1931, la célèbre université de Miskatonic envoie une expédition scientifique sur le continent Antarctique. Très vite, le professeur Lake s'emballe à la vue de schistes précambriens présentant, selon lui, des stries faites par une forme de vie géante. Ce serait une découverte majeure. En effet, le Protérozoïque ne connaît que des fossiles simples, l'explosion de la vie démarrant au Cambrien. De plus en plus fébrile, le géologue finit par se séparer du camp principal pour suivre son idée et explorer une étrange chaîne de montagnes qui cache les traces d'une civilisation au-delà de l'espace et du temps.
Les Montagnes Hallucinées, intégrale en deux volumes, marquent le lancer de la nouvelle collection "Les chef-d’œuvres de Lovecraft" par Ki-oon, et quel coup de maître, en se faisant nominer dans la sélection d'Angoulême.
La première chose à souligner est la qualité de l'édition, format luxe, avec sa couverture en simili-peau en clin d’œil à tous les ouvrages anthropodermiques du Mythe, et sa gravure foisonnante. Adapter Lovecraft et ses monstres indicibles, indescriptibles, est un art difficile que Gou Tanabe relève avec brio. Par moments, ses planches se font eaux fortes, peintures asiatiques traditionnelles, quelque part entre Gustave Doré et Shitao, avec une maîtrise du dégradé d'encre et des détails, dévoilant des paysages non-euclidiens et des êtres surprenants. Il est juste regrettable que le format manga ne soit pas le mieux adapté, car ses dessins mériteraient une édition hors norme, comme cela se fait pour des titres franco-belges qui présentent les pages à nu pour les amateurs de beaux traits.
Le scénario respecte le rythme lent qui mène vers l'horreur, en posant des figures rationnelles, qui peu à peu basculent avec l'excitation des découvertes, les phénomènes météorologiques qui jouent avec les sens, puis la folie, fin quasi obligatoire avec la mort de la plupart des héros lovecraftiens. Il est cependant facile de prendre la route avec les personnages, de prendre goût à ce jeu de piste scientifique, dans ce récit d'aventure qui était à la mode au XIXe siècle et au début du XXe.
Un incontournable pour les amoureux de Lovecraft et à recommander sans hésitation pour un public adolescent ou adulte, sensible au genre.
Une belle adaptation de l’œuvre de Lovecraft, illustrée dans un format original avec une couverture imitation cuir, exceptionnelle.
Les Montagnes hallucinées de Gou Tanabe, sont pour moi presque une réussite.
Le suspense, l’angoisse montent progressivement au fil des pages. Par contre, les planches au début posent problème, le trait du dessin de Gou Tanabe trop détaillé, trop sombre rend les vignettes un peu confuses. Heureusement, dès l’arrivée des Anciens, cela s’améliore un peu.
Un bon premier tome dans l’ensemble, je me lance sur la suite.
Dès sa parution, « Les montagnes hallucinées » m’avait tout de suite intéressé. Mais n’étant pas trop manga, j’ai longuement hésité. La sortie des coffrets, particulièrement bien présentés, m’a convaincu de sauter le pas. C’est peu dire que je ne le regrette pas ! Avec les couvertures en simili cuir, la prise en main souple et confortable invite à tourner les pages. Ensuite, le dessin est magnifique et parfaitement adapté à ce récit à l’ancienne. Il retranscrit à merveille l’ambiance de ces aventures improbables, mélangeant sciences, mystères, horreur et mythologie. Même si l’histoire est assez peu approfondie, elle incite à l’indulgence et reste palpitante. Avec Gou Tanabe, Lovecraft a trouvé un interprète à sa mesure.
Lire Lovecraft est déjà quelque chose de particulier, mais le lire à l'envers :-) une gageure et une expérience qui ne laisse pas indemne! J'ai beaucoup aimé les 2 tomes, même si j'ai personnellement une préférence pour le style de Alberto BRECCIA qui rend encore mieux l'atmosphère "indicible" des "remugles méphitiques des abîmes sans nom" ;-)
Une vraie réussite à mes yeux. Pourtant le pari est osé : représenter en noir et blanc le récit de Lovecraft sur une expédition en Antarctique qui vire au cauchemar. Le dessin est parfaitement maitrisé, sombre comme il faut, et Gou Tanabé (que je ne connaissais pas) parvient à distiller l'angoisse au fil des pages. Cela monte progressivement, en prenant son temps, grâce à de magnifiques planches (notamment les paysages en double page sans texte), un graphisme précis et expressif, et un vrai sens du rythme .
