S
ur les eaux gelées d’un lac du Nord, les hommes s’affrontent encore et encore. Toutefois, aujourd’hui, un battement lancinant étouffe le tumulte des combattants qui entre-tuent…
Fluide sur les courbes d’une déesse impudique, puissant dans les combats sanguinaires, superbe sur les paysages enneigés, le trait de Robin Recht impose sa marque. Violent, oppressant, épique, grandiose, les adjectifs manquent pour qualifier cet album. Mais au-delà de l’esthétique, dans l’immersion graphique que constitue cette lecture naît une forme d’exaltation. La Fille du géant du gel exhale l’enivrant parfum du désir, répand les relents des cadavres des vaincus, enivre de l’air pur et glacé des cimes de l’Odroerir ou sature les sens des effluves de sueur et de sang mêlés. Rares sont les albums qui procurent une telle sensation de mouvement, une telle fluidité dans leur narration ! Cependant, à bien y regarder, le pitch est des plus ténus : sur fond de cosmogonie nordique, un mercenaire sans état d’âme succombe aux charmes d'Atali, sorcière espiègle et flamboyante et défie les dieux pour jouir pleinement du repos dû aux guerriers. Du classique, mais pas du convenu, puisqu’avec cette variation de la Belle et de la Bête, Robin Recht projette son récit dans les ténèbres d’où surgit Ymir et pour la gloire duquel les Vanirs ou les Aesirs maculent la blancheur hivernale.
Avec La Fille du géant du gel, Conan le Cimmérien entre dans la légende du Nordheim et un peu plus dans celle du 9e Art.
C'est le Conan le plus érotique que j'ai pu lire jusqu'ici. A vrai dire, je ne m'y attendais pas et c'est tant mieux. On se souviendra longtemps après de cette fille du géant de sel.
On sait que Conan est un véritable guerrier un peu sauvage dans son genre. Il va se battre jusqu'au bout. Pour autant, parfois, il n'a pas que des guerriers en face de lui ! Il existe des menaces plus subtiles, plus charmantes et également plus sournoises. C'est la fille du géant de sel qui se dresse sur sa route au milieu d'un lac gelé.
Il la traite de sorcière mais il s'agit en fait d'une belle déesse qui sait ce qu'elle veut. Le désir devient à la fois violent et presque poétique.
J'ai bien aimé cette vision de Conan qui est assez inédite. L'auteur de la BD à savoir Robin Recht a pris le temps de raconter une histoire assez simple dans le déroulé. Il restitue une puissance du récit à faire frémir d'extase.
Graphiquement, il y a des effets de mise en scène absolument superbes et des planches de toute beauté. J'ai adoré car on ressent véritablement les battements de cœur de Conan. C'est du grand art incontestablement d'une splendeur inégalé. Le meilleur de la série consacré au cimmérien ! Bravo à l'auteur qui produit là un chef d’œuvre du genre !
Après la fabuleuse version du toujours bon duo Toulhoat/Brugeas, Robin Recht nous propose un volume assez personnel, extrêmement graphique, dont le scénario est plus un concept qu’une histoire. C’est la concrétisation graphique de grands schélas mythologiques qui intéresse l’auteur, donnant une liberté absolue dans la personnification de la féminité, de la relation homme/femme, de la virilité rageuse des guerriers du Nord et jusqu’au divin.
Ayant opté pour la version grand format noir et blanc cet aspect est encore renforcé puisque l’on se retrouve dans un travail artistique très poussé, uniquement de contrastes et d’expérimentation de textures, proche de ce qu’à pu proposer un Frank Miller sur 300 par exemple. Résultat de recherche d'images pour "la fille du géant de gel recht"Sur un champ de bataille il ne reste plus qu’un homme debout, un colosse brun, un cimmerien. Comme à chaque fois la fille du géant de gel vient chercher ce héros pour le sacrifier à son père. Elle est nue, belle, Conan la pourchasse mais elle semble inatteignable, à travers la neige et la montagne. Ce jeu du chat et de la souris est celui d’une déesse face à un humain. Mais la fin de cette histoire est-elle vraiment inéluctable?… Après ma lecture je ne regrette pas cette version superbe, un magnifique boulot de Glénat et de l’auteur. Pourtant les couleurs que je trouvais un peu passées donnent une lisibilité à ces planches et je dirais malheureusement que les deux versions ne sont pas superflues pour ceux qui aiment suffisamment ce dessinateur. D’une lecture très rapide puisque le récit est essentiellement graphique, la fille du géant de gel vaut le coup. Notamment pour le travail sur le texte graphique, ce qu’on appelle onomatopées mais qui prend ici une véritable dimension visuelle, partie prenante du dessin, presque organique. L’album de Robin Recht n’est pas un récit épique mais plutôt un concept mythologique, comme un artbook expérimental, le lâcher prise d’un auteur qui a mis beaucoup d’envie dans son travail.
Lire sur le blog:
https://etagereimaginaire.wordpress.com/2019/03/23/bd-en-vrac-5
Un album érotique.
La nouvelle concernée souhaite mettre en avant la force brute, sauvage et sexuelle de Conan.
La vision de Conan plus fort qu'un dieu ne me convainc pas, même si le travail de Robin Recht est bon pour son adaptation.
Gros bémol pour ma part, l'ouvrage se lit très rapidement.