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Allô Cotulla, ici Le dernier cosmonaute

Entretien avec Aurélien Maury

Propos recueillis par L Gianati et L Cirade Interview 25/04/2011 à 15:30 7670 visiteurs
Son premier album, Le dernier cosmonaute (Ed° Tanibis), a illuminé notre début d'année. Rencontre avec Terrence Aurélien Maury.


Votre premier prénom est Terrence mais vous avez signé l’album du deuxième, Aurélien. Pour quelles raisons ?

Plus jeune je trouvais ça très exotique d'avoir un nom à consonance française et je pensais que ça plairait aux filles. J'ai donc pris l'habitude de signer mes dessins comme ça. Aujourd'hui, je ne sais pas si ça a tellement marché auprès des filles... Et puis c'est l'occasion de rendre hommage à mes aïeuls français (que je n'ai pas connus.)

Quel a été votre parcours artistique jusqu’à la rencontre avec les éditions Tanibis ? Comment vous ont-elles découvert ?

J'avais accumulé toute une série de dessins de vaisseaux spatiaux que j'avais faits sur le revers d'emballages en cartons (paquets de biscuits, céréales,...), et une amie de ma mère, a beaucoup insisté pour qu'ils soient exposés dans son dinner à l'entrée de la ville (chez Wendy à Cotulla, au Texas). Je n'étais pas à l'aise à l'idée de montrer à tout le monde mes dessins car je suis un garçon très timide. Un jour, elle m'a appelé, et m'a dit qu'un monsieur voulait me rencontrer, un éditeur... français. Monsieur Pinos des éditions Tanibis était, je crois en voyage aux États-Unis. C'est vraiment par hasard qu'il s'est arrête chez Wendy. Bon, il a apprécié ma petite exposition. Nous avons passé l'après-midi à parler de science-fiction et à manger des beignets. A la fin de la journée, il m'a proposé de me payer pour réaliser un album de bande dessinée.

Y-a-t-il beaucoup de vous dans l'histoire de Larry, ce jeune homme qui semble découvrir un nouveau sens à sa vie à l'aube de ses 30 ans ?

Oui, c'est un album très personnel quelque part. Je me sens très proche du personnage de Larry. J'ai eu beaucoup de difficultés à entrer dans la vie active. Je me suis beaucoup réfugié dans quelques passions très prenantes (en plus du dessin, je fais beaucoup de modèles réduits ; je collectionne aussi les vieux appareils électroniques et les revues de SF). Ça m'a protégé au début du monde extérieur, mais aussi beaucoup isolé.

L’entrée dans l’âge adulte passe-t-elle forcément par une renonciation de ses rêves d’enfant ?

Très clairement, oui. Les ambitions d'un enfant sont toujours immenses, impossibles. Enfant, on projette beaucoup d'espoirs sur les adultes et sur celui qu'on deviendra un jour. En grandissant, on apprends à se démunir de cette naïveté, et on se résigne à un destin plus modeste que ce qu'on avait imaginé. Je crois qu'on devient adulte au moment où l'on renonce, et qu'on réajuste à la baisse les folles ambitions de notre enfance, agissant ainsi de manière "raisonnable". On se trouve alors, j'imagine, d'autres projets plus accessibles, et souvent très matériels, pour compenser.

Vous êtes passionné de science fiction. Rêviez-vous, comme Larry, de devenir un cosmonaute ?

Pas exactement. Comme je me réfugiais dans les bandes dessinées, assez naturellement, j'ai eu envie de devenir moi-même auteur. La SF et l'intérêt pour l'espace sont venus plus tard.

Il est tentant d’avoir une approche quasi-biblique de cet album : on y trouve quelques inserts digne de l'imagerie liturgique, les deux personnages ont le profil du premier couple, Larry symbolise en quelque sorte l'innocence originelle. Pensez-vous que le dernier cosmonaute pourrait être le premier homme d'un monde nouveau ?

Je ne sais pas, pour moi le couple que forment Larry & Alice serait plutôt une sorte de "dernier couple", plutôt qu'une sorte d'Adam & Eve. Le monde dans lequel ils vivent est un monde déserté, vieillissant, voire moribond. Eux-mêmes sont en quelque sorte de vieux enfants : il est temps pour eux de réagir et de s'engager dans l'existence, avant d'être gagnés par l'inertie ambiante. Pour Alice, leur union est une sorte de pacte, leur dernière chance. Elle donne un sens à leur vie. Mais pour Larry, les choses sont moins claires. Le "nouveau monde" qui les attend est en demi-teinte : l'arrivée d'un enfant apportera un peu de couleur à leur vie, mais Larry aura dû renoncer à ses lubies, et sans elles, je ne sais pas comment il va pouvoir vivre plus intensément les choses. Il sera un père probablement assez passif. On peut entrevoir cet "après" dans la dernière page de garde d'ailleurs, qui constitue une sorte d'épilogue.

Votre style, très épuré, fait immédiatement penser à Clowes ou à Ware. Quelles sont vos influences graphiques ?

Je ne connais pas ces auteurs, mais leur noms reviennent souvent dans les commentaires à propos du livre apparemment. Il faut que je creuse cette question. Peut-être qu'eux aussi ont un dessin un peu dérivé de la ligne claire européenne (façon Swarte, Clerc ou même Chaland) ? La librairie de Cotulla n'est pas très fournie en matière de bande dessinée. J'y ai quand même découvert quelques trèsors qui m'ont eux marqués et continuent de m'influencer aujourd'hui comme Peanuts, Tintin ou Calvin & Hobbes. Pour ce qui est de la narration, je me sens plus sous l'influence du cinéma indépendant nord-américain, ou d'Europe du nord que directement par la bande dessinée.

Avez-vous de nouveaux projets, pour la France ou les États-Unis ?

Monsieur Pinos m'a commandé un second livre, mais pour le moment je fais une pause et me consacre à mes modèles réduits. J'ai aussi entrepris de créer mon propre orgue électronique à partir de pièces de récupérations. Comme je ne sais pas lire les schémas, c'est assez empirique.
Propos recueillis par L Gianati et L Cirade

Information sur l'album

Le dernier Cosmonaute

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