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Trop n'est pas assez : croquer la vie comme si c'était le dernier jour de son existence...

Rencontre avec Ulli Lust

Propos recueillis par F. Mayaud et Th. Pinet Interview 06/02/2011 à 14:03 5515 visiteurs
Prix de la Révélation au FIBD d'Angoulême 2011, Prix Artémisia 2011 décerné par l'association pour la promotion de la bande dessinée féminine du même nom : après deux incursions dans nos librairies hexagonales avec Pommes d’amour (collectif publié en 2008 chez Delcourt) et Airpussy (L’employé du Moi, 2009), Ulli Lust a frappé un grand coup avec Trop n'est pas assez (Heute ist der Letzte Tag vom rest deines lebens en v.o, édité par ça et là en France). Rencontre avec l'auteure autrichienne installée à Berlin, également éditrice d'artistes du monde entier sur son site, electrocomics.com.

Quand avez-vous décidé de publier cette histoire à caractère autobiographique ?

U. Lust : Tout d’abord, ce projet est arrivé alors que j’étais prête artistiquement pour m’y confronter. J’y aborde le parcours de deux adolescentes qui décident de larguer les amarres pour tailler la route. Les problèmes sociaux, les rapports entre les hommes et les femmes qui sont au cœur de ce livre sont autant de sujets susceptibles de toucher un public large. La grande question pour moi était : dois-je mettre ça sur la place publique ? J’ai beaucoup entendu qu’il pouvait s’agir d’une thérapie. En aucun cas ! En parler maintenant peut relever de la thérapie, mais il n’y pas eu d’effet catharsis lors de la réalisation. Aujourd’hui, ce livre a l’effet d’un coussin entre ce qui s’est passé et moi-même. Ce qui m’intéressait vraiment, c’était le potentiel littéraire de cette histoire. C’est pour cette raison que j’ai voulu la raconter, pas pour raconter mes problèmes ou me soigner de quelque chose !

Pensez-vous que le fait de la raconter vingt ans plus tard a modifié votre regard sur les évènements ?

U. Lust : Je suis devenu plus responsable. Aujourd’hui, j’en ris, mais je me dis aussi : « est-ce vraiment arrivé ? », « les choses se sont-elles réellement passées comme ça ? ». Mais je suis vraiment contente du résultat : c’est un beau projet artistique sur quelque chose qui s’est passé il y a longtemps.

Quelle est l’importance du contexte « punk » dans votre histoire ?


U. Lust : Son importance réside dans la fascination que j’avais pour la noirceur des choses, les criminels, tout ce qui tournait autour des stupéfiants. J’étais en opposition totale à tout ce qui pouvait paraître un tant soit peu positif : l’école, les parents. Tout ce qui se rapprochait de près ou de loin d'un délinquant était comme un ami.

Pourtant, à la lecture de votre livre, on a le sentiment que vous étiez moins insouciante que votre amie, Edi.

U. Lust : Non, Edi était très craintive, elle avait toujours ce besoin d’être avec quelqu’un, elle ne pouvait pas rester toute seule. Je ressentais moins ce besoin, j’appréciais des moments de solitude, de calme.

Aviez-vous conscience qu’en quittant « le » système, vous en intégriez un autre, pas très reluisant, fait de dépendance aux hommes ?

U. Lust : C’est un gros malentendu que j’ai déjà entendu plusieurs fois et ça m’attriste un petit peu dans le sens où ce n’est pas ce que je voulais faire passer. En forçant le trait, je pourrais dire que nous avions des relations sexuelles un peu comme nous mangions. Certains hommes donnaient de l’argent, mais nous pouvions survivre sans. L’idée que nous le faisions juste parce que nous avions besoin d’argent est fausse. Nous n’y accordions pas beaucoup d’importance.

En cultivant l’idée qu’il n’y a pas de lendemain, en vivant au jour le jour, on a l'impression que vous vous êtes forgé comme une carapace.


U. Lust : Je n’avais pas besoin d’une quelconque protection, tout simplement parce que je n’avais rien à perdre. J’étais presque une enfant, je me sentais si forte, j’avais un tel besoin de liberté, que je ne m’inquiétais pas, je n’avais pas peur. C’était totalement fou, mais aussi tellement excitant ! Aujourd’hui, je ne sais pas si je recommanderais ça à une adolescente. Je ne regrette rien, je suis juste un peu « honteuse » par rapport à ce qu’a pu ressentir ma mère. Mais, à l’époque, je n’ai pas pensé une seule seconde à mes parents. Néanmoins, je pense que c’est grâce à eux, à l'éducation qu'ils m'ont donnée, que j’ai pris conscience que j’allais trop loin, qu’il fallait que j’arrête, qu’il y avait trop de risques.

Par instants, dans votre livre, on perçoit votre sensibilité artistique, non seulement lors d’un opéra, mais aussi lors de la visite d’un musée, dans votre rapport à l’architecture, ... Comment cette sensibilité s’est-elle développée avec le temps ?

U. Lust : A quinze ans, je voulais devenir designer et je passais déjà mon temps à dessiner. Mais je ne pensais pas avoir le niveau, le talent nécessaire. J’avais la fibre, mais j’ai rapidement abandonné pour reprendre une vie normale. Aujourd’hui, j’enseigne la bande dessinée.

Actuellement, où en est la bande dessinée germanophone ?


U. Lust : Actuellement, il y a comme un frémissement : un changement est en train d’opérer. Les gens comprennent que l’on peut raconter des histoires avec des dessins, et que ce n’est pas seulement destiné aux enfants ou pour faire rire. C’est très lent, mais c’est en train de bouger, et pas seulement pour mon livre. Il n’en reste pas moins qu’aujourd’hui, peu d’auteurs sont traduits en français, il y a Jens Harder et Uli Oesterle qui furent dans la sélection d’Angoulême 2010, mais ils ne sont pas nombreux à faire du roman graphique.


Est-ce que cette sélection à Angoulême apporte une reconnaissance en Allemagne ?


U. Lust : Je ne sais pas, ça a déjà bien marché par rapport au marché existant là-bas, ce livre a vraiment reçu un bon accueil, nous en sommes au quatrième tirage. La bande dessinée n’est pas grand-chose en Allemagne où, pour ce qui est des romans graphiques, seuls existent "Maus" ou encore "Persepolis". Mais j’ai eu un très bon retour de la presse, notamment de grands quotidiens.

Quels sont vos projets ?

U. Lust : Je travaille sur l’adaptation d’un roman qui se déroule pendant la seconde guerre mondiale. C’est pour un très gros éditeur de littérature générale (Suhrkamp) qui lance une collection de bandes dessinées adaptées de grands livres de littérature allemande. Je fais partie des auteurs associés au projet.
Propos recueillis par F. Mayaud et Th. Pinet

Information sur l'album

Trop n'est pas assez

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