Chaussette

M erlin connaît tous ses voisins comme s'ils étaient de sa famille. Enfin, surtout Chaussette et Dagobert son chien, qu'il observe si souvent. Aussi, lorsque la vieille dame change d'attitude, il comprend tout de suite que quelque chose ne va pas...

Anne Montel et Loïc Clément signent ici leur cinquième collaboration (Shä et Salomé, deux tomes pour Le temps des mitaines et Les Jours Sucrés).

La première au dessin dans son style si doux, au trait rond et léger et aux couleurs pastels. La mise en page où les (bonnes) idées sont légions, est simple mais étudiée pour contribuer efficacement à la narration tandis que le lettrage est idéal pour être accessible aux lecteurs les plus jeunes. Un plaisir visuel à chaque planche.

Loïc Clément lui a concocté une histoire entre conte et réalité. Avec le talent qui est le sien, il rend rapidement attachant ses personnages, les principaux comme les secondaires. Le scénariste du récent Voleur de souhaits (avec Bertrand Gatignol) articule son récit en deux temps. Tout d'abord, le quotidien de la retraitée : sa drôle conduite et surtout sa promenade journalière accompagnée de son animal, sont un prétexte à tous les soupçons, tous les fantasmes pour Merlin. Puis, très vite, l'enfant doit réviser son jugement lorsque la vie et sa dureté font leur apparition et que le deuil, la perte de repères et les épreuves que l'on traverse sans même que son entourage - plus ou moins proche - ne s'en aperçoive sont habilement traités. L'intérêt n'est pas tant dans « la révélation » - qu'il est aisé de pressentir - que dans la réaction du jeune garçon et le regard tendre porté sur la relation naissante entre lui et Josette. Sans tomber dans le mélodrame ni la leçon de morale, la conclusion, poétique, parvient ainsi à redonner le sourire en rappelant l'importance du dialogue et du partage dans nos sociétés individualistes.

Chaussette installe un peu plus un duo d'auteurs dont chaque sortie est une réussite. À la fois touchant et fin, cet album offrira aussi l'occasion d'aborder en famille l'isolement des personnes âgées et la mort, ainsi que l'importance de ne pas vivre ces souffrances seul, s'ouvrir aux autres et partager ses émotions, quelle qu'elles soient.