L
e commandant a dit : c'est un grand jour aujourd'hui ! Après plusieurs mois d'entrainement, Samy et ses camarades vont mettre en pratique les leçons apprises dans la jungle et les meilleurs seront récompensés. Pister et attraper un animal ? Non. Allumer un feu ? Non plus. Quoi alors ? Comment massacrer tout un village à la machette, sans distinction ni d'âge, ni de sexe. Mais Samy ne sait pas jouer à la bête sauvage et sanguinaire. Pourtant, s'il veut survivre parmi les lions, il va devoir le devenir.
Comme l'avait fait récemment le percutant Teddy Bear, L'envers des nuages aborde le sérieux problème des enfants soldats, à la différence que le premier se focalise sur l'histoire d'un seul garçon alors que le second y juxtapose le travail et l'implication des bénévoles, le mettant ainsi en valeur. Frédéric Richaud partage ainsi son intrigue en deux visions : celle d'un jeune Africain victime des rafles de milices rebelles et celle de Florence Akerman, reportrice dépêchée par le CICR (Comité international de la Croix-Rouge). Attention, le traitement s'avère très réaliste, sur le fond comme la forme. La violence s'affiche sans ménagement, puisque c'est ainsi que va le monde. L'emprise psychologique des chefs, le harcèlement qui vise à transformer ces orphelins encore innocents en petits guerriers sans cervelle est explicite. En contre-point, L'action des volontaires guidés par leur cœur parait certes nécessaire et pourtant bien dérisoire, un être sauvé pour combien de perdus ? Néanmoins, ces destins se rejoindront dans un final empreint d'un positivisme salvateur dans cet univers brutal. Un dossier à la fin de l'ouvrage revient en détail sur les objectifs complexes du groupe, complétant utilement le sujet.
Le dessin de Rafael Ortiz ne joue pas la carte de l'esthétique et préfère celle de l'authenticité. Son trait dur d'épaisseur irrégulière et les aplats noirs sans dégradé génèrent une sévérité dans le ton du récit. Les scènes difficiles impactent la rétine, tout comme les expressions des visages, fortes.
Veiller au respect du droit humanitaire, en particulier en ce qui concerne la protection et le bien-être des enfants, telle est la lourde mission du CICR. Une goutte d'eau dans la mer de sang versé au nom quoi de direz-vous ? Peut-être, mais c'est mieux que de s'indigner devant la télé.
Le thème de cette bd a pour objet les enfants-soldats en Afrique. C'est vraiment horrible de la part de ceux qui les utilise contre l'armée régulière de leur gouvernement pour les faire tomber dans la violence et le sang. On peut comprendre qu'il y ait autant de réfugiés à travers le monde pour fuir de pareille atrocité. Cependant, le problème doit se résoudre dans ces pays qui doivent retrouver paix et stabilité.
Cette fiction est inspirée malheureusement de faits réels et publiée avec le parrainage du Comité International de la Croix-Rouge (CICR). Le point de vue de ce drame est de mettre en avant l'engagement des humanitaires occidentaux sur place qui se débatte pour sauver des vies. Certes, il y a bien entendu la condition des enfants soldats et la manière dont ils sont endoctrinés pour servir. Certaines scènes sont réellement atroces et cette bd ne sera pas à placer entre toutes les mains.
Pour le reste, je suis convaincu de l'utilité d'une telle oeuvre pour faire progresser l'humanité à travers le monde et notamment en Afrique noire qui en a grandement besoin.
Un album fort, utile, marquant.
Pas de fioritures, et une qualité trop rare dans ce type d'albums, à la vocation pédagogique et journalistique : on ne s'ennuie pas une seconde. Hélas, pourrait-on dire…
Un scénario simple, mais solide, un dessin réaliste qui aident tout deux à faire passer le message, et envie de se lever.