Rôles de composition

N oémie et Colette se fréquentent depuis quatre ans. Sur internet, la première croise Anna, une comédienne berlinoise. Elles se donnent rendez-vous dans la capitale allemande, mais à son arrivée la jeune Québécoise apprend que sa nouvelle flamme est en France pour quelques jours. L’histoire est donc celle de deux triangles. Le premier entre trois femmes, le second entre Montréal, Berlin et Paris. L’ouvrage se présente par ailleurs comme un collage de scènes évoquant les principales étapes de la vie d’un couple : séduction, sexualité, amour, complicité, adultère, rupture, regrets et pardon.

Les ressorts dramatiques de cette comédie romantique, pimentée d’intermèdes érotiques, rappellent ceux de Woody Allen : tensions conjugales et familiales avec en toile de fond le milieu des arts. Dans l’ensemble, rien de bien nouveau chez Jimmy Beaulieu… et rien de bien nouveau dans le monde du marivaudage. L’album se lit tout de même agréablement. L’étude de mœurs est bien menée, les personnages sont réalistes et attachants. Ils illustrent bien leur époque et leurs destins sont crédibles.

Les dialogues de ce livre souffrent d’un mal étrange. Bon chic bon genre, les amantes interagissent fréquemment dans un français soutenu, mais à d’autres moments adoptent les mots d’ouvrières frustes. Le récit est par ailleurs truffé de paroles tirées de chansons anglophones. Bref, le lecteur passe constamment du français au québécois et à l’anglais, il a l’impression d’être dans la tour de Babel et c’est franchement agaçant.

Chacun des segments de Rôles de composition est caractérisé : rouge pour les mouvements étudiants de 2012, bleu pour le conflit avec la mère, rose pour les scènes de film… Il serait tentant de donner un sens à ce jeu chromatique, il ne semble cependant pas y en avoir. Cela dit, l’artiste jongle habilement et audacieusement avec ces teintes. La représentation des corps qui s’emmêlent, l’un blanc, l’autre d’une couleur uniforme et très vive est particulièrement réussie.

Le grand album de Jimmy Beaulieu est toujours attendu.