Les éditions Casterman en collaboration avec Arte Editions et France Inter, sortent, ce mois ci la BD issue du film. David Polonsky, le directeur artistique et dessinateur (du film et de la BD), souligne cependant que « trois ou quatre séquences ont dû être complètement transformées, et l’une d’elle éliminée parce qu’elles reposaient presque entièrement sur la bande-son ».
L’album retrace le récit d’une lente anamnèse [définition ici, NDLR], et tout concourt crescendo vers la toute dernière section du film, où la chronologie du massacre lui-même est enfin reconstituée, jusqu’à l’ouverture des deux camps et la découverte du massacre et de son ampleur. David Polonsky explique que le choix du panel des couleurs fut un travail à part entière notamment la couleur jaune/orangée qui pour lui symbolise « la guerre, la peur, un mélange de réel et de chimère, je me suis efforcé de me concentrer d’abord sur la fonction narrative de chaque image, et ensuite de n’aménager la composition de la page qu’une fois le flux de l’histoire rendu limpide. »
Si le réalisateur a fait le choix du film d’animation pour renforcer le choc, pour en accuser l’abîme, la bd, quant à elle « se doit de rendre l’histoire accessible, l’esthétique ne venant qu’en second ». Déréalisantes au possible, les images d’animation viennent renforcer en retour « l’effet de réel » des images dites, justement, « réelles ». David Polonsky n’est pas né en Israël, et n’a pas vécu cette guerre « c’est par les yeux d’Ari (Folman, le réalisateur) qu’il m’a fallu appréhender l’Histoire et en écoutant et rencontrant les anciens combattants. »
L’enjeu de cet album est, pour lui, « de toucher des publics différents. Quelque soit le pouvoir émotionnel du cinéma, le rapport intime que crée la bd permet d’emmener l’histoire dans une sphère que le cinéma ne peut pas atteindre ; la bd implique le lecteur, fait de lui une part du mécanisme qui est à l’œuvre. »
Si l’aventure BD lui a plu et qu’il se dit prêt à recommencer, il reconnait « qu’il s’agit d’un des boulots les plus difficiles [qu’il] ait eu à assurer… »
Avec une grande maîtrise narrative, l'auteur remonte le passé et fait sans cesse vaciller nos certitudes sur tous les individus qu'il met en scène. Mais a-t-on toujours les bons éléments pour pouvoir juger ? Et la mémoire ne peut-elle pas, elle aussi, vaciller ? On pourrait se demander si Valse avec Bachir, la BD, est une oeuvre ou un produit dérivé. Une oeuvre : l'album prouve que l'émotion induite par l'animation 3D et les salles obscures est tout aussi tangible sur papier.