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[Quai des Bulles] Cubitus, le grand retour

Rencontre avec Michel Rodrigue

BDGest' (N. Stavisky) / Photo Le Lombard News 31/10/2005 à 20:28 2764 visiteurs
Cinq ans après la disparition de son créateur, le fameux toutou blanc qui apprécie autant les os qu'il déteste le chat du voisin nous revient pour de nouvelles aventures. Après Clifton, Rodrigue revient sur les pas de Dupa qu'il a bien connu et nous explique les raisons qui l'ont fait accepter cette reprise en collaboration avec l'humoriste belge Pierre Aucagne.

BDGest' : Une grande partie de la nouvelle génération des lecteurs de bande dessinée ne connait pas forcément Cubitus. Pour vous, qui est-il ?

Michel Rodrigue : Déjà, pour moi, c'est un personnage découvert au travers des pages du journal de Tintin, et qui a fait partie des 4-5 BDs qui m'ont donné envie de faire ce métier. Ensuite, la vie et le métier de dessinateur ont fait que j'ai rencontré Dupa, et qu'il est devenu un ami. Maintenant, je réalise un rêve de gosse. J'ai mon nom sur une couverture, et à côté il y a écrit "Cubitus, d'après Dupa".

BDG : Dupa et vous avez travaillé ensemble ?

MR : Non. Nous nous sommes rencontrés pour la première fois en 1996, et jusqu'à son décès très prématuré notre relation a été très forte malgré sa courte durée. On s'est tout de suite trouvés, compris, nous avions le même humour, la même façon de voir la vie. En reprenant le personnage, Pierre et moi nous sommes retrouvés devant quelque chose d'assez énorme, mais on s'y est attaqués en essayant de ne décevoir ni l'éditeur, ni le public, et surtout pas Dupa, où qu'il soit.

BDG : Qui a eu l'idée de cette reprise ?

MR : L'idée venait de l'éditeur, je n'aurais jamais eu cette prétention. Pendant un an, je me suis fait la main sur les produits dérivés, puisque Cubitus en génère énormément, mais faire un album complet c'est une autre paire de manches. On avait vraiment le trac au début, mais on s'est finalement lancé, pour dire ce qu'on avait à dire.

BDG : Les dernières "grosses" reprises, et tout particulièrement celle d'Achille Talon, ont été des échecs au niveau des fans, y avez-vous pensé ?

MR : Pas du tout. Cubitus descendait d'Achille Talon, et Dupa a été l'élève puis le disciple de Greg. Cubitus est né à la demande de Greg qui était à l'époque rédacteur en chef de Tintin et qui avait besoin d'un personnage pour faire bouche trou dans un numéro. Dupa a créé le personnage de Cubitus dans la journée. Ce qui est intéressant de voir, c'est que beaucoup de personnages qui sont aujourd'hui passés à la postérité comme Gaston Lagaffe, Achille Talon ou Cubitus sont au départ des bouche-trous. La filiation entre Talon et Cubitus est évidente, que ce soit dans l'esprit ou dans le graphisme, mais je pense que l'on peut plus faire de l'humour de nonsense et d'absurde avec Cubitus. C'est du Tex Avery. D'ailleurs Dupa était un fan de Tex Avery, et nous y avons pensé à la fin, dans la parofie d'Harry Potter, où on joue avec le format de la page, il aspire le décor, le chat se pose sur le cadre comme sur un élastique... C'est un peu comme quand Droopy court si vite qu'il en sort de la pellicule...

BDG : Ce dernier tome voit aussi l'entrée de la technologie dans les aventures du chien

MR : Ce statut de personnage du quotidien nous permet d'égratigner les travers de notre société avec ses abus de téléphone portable, ses OGM, ses radars... Les lecteurs de Cubitus ont huit-dix ans, ils sont dans un monde où Internet ou le téléphone portable font partie du quotidien. Dupa, dans le dernier album, faisait déjà quelques gags avec le portable. On ne fait qu'enfoncer le clou, ou la porte qu'il avait lui-même ouverte.

BDG : Comment travaillez-vous avec Pierre Aucagne ?

MR : Cubitus, c'est du théâtre sur papier. Les situations arrivent sans explication, on est dans une supérette puis sur une île déserte, Cubitus est César, Napoléon... La seule chose qui compte c'est le texte. C'est comme si nous avions notre petit groupe de comédiens, on distribue nos rôles et ça roule. Comme Pierre et moi avons une formation de comédiens, on se retrouve souvent à mimer. On est dans une vraie relation théâtre-BD.

BDG : Combien de tomes prévoyez-vous ?

MR : Le prochain sort en septembre 2006, nous en sommes déjà à la moitié, et je peux déjà vous dire que la parodie portera sur Star Wars.
BDGest' (N. Stavisky) / Photo Le Lombard