T
out le monde connaît la légende du comte Dracula. Mais avant d'être ce vampire craint de tous et quasi immortel, quel petit garçon était-il ? Et si tout n'avait pas été tout rose pour lui ?
En moins de dix ans, Loïc Clément s'est imposé comme un auteur de récits jeunesse qui compte avec quelques pépites comme Le temps des mitaines, Chaussette ou encore Les jours sucrés. Associé à Clément Lefèvre (L'épouvantable peur d'Épiphanie Frayeur avec Séverine Gauthier au scénario ou Susine et le Dormeveil avec Enna Bruno), il s'attaque à un sujet épineux, le harcèlement scolaire.
Pour ce faire, le scénariste n'a pas choisi un personnage au hasard, dans un double intérêt. D'une part, exploiter pleinement les talents graphiques du dessinateur pour les univers sombres et fantastiques tout en plaçant l'intrigue dans un cadre réaliste (l'école comme les relations entre les élèves n'ont rien d'irréel). D'autre part, Dracula est connu de tous mais surtout, le vampire est l'image type du personnage fort et craint. Pourtant, lui aussi va subir les moqueries de ses camarades. Et c'est en cela que l'angle choisi est pertinent, tout le monde peut être concerné. Il désamorce le sentiment de culpabilité qui peut s'emparer des enfants à qui cela arrive. Mais l'auteur ne s'arrête pas là et balaie tous les états par lesquels peuvent passer les victimes : l'isolement, la honte, la difficulté à verbaliser et donc le silence, mais également l'incompréhension des adultes - ceux qui ne voient pas ce qui se passe comme ceux qui ne le comprennent pas ou minimisent la situation.
Narrée en voix off, l'histoire de ce petit garçon (presque) comme les autres se lit d'une traite, aussi bien par les petits (le choix de la typographie et de la forme des bulles est judicieux) que par les plus grands. Une construction intelligente, progressive et positive ; chaque étape du cheminement est bien décrite jusqu'à la conclusion, qui ne tient pas de la vengeance et ne comporte pas d'intervention extérieure. C'est par une prise de conscience et en (re)trouvant la confiance en lui que le jeune héros puisera les ressources pour résister. Bien aidé par son père, puis sous le regard des adultes une fois le harcèlement connu, mais sans violence ni méchanceté, il va vaincre ses démons et ses tortionnaires avec subtilité et courage.
Aussi joli que fin, Chaque jour Dracula aborde un sujet souvent tabou et difficilement décelable pour les parents. Un album qui s'avère être à la fois une excellente lecture tous publics en plus d'être un support utile pour prévenir le harcèlement scolaire et amener nos progénitures à s'ouvrir si elles sont confrontées à ce fléau.
Poster un avis sur cet album