L
a Bête Noire, tout le monde le connaît. Chanteur à succès, sauveur (à plusieurs reprises) de la planète, aventurier et même philosophe, il fait l’unanimité de Krković à Shadananda. De plus, certains murmurent qu’il serait un des piliers de la terre, un de ces gardiens qui maintient l’équilibre des choses. Qui sait ? En tout cas, il « rock » !
Fable en provenance des Balkans, 5inq âges de la vie avait marqué ses lecteurs lors de sa parution en magazine du côté de Zagreb il y a quelques lustres déjà. Les éditions Inukshuk ont pris l’initiative de proposer une traduction française de ce conte mêlant récit initiatique, ésotérisme de bazar et humour décalé. Darko Macan (Marshal Bass) a puisé dans l’imaginaire croate (cf. le dossier déjanté en fin d’ouvrage) pour raconter cinq moments critiques de la vie de son héros fuligineux. Chronologie explosée, symbolisme de façade et références plus ou moins obscures – chaque section est introduite par des extraits de textes littéraires -, la narration va dans tous les sens. Les amateurs de Mœbius, José Roosevelt ou Andreas devraient se retrouver dans les circonvolutions de ce scénario aux ramifications insoupçonnées. Pour autant, l’ensemble se montre complètement cohérent et parfaitement maîtrisé.
Graphiquement, Milan Jonanović (Carthago) se cherchait encore quand il a illustré ces pages et tous les chapitres ne présentent pas le même aboutissement tant au niveau du dessin pur que de la mise en page. Néanmoins, ces petits défauts ne sont pas gênants et se fondent bien dans l’anarchie temporelle revendiquée de l’album. Nettement plus intéressante et aboutie, la manière avec laquelle le protagoniste principal est dépeint. Sur ce plan, le dessinateur arrive avec un talent certain à donner une réelle personalité ainsi qu’à rendre tangible les émotions de cette silhouette de charbon.
Surprenant à tous instants, à la fois drôle et grave et finalement rempli de sagesse, 5inq âges de la vie s’avère être une pépite originale et étonnante.
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