Philippe Druillet, c’est l’itinéraire d’un enfant de la démesure, aurait-il bénéficié de plusieurs vies à l’instar des chats qu’il affectionne ? Entre addiction et folie. Il se dit avoir été un être marginal, un jeune homme qui a peiné à s'insérer dans la société, il dit frémir à la simple évocation du mot "ordre".
En un mot : nihiliste. Il se voit en apôtre du chaos, puisque s'opposant à l'ordre... et puis bien sûr, il commence à mûrir.
Il rencontre d'autres personnes, s'attache aux gens, il comprend qu'ailleurs, d'autres gens ressentent ce qu'il ressent lui-même. Que ce sont des artistes, et qu'il en est.
Salammbô peut prendre un tour initiatique aussi séduisant qu'inattendu... le tout est dessiné dans un style unique, car du Druillet restera toujours du Druillet: écriture explosée, refus des conventions de dessin traditionnel, paragraphes et chapitres interminables, comme si l'auteur refusait d'accorder à son lecteur la moindre respiration, comme s'il voulait le voir suffoquer comme il suffoque lui-même de l'univers qu'il décrit.
Ph Druillet pourrait être mon ami. Je me suis retrouvée dans chacun de ses dessins, tableaux, esquisses au point où j'ai cru qu'il avait lu dans mes pensées. Avoir son talent. J’aurais dessiné chacune des pages. Mais un talent comme le sien est unique. Avec humour, sensibilité et folie.
Imaginez un auteur qui parvient à retranscrire le Mal sans jamais se poser en moraliste. Il sonde les profondeurs de l'âme humaine, dissèque avec jouissance la médiocrité et la corruption, mais son point de vue est quasiment absent de tout le roman. Il laisse penser les autres, les hommes normaux, les désaxés, les fous... tous ceux qui n'ont pas droit à la parole ailleurs.
Chez Druillet, c'est surtout le climat, l'atmosphère qui frappe le lecteur. C'est palpable on y est, on ressent toutes les émotions. On avale chacun de ses dessins, impossible d'en laisser passer un. Même si c'est impensable de le dévorer, on avale tout... et on en redemande.
C’est pourquoi cette exposition à la Galerie Pascal Gabert est unique et indispensable.
Comme l’indique Anne Caisson, son attaché de presse pour cette exposition, « Mais si Salammbô est un récit épique, c'est aussi une œuvre d'une grande sensualité. Une sensualité que Druillet met en valeur à travers une quarantaine de peintures figuratives rehaussées de couleurs chamarrées et présentées par la galerie Gabert. Le lecteur familier de l'univers du peintre/dessinateur retrouvera son graphisme si particulier, entre futurisme et onirisme, sur fond de décors truffés de visions spatiales et de signes cabalistiques sortis tout droit de son imagination sans limites. L'exposition dévoile une Salammbô fière et amoureuse, créature voluptueuse aux courbes généreuses. Symbole parfait de la féminité et de la fertilité, elle incarne un véritable totem, dans la tradition de la représentation de la femme depuis les origines de l'histoire de l'art. »