Evidemment, il faut aimer ce genre de récit d'angoisse, mais dans le genre, c'est parfaitement maîtrisé et je me suis laissé emporter. Bravo.
Mention spéciale aussi sur la couverture souple en cuir du livre, vraiment réussie. Et j'ai pré-commandé le tome 2 dans la foulée, c'est dire.
4/5 : à lire vraiment.
5/5 si vous êtes amateurs de Lovecraft ou de manga.
Ce manga montre combien un bon travail d'édition met le lecteur dans d'excellentes conditions avant même d'entamer la lecture. Un peu comme une belle illustration de couverture... Ki-oon a sorti la grosse artillerie avec une superbe couverture simili-cuir en effet gravure. Une court bio de l'auteur et de Lovecraft, une introduction au roman original At the mountains of madness, un sommaire et quelques citations en anglais de nouvelles d'Edgar Poe (dont Arthur Pym) pour mettre dans l’ambiance. L'édition respire le respect et mérite un Calvin. Qu'en est-il du manga lui-même?
En 1930 une très importante expédition de l'Université Miskatonic part pour l'Antarctique, équipée d'avions et du matériel dernier cri. Ils vont étudier la géologie et la biologie d'un continent découvert mais pas encore exploré. Très vite les découvertes apportent des révélations improbables au niveau des datations et l'ambition de l'une des têtes de l'expédition pousse à séparer les équipes. Lorsque l'équipe Lake ne donne plus signe de vie après le passage d'une redoutable tempête le reste des hommes part à leur secours et vont découvrir l’indicible...
Gou Tanabe n'a pas une grosse bibliographie mais a commencé à se spécialiser depuis quelques temps dans les adaptations de classiques, dont Lovecraft. Il n'est pas le plus technique ni le plus impressionnant des dessinateurs japonais. Pourtant son style réaliste colle avec l'atmosphère résolument classique qui sied aux histoires d'aventures fantastiques de l'époque. La première approche est décevante tant le dessin semble avoir été vu mille fois et le récit d'expédition antarctique nécessite un plus graphique ou scénaristique pour se démarquer. Le rythme des histoires fantastiques est progressif. Celui des Montagnes hallucinées également: après une longue mise en place à la lecture difficile du fait de l'utilisation de trames grossières et du manque de précision du dessin, les premières accélérations de l'intrigue ouvertes par la découverte de strates géologiques à la datation impossible font monter la tension et le rythme cardiaque du lecteur... qui ne décroche plus jusqu'à la fin. Le prologue avait annoncé l'horreur. L'intérêt du manga repose sur l'accumulation de découvertes toutes plus improbables les unes que les autres. Le principe du hors champ et du jeu sur l'anticipation du lecteur fonctionne très bien: l'auteur déroule cliniquement les découvertes des scientifiques et le lecteur s'attend à chaque page à voir surgir un monstre...
Le mythe de Cthulhu est toujours aussi fascinant dans son jeu des impossibilités scientifiques entraînant à la folie. Dans ce premier tome il n'est pourtant pas question de déviances mentales puisque jusqu'à la découverte macabre du campement (totalement gore et horrible) nous ne faisons face qu'à des constatations rationnelles. L'équipe reste au pied des Montagnes de la folie, que l'on abordera dans un second volume.
Étrangement les limites du dessin de Tanabe, qui posent problème sur les premiers chapitres, apportent un plus dès l'arrivée des Anciens. L'impossibilité physique à représenter ces êtres indicibles (j'adore le vocabulaire hypertrophié de Lovecraft!) est très bien reprise par des dessins sombres, présentant des enchevêtrements impossibles à comprendre visuellement. C'est perturbant mais sert totalement le propos; on imagine dès les pages montrant par mirage la cité cyclopéenne ce que sera le tome deux.
Très respectueux de l'oeuvre originale (sans doute trop), Gou Tanabe sait faire tenir la tension de son scénario en montant progressivement vers l'horreur brutale. Avec un dessin plus précis et moins sombre l'on aurait gagné en qualité mais l'ouvrage réussit à être une très bonne illustration du texte de Lovecraft et fascine lorsqu'il s'agit de représenter ces Anciens.
Lire sur le blog:
https://etagereimaginaire.wordpress.com/2018/11/26/les-montagnes-hallucinees-1