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Psikopat numéro 200 !

Jérôme Briot News 10/07/2008 à 02:35 8575 visiteurs
Lancé dans les années 1980, avec une première série intitulée "Le petit Psikopat illustré", puis faisant sa véritable entrée en kiosque sous le nom définitif Psikopat, ce magazine de bandes dessinées d'humour fête actuellement son 200ème numéro.

Le numéro-événement, disponible jusqu'à fin août, propose 212 pages de bande dessinée, dessins de presse, nouvelles et textes d'humeur. Cela, dans un format avec dos carré et un cahier en couleurs, démarche inédite pour ce magazine qui est un des derniers défenseurs du noir et blanc. Blanquet, Edika, Pixel Vengeur, Carali, Lefred Thouron, Crumb, Mélaka, Rifo, Ivars, Isa, Phil, Neidhardt, Mo/cdm, Olivier Ka, Coudray, Fabcaro, Lécroart, Bouzard, Léandri... et d'autres encore, sont au sommaire de ce numéro, qui propose (c'est de saison !) un dossier thématique sur les Jeux Olympiques – et par ricochet, sur la politique chinoise. Différents jeux et concours sont également proposés, avec à la clé 200 abonnements (dont 20, à vie !).

Belle occasion de discuter avec Paul Carali, fondateur et rédac-chef du magazine, autant qu'auteur prolifique dont un nouveau volume des Contes d'un conteur est sorti au printemps à La boîte à bulles.




Revenons aux origines du Psikopat : que faisais-tu avant de lancer Le petit psikopat illustré en 1982 ?
Paul Carali : En 82, je bossais pour Hara Kiri, Charlie Hebdo et Charlie mensuel, pour lequel je dessinais mes premiers Contes d'un Conteur, inspirés des Milles et une nuits. J'ai lancé le Psikopat quand Charlie Hebdo (ancienne formule) s'est cassé la gueule.

Edika est ton frère ainé, et pourtant c'est toi qui signes Carali. Il s'était déjà choisi un nom de plume avant que tu te lances dans la carrière, ou c'est toi qui as été le premier à publier des dessins ?
C'est moi qui ai commencé, quand Edika est arrivé, le nom de famille était déjà pris, huhuhuhu.

Pourquoi avoir créé Le Petit psikopat illustré ? Et d'où vient ce nom ?
Je voulais un titre hors normes, un peu provo, un peu choquant et finalement, il est bien à l'image de ce qu'on publie. Mais tout a commencé par une rubrique de deux pages "Le petit Psikopat illustré" dans l'Echo des Savanes, dans les années 77-78. A l'époque, on me disait souvent que je délirais à bloc dans mes dessins, ça doit venir de là, je pense.

Peux-tu raconter l'anecdote du numéro du Psikopat avec un trou ? Désolé si c'est pour la 10.000ème fois, fallait pas avoir des idées à la con comme ça !
C'était dans le tout premier Petit Psikopat Illustré, en 1982 je crois. On avait eu l'idée d'y faire un trou. Le tirage était de 3000 exemplaires. J'en ai eu des ampoules sur les mains. J'ai fait ça chez mon imprimeur, sur les grosses rames de feuilles à plat, avant le pliage et le brochage, avec un emporte-pièces, un appareil pour faire des trous dans le cuir. Galère. Plus jamais.

Le petit psikopat illustré devient Le Psikopat vers 1988 ou 89. Il démarre alors comme mensuel, petit format dans un premier temps, et prend le grand format à partir du numéro 9. A cette époque, Fluide Glacial est encore dirigé par Gotlib et Diament, et un certain nombre d'auteurs participent aux deux magazines : Edika, Goossens ou Hugot, par exemple. En quoi l'intention éditoriale du Psikopat est-elle, à l'époque, différente de celle de FLuide ?
Il y a toujours eu un côté plus trash dans le Psiko que dans Fluide. C'est juste une question de goût personnel. Et puis, j'aime bien le dessin de presse et la politique, ce qui n'est pas la démarche de Fluide.

A la même époque, tu édites toute la bande qui va fonder la future "Association" : Menu, Killoffer, Trondheim, Konture... (Et quelques autres déjantés, comme Schlingo ou l'irrésistible G. Shelton). Dans l'histoire officielle de L'Association, on entend souvent parler de la revue Labo (éditée par Futuropolis époque Robial), mais rarement du Psikopat. Une raison à ça ?
C'est à eux qu'il faut poser la question. Nombreux sont ceux qui ont débuté au Psiko et qui font maintenant une bonne carrière. Parmi ceux-là, j'en vois de tout, des reconnaissants, des ingrats, des méprisants, des qui ont pris le melon, voire la pastèque... et d'autres, souvent les moins aigris et les plus talentueux qui sont restés aussi sympas qu'à leurs débuts, mais ceux-là sont rares... ils se reconnaîtront. La liste est parfaitement claire dans ma tête, j'ai les noms, comme disait Coluche. En règle générale, c'est les moins talentueux qui ont honte de leurs débuts. On ne peut pas leur en vouloir. Le Psiko sera toujours ouvert aux nouveaux dessinateurs qui se cherchent encore, et tant pis pour ceux qui trouvent cette démarche "amateur", je les emmerde grave.

Le magazine est ouvert aux jeunes auteurs... mais pas à n'importe quoi, j'imagine. Tu refuses beaucoup de projets ? Quels sont les critères de sélection ?
On reçoit énormément de propositions. Faut déjà que le dessin soit bon, c'est l'accroche, sinon le lecteur passe outre, même si le scénar est génial.

Il y a un cahier couleurs dans le numéro 200. Tu envisagerais de basculer le journal tout en couleurs ?
Non, Y a trop de couleurs partout, j'aime bien la BD en noir et blanc. On va juste garder la deux et trois de couv' en couleurs.

Il y a quelques années, tu avais ta propre structure éditoriale : Zébu édition. Pourquoi l'avoir mise de côté ? Et qu'est-ce qui t'a fait choisir La boite à bulles plutôt qu'un autre éditeur, pour s'occuper de tes livres dorénavant ?
On ne peut pas tout faire, l'édition d'albums est un métier à part, la diffusion, un autre circuit que celui de la presse que je connais bien. Et j'ai maintenant beaucoup plus de temps à moi, à consacrer au dessin et à la musique. La Boite à Bulles est une jeune structure qui monte (huhu), je suis ravi de faire partie de leur aventure.

Tu pratiques ordinairement un humour assez violent, avec pas mal d'agressivité chez tes personnages, autant physique que verbale. Et puis il y a Paulo à la ferme, dans une logique peace & love complètement opposée... D'où vient cette soudaine quiétude ?
Oui, je sais, je suis un faux méchant. Et j'ai toujours bien aimé exploiter des terrains nouveaux, explorer mes facettes. Pour le lecteur, c'est très déroutant un auteur non rectiligne. J'ai fait du trash en BD, des contes, du cul, des conneries en tout genre, avec plein de personnages très différents les uns des autres : Le docteur Tutut, Aimé, Marie-Paule, Omar Goulin, René Flapahoga, Paulot, et j'en oublie, mais j'aime aussi le dessin de presse, l'actu et la politique... avec tous mes éditos du Psiko, on ne peut pas m'accuser de manque de transparence dans mes opinions politiques et autres. J'ai jamais pu m'atteler à une série à long terme, au bout d'un moment, je m'y emmerde, faut que je passe à autre chose...



Entre 1982 et 2008, de nombreux titres sont apparus, et ont disparu des kiosques. En 26 ans, plusieurs générations de lecteurs se sont succédé, qui n'ont pas forcément les mêmes attentes... Il y a une recette de longévité du Psikopat ?
J'ai une potion magique, mais la recette, je me la garde...!


Liens :
» Site du Psikopat
» Site de Paul Carali


Propos recueillis par
Jérôme Briot