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esdames et messieurs, bonsoir. Le duel auquel vous allez assister s'annonce tendu. À gauche, Nico qui vient de rencontrer Aude et à gauche, Maria, son amie d'enfance. Les deux personnalités vont s'affronter jusqu'à l'aube et mettre à rude épreuve leur nerfs, leurs liens, ainsi que leurs sentiments l'un envers l'autre. Qui aura le dessus en assénant l'uppercut décisif ? Qui aura raison de la résistance de l'adversaire ? Entre coups bas, franchise et mauvaise foi, tous les moyens sont bons mais la victoire pourrait être amère...
Après ses recueils autobiographiques, le coquin Jeanne et le jouet formidable et le sérieux Udama, Zelba aborde dans Clinch un thème complexe et ô combien intemporel : les limites fragiles, subjectives et controversées entre l'amitié et l'amour. Pour enrichir et dynamiser cette ligne scénaristique ultra simple, l'auteur utilise une construction originale en usant de la métaphore d'un combat de boxe en huit rounds, interrompu par les commentaires de trois idoles de Nico (Tom Waits, Lou Reed et Robert de Niro) ayant chacun parié sur le vainqueur potentiel. D’ailleurs, le récit est régulièrement ponctué de petits clins d’œil à la culture underground. La légèreté et l'humour font progressivement place, au fur et à mesure des joutes oratoires et corporelles, à un ton plus sérieux traduisant l'avancée dans la mise à nu des émotions et des egos. Le corps ne ment pas, il exprime les évidences niées par l'aveuglement de l'esprit et l'anesthésie de l'affect. Les quelques scènes sensuelles sont relativement naturelles et jamais ne tombent dans la vulgarité. Au final, Zelba pose un regard dur, tendre et juste sur ce couple qui n'en est pas un, mais pourrait l'être. S'ils savent se révéler un peu agaçant dans leur obstination, ils sont tout autant attachants dans leurs faiblesses ; de quoi raviver probablement quelques souvenirs chez le lecteur.
Légèrement caricatural, le dessin de l'artiste s'avère très agréable et écarte le danger de la monotonie du huis clos grâce à l'expressivité des protagonistes et la variété des cadrages. Le travail du noir et blanc s'avère bien géré, accordant relief et texture aux illustrations. Le bleu pastel s'invite dans les interludes oniriques et l'évocations du passé, accordant une petite note nostalgique et sensible, parfaitement dans le ton.
«Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point.» Le temps d'une nuit, Zelba met face à face deux êtres empêtrés dans leurs contradictions et leur aveuglement. Ils s'aiment, se détestent et se testent. Une belle performance qui renouvelle le genre, en toute sincérité.
(blog : http://zelba.over-blog.com)
Une Bande dessinée subtile et prenante, toujours sur le fil de l'émotion. Zelba réussi à nous entraîner dans un huis clos passionnant en nous rendant spectateur d'une joute amicale/amoureuse dont personne ne sortira indemne.
Une vraie réussite ! A lire absolument !