C
'est la rentrée des classes, pour Drazig la première depuis le décès de sa mère. Ça lui permettra peut-être de se changer les idées. Dans la cour du lycée, ce sont les agissements d'un potentiel tueur en série – deux meurtres de jeunes filles jusqu'à présent - qui nourrissent les conversations. Sans trop savoir pourquoi, le jeune homme se met à s'intéresser à cette affaire et imagine même de mener sa propre enquête, au grand dam de ses amis qui trouvent cette idée trop macabre à leurs goûts.
Après le monumental La Proie, David de Thuin revient avec un polar aux dimensions plus classiques. Comme le veut le genre, l'intrigue sert surtout de prétexte pour donner l'image d'une époque ou dresser des portraits psychologiques de quelques personnages. Le corps à l'ombre appartient au deuxième type. Drazig et ses potes sont à une époque clef de leurs vies : pas encore tout-à-fait adultes, mais ayant déjà quitté l'adolescence. C'est particulièrement le cas pour le protagoniste principal dont le décès de sa mère souligne brutalement la fin de la première partie de son existence. L'originalité du récit vient de la façon dont l'auteur a su mêler les doutes de cet orphelin déboussolé aux investigations policières. La reconstitution « sociale » est également très pertinente. Les us et coutume des dernières années d'école (les clans, les flirts, les peurs du futur, etc.) sont finement montrés et devraient certainement faire remonter quelques souvenirs – bons ou mauvais – aux lecteurs.
Même si Raymond Macherot reste son influence majeure, de Thuin pioche également allègrement du côté de Lewis Trondheim. En effet, son approche anthropomorphique rappelle beaucoup Les extraordinaires aventures de Lapinot. Par contre, si cette ressemblance est impossible à manquer, elle s'oublie rapidement grâce à l'excellent découpage du scénario. La lecture est fluide et agréable, mais méfiez-vous des apparences ! Sous ses allures bon enfant, le dessinateur a glissé de nombreux indices et réflexions qui se révéleront cruciaux au moment du dénouement final.
Finement construit et agréablement raconté, Le corps à l'ombre ne réinvente pas les codes et se révèle être une fable à suspens doté de plusieurs niveaux de lecture.
Il est vrai que j'ai mis du temps à apprécier ce thriller au fil de ce récit auquel il faudra s'accrocher. Le graphisme ne m'inspirait pas. C'est surtout assez désuet. Cela faisait un peu bd des années 80 avec le style ligne claire.
Il est question de meurtres en série dans une petite ville et d'une enquête par un lycéen. Les têtes des personnages sont ceux des animaux. Bref, encore du zoomorphisme qui est décidément très en vogue. Cela faisait également un genre de bd à la Jason mais dans un tout autre style.
Cette oeuvre prend une certaine densité psychologique mais à la toute fin. C'est finalement une bonne surprise dans un genre que pourtant je n'apprécie guère.