus tranquille à la plus terrible.
Surpris des moments d'affection et de fraternité, plus basiquement des contacts physiques, même si ça n'est porté que par le personnage principal. C'est... comment dire... pas le genre de la maison
Pour revenir à la postface, elle est éclairante sur des aspects que je ne connaissais pas (je pense à la gestion impossible du retour des clandestins au Portugal).
Pour pinailler, quelques phrases en portugais sont bancals, sonnent pas toujours très naturels et des mots comportent quelques coquilles. Il y a également selon moi quelques anachronismes (Champigny-Sur-Marne au début des années 60 était un pur bidon ville, et un des plus grands d'Europe avec Argenteuil; le morceau de Manuel Freire plusieurs fois utilisé dans le bouquin date de la fin des années 60, c'est un morceau phare de la vague Música de intervenção, ceci dit son texte est fortement à-propos